lundi 11 janvier 2010

Aidan Baker / Green & Cold


J’ai lu quelque part qu’Aidan Baker avait publié sous son nom ou sous celui de Nadja plus de 110 enregistrements au cours des huit dernières années… de quoi faire rigoler les nombreux détracteurs du canadien, souvent jugé comme un vulgaire pisse-son lâchant ses enregistrements à la chaîne. Pour tempérer un peu ces statistiques, on peut également estimer qu’un bon tiers – la moitié ? – de tous ces disques sont des rééditions/réenregistrements. Les discographies sélectives d’Aidan Baker et de Nadja compilées par Discogs se trouvent ici et , si jamais il y a des courageuses et des courageux pour faire une étude de fond sur le sujet. Je me contenterai moi de prendre les enregistrements du canadien comme ils viennent : rééditions, nouveautés, qu’importe… il n’aura échappé à personne que malgré son air de Droopy végétarien et malgré une présence scénique inversement proportionnelle à celle d’Eugene Robinson, je suis fanatique du bonhomme, pour le meilleur comme pour le pire. Et comme c’est l’hiver et que le climat n’est décidemment ni au punk à roulette ni au rock festif (d’ailleurs l’est il jamais ?) et encore moins au disco noise (je l’entends le buzz du deuxième album de Marvin), je bouffe du Aidan Baker/Nadja tous les jours. Vous aussi vous allez en bouffer. Ou alors revenez par ici le mois prochain.























On commence par Green & Cold, CD élégamment emballé par Beta-lactam Ring records dans une pochette cartonnée avec un insert comprenant le tracklisting, les paroles, les habituelles données techniques et indiquant que ce disque est limité à quatre cents exemplaires, numérotés à la main. Green & Cold est une réédition, la première version – toujours disponible – de ce disque datant de 2007 chez Gear Of Sand.
Ici, Aidan Baker s’occupe une fois de plus de tous les instruments (guitare, basse, etc), de tous les instruments c'est-à-dire y compris de la batterie, très rudimentaire, et en plus il chante. Chanter, cela semble être la raison même de ce disque apaisé qui navigue dans des eaux très dream pop/shoegaze minimaliste avec la voix plus neutre et blanche que jamais d’Aidan Baker, à faire passer Kevin Shields pour Lemmy Kilminster. Sur les dix titres on compte donc cinq chansons, trois instrumentaux et deux versions en concert à la fin.
Si Chainsaw respecte un format assez court et classique, chanson quoi, Beautiful Beast, après un début tout ce qu’il y a de plus normatif s’enlise/s’envole dans des ambiances spectrales tourbillonnant lentement sur elles-mêmes (nappes sonores lointaines, bandes passées à l’envers, gratouillis de guitares, tout le tralala). Après cette immersion un peu forcée Beautiful Beast arrive à se rétablir de justesse sur ses pieds grâce au retour de la partie chantée du début. Green & Cold est joué à la guitare acoustique, Nick Drake en comparaison est un gai luron et les cordes crissent sous les doigts du musicien comme s’il jouait juste à côté de nous. On ne peut guère faire plus intime que ce dark folk neurasthénique. Machina est un belle balade dans la lignée de Chainsaw, la voix y est traitée de façon encore plus spectrale, les effets s’accumulant sur elle et autour d’elle. Résultat, les quelques huit minutes que dure Machina (incluant un final moelleux et en pente douce auquel il faut rajouter deux instrumentaux enchaînés qui gâchent un peu tout) sont le moment fort d’un disque rallongé par deux versions live de Green & Cold et du même Machina qui elles n’apportent rien de nouveau. Malgré ses longueurs instrumentales cet album est assurément un bon cru d’Aidan Baker. Et c’est plutôt pas mal de la part d’un stakhanoviste.