dimanche 17 janvier 2010

Aidan Baker / I Wish Too, To Be Absorbed


Toujours Aidan Baker et cette fois ci en double CD : I Wish Too, To Be Absorbed est une compilation/anthologie parue chez Important records et ce sans aucun effort de présentation (ce qui est vraiment très rare pour ce label d’habitude beaucoup plus arty que ça). Les notes imprimées au dos du livret nous précisent : collected recordings from sources both rare and out of print, compiled by Aidan Baker.
Disons le tout de suite, ce I Wish Too, To Be Absorbed est de très loin l’une des meilleures choses qu’il m’ait été donnée d’écouter de la part du canadien lorsqu’il œuvre en solo. Le choix des titres semble judicieux – je dis semble parce qu’évidemment je ne connais par les disques originaux dont les dits titres ont été extraits – et on ne s’ennuie guère alors qu’avec ces deux disques on en prend facilement pour deux heures et demi de musique : Aidan Baker a choisi d’évoquer ici plusieurs facettes de son travail, diversité et éclectisme sont au rendez-vous (du moins pour le premier disque). C’est assez déconcertant au départ mais comme cela élimine d’emblée l’impression de remplissage qui a tendance à poindre son nez dans n’importe quel enregistrement solo de Baker c’est un bon point à mettre à son actif. On remarque enfin que des musiciens invités ont participé à certains de ces enregistrements, élargissant d’autant le spectre musical d’ordinaire balayé par le musicien canadien. Le meilleur exemple est très certainement Speed Of Thought, huitième et dernière plage du premier disque, sorte de post rock – quel vilain mot – psychédélique balayé par des arrangements de cordes et de trompette. Un vrai moment d’apesanteur.


















Ce même CD 1 débute par un enregistrement de Baker tout seul avec sa guitare : les cordes sont frôlées, tapées, gratouillées, désaccordées… Element # 1 c’est un peu Thurston Moore et Lee Ranaldo qui se regardent en chiens de faïence tout en se demandant ce qu’ils vont bien pouvoir jouer après. Uniquement pour les fans de Sonic Death ou plutôt de Thela. K est une courte pièce instrumentale avec violon, Merge est typique du Baker solo que l’on connaît bien (chant murmuré et guitare fantôme) tout comme Calibrate (guitare, basse et effets uniquement) tandis que Reversion explore les possibilités rythmiques de la guitare acoustique et que Pretending To Be Fearless se vautre résolument dans la bidouille pointilliste et la viande froide avec ses boucles et ses bandes à l’envers. Pretending To Be Fearless est ainsi une bonne introduction à Summer Chill, titre quasiment electro pour ne pas dire trip hop avec boite à rythmes soft et répétitivité élastique sur fond de ressac sonore.
Le CD 2 est nettement plus expérimental (ahem) que le premier, offrant le côté le plus abstrait – qui a dit abscons ? – de la musique d’Aidan Baker. On y retrouve cette science (que j’imagine au départ très extinctive) pour les couches et les surcouches, les bruissements sonores, les portes dérobées empruntées par les passe-murailles, l’isolement des grands espaces, l’ascension vers les abîmes, le côté drone qui irrite tant les vieux punks à moustaches et/ou ventrus. Les bourdonnements sont plus ou moins intenses, plus ou moins étirés, plus ou moins enveloppant, il n’y a toutefois pas de demi-mesure avec ce deuxième disque : c’est du drone pur et dur qui joue sur la durée, l’immersion, tiens voilà du bouddha, bricorama techno ambient et zen party. Mention spéciale pour Esken et sa fréquence grave et I Wish Too, To Be Absorbed et ses raclements métalliques circulaires ou ses chuintements de voix murmurées. Aidan Baker a beau faire de la musique ambient qui ne dérangerait pas un couple de céhespéplusplus et de social-traites en pleine séance de sophrologie rédemptrice, il se garde toujours de toute niaiserie new age et de toute candeur décorative. Favori.