vendredi 8 janvier 2010

Larvae / Loss Leader





















J’ai bien failli passer complètement à côté de cet album de Larvae, groupement d’électroniciens qui s’étaient montrés particulièrement bluffants avec Dead Weight, un album a mi chemin entre dub indus à la Scorn et trip-hop maladif avec une pointe de drum and bass et saupoudré de participations vocales – Jessica Bailiff (quelques trucs marquants pour ceux qui aiment ça sur Kranky), Claire Campbell de Hope For Agoldensummer ou les rappers Scalper (un furieux et au passage un ancien Fun-Da-Mental) et Non de Shadow Huntaz. Ça, c’était déjà en 2006, une éternité. En novembre 2008 Loss Leader, nouvel enregistrement de Larvae, est sorti dans les bacs, toujours grâce aux bons soins de Ad Noiseam, et c’est précisément de cet album ci dont nous allons causer un peu maintenant.
Oui, j’ai mis le temps avant de me rendre compte que le trio existait toujours et qu’il avait donné des signes patents de son existence depuis l’excellent maxi partagé avec Enduser. Larvae – le groupe tire son nom de la forme primitive de Mothra, l’ennemi juré de Godzilla, plus d’explications pour les geeks ici – Larvae donc propose avec Loss Leader un double mini album. Comprenez qu’il y a deux parties très distinctes à ce disque, tellement distinctes qu’une édition en double 12 pouces aurait été la bienvenue et le groupe pousse même la plaisanterie jusqu’à nommer ces deux parties tout en leur associant des visuels différents. On a donc droit à un EP 1 : Turning Around et à un EP 2 : Monster Music 2 (pour arranger le tout Larvae avait publié un EP intitulé Monster Music en 2003).
Turning Around est le versant atmosphérique de Larvae. Les guitares, jouées par le groupe, y ont la part belle et la musique, tout en gardant un vague arrière plan électronique, lorgne furieusement vers la pop brumeuse – l’intro du premier titre, tout en filigranes et en pointillisme digital fait furieusement penser à du Hood circa Cold House – et tend vers un post rock froid - le très catchy Heavy, effectivement lourd dans ses intentions mais au résultat savamment aérien même si doté d’un piano trop évident. Giftshop (très rytmique) et Dischord (plus tendance de l’eau dans le shoegaze) complètent cet EP 1 calme et serein, agréablement construit mais qui a un peu de mal à marquer les esprits.
Loss Leader
devient franchement intéressant avec Monster Music 2. Place aux rythmes digitaux martelés, aux lignes de synthé névrosées, aux basses énormes et poisseuses, aux ambiances industrielles et malades. Monster Music 2 c’est le côté le plus vindicatif et bruyant de Larvae, celui qui fait penser aux anciens albums de Scorn, ceux de la deuxième période du monstre britannique (entre Evanescence et Gyral). Le premier titre Monster Oxygen est déjà pas mal question oppression et martèlement rythmique à la froide lenteur calculée. Cela s’aggrave dangereusement par la suite – Megalon, plus nuancé, et sa basse dub saisissante et particulièrement efficace, Gigan And The Mysterians et ses ferraillements digitaux avant l’arythmie programmée et la musique de film – mais c’est avec Oxygen Destroyer que Larvae explose ce qui nous reste de nerfs : basses qui bourdonnent inlassablement, beat rectal, retour des guitares dreamy en arrière-plan et ligne de synthé qui fout les jetons. Soit une sorte de synthèse entre les deux parties prétendument distinctes de ce disque… quelques réécoutes confirment d’ailleurs que Loss Leader n’est pas un disque aussi schizophrène que ces concepteurs le prétendent. Il n’en demeure pas moins intrigant et excellent.