mardi 26 avril 2011

L'Enfance Rouge / Bar - Bari


François Cambuzat, chanteur et guitariste de L’Enfance Rouge, a beau affirmer qu’il se moque des supports audio, qu’un vinyle ne sert à rien, qu’un CD c’est dépassé et que pour écouter de la musique seuls des mp3 en 320 kbits/s suffisent à son tempérament de baroudeur insatiable, nous on affirme au contraire que Bar-Bari, le dernier disque en date de son groupe, a sacrément de la gueule et qu’en plus il sonne terriblement bien lorsqu’on l’écoute via une double rondelle de plastique de 25 centimètres de diamètre.
Déjà disponible en CD chez Wallace records, Bar – Bari bénéficie donc également d’une parution en vinyle grâce aux Disques De Plomb. Comme d’habitude avec le label (confère les deux premiers volumes des Rosemary K’s Diaries, les splits Marvin - Zëro et Binaire - Nicolas Dick) le format choisi est le plus beau de tous les formats des disques vinyle, le 10 pouces, sauf que cette fois-ci, vu la longueur de l’album, il s’agit d’un double, dans une pochette gatefold, ce qui permet une fois de plus de bien profiter du superbe artwork, ici l’œuvre de Igor Hofbauer (allez, je vous aide un petit peu, le bonhomme a également fait quelques visuels pour Blurt).





















Bar – Bari c’est uniquement huit titres et hormis le premier d’entre eux, Perquisitions, il s’agit de nouvelles versions de titres déjà parus sur l’album Trapani – Halq Al Waady, le précédent et superbe enregistrement de l’Enfance Rouge réalisé avec l’intervention de nombreux musiciens arabes et orientaux et les arrangements magnifiques de Mohamed Abid. Le but de Bar – Bari c’est donc de proposer les versions décharnées de ces compositions, dans l’esprit du trio de base (celui que l’on peut écouter et apprécier sur l’album Krsko – Valencia), proche de ce qu’il est en concert, dans toute son immédiateté et toute sa crudité. Certains fans de L’Enfance Rouge vont ou ont déjà hurlé à la supercherie mais il n’y a pas de quoi : les versions de Bar – Bari sont très différentes de celles de Trapani – Halq Al Waady. On a parfaitement le droit de préférer les unes aux autres mais ce qui est proposé ici reste de qualité.
L’effet de déjà entendu est également suspendu par le fait que l’ordre des titres est totalement différent. Si on remettait les titres de Trapani – Halq Al Waady dans l’ordre de Bar – Bari on serait certes moins perdus dans ce jeu de piste qui sollicite à la fois nos souvenirs et nos sensations… mais je veux bien vous aider à nouveau : la séquence pour écouter les titres de Trapani – Halq Al Waady dans le nouvel ordre est 11/6/7/3/2/10/1, à condition de connaitre Bar – Bari en CD, puisque dans sa version vinyle l’ordre est encore quelque peut différent (est ce que tout le monde suit ?). Alors ne boudons pas notre plaisir.
Et notre plaisir c’est un groupe assez unique en son genre, un groupe de vagabonds et de militants, au travers de la musique duquel transpirent toutes sortes d’influences hors musique occidentale (oui cela s’entend, même sans les arrangements de Mohamed Abid) et utilise au moins autant de langues pour chanter qu’il y a de nationalités différentes parmi les membres du groupe. L’Enfance Rouge n’échappe pas toujours à ce romantisme et ce côté littéraire des groupes à textes mais le trio a toute l’énergie et la tension d’un groupe de post punk et de noise – ce dont il ne se revendique d’ailleurs pas –, amoureux d’ailleurs et de ce qu’au pire on pourrait qualifier de « folklore mondial », mais sans aucune démagogie. Seul moment pénible du disque, la participation de Bertrand Cantat (toujours aussi incapable de ne pas en faire des tonnes) qui plombe l’ambiance à la fin de Vengadores.