vendredi 1 avril 2011

Report : No Drum No Delay, Welldone Dumboyz et Sanair à Grrrnd Zero


















Final d’un mois de mars particulièrement bien rempli – une grosse vingtaine de concerts intéressants et peut être même plus encore, je n’aurai assisté qu’à neuf d’entre eux mais c’est déjà pas mal – et à tout seigneur tout honneur : les Welldone Dumboyz sont enfin en ville ! Mais ne nous énervons pas, du moins pas tout de suite… Pour compléter le programme on note également sur l’affiche la présence de Pizza OD, de Sanair et surtout de No Drum No Delay. Encore une belle soirée.
De Pizza OD je ne pourrai rien dire : le pop punk à tendance émophile cela n’a jamais été mon truc et ne le sera jamais non plus, sauf dans les (très) rares cas, et encore, où c’est fait au quatrième degré ce qui ici n’est évidemment pas le cas. Pour info Alex, le chanteur/guitariste de Pizza OD, écrit également dans le fanzine Ratcharge – un vrai fanzine : papier et tout ça, pas une de ces saloperies web comme un blog, mais vous pouvez quand même aller faire un petit tour par ici pour vous faire une petite idée de la chose.
Et pendant que Pizza OD joue devant ses fans ainsi que quelques curieux qui ont enfin commencer à arriver à Grrrnd Zero et que pour ma part je reste donc gentiment accoudé au bar en compagnie de ma meilleure amie du moment*, un barbu s’installe juste à coté, derrière le stand de merch particulièrement bien fourni ce soir en cassettes ornées d’illustrations licencieuses et autres cochonneries do it yourself et tente de brancher deux ou trois pédales d’effets sur un vieux poste à cassettes : une fois qu’il y sera enfin arrivé il nous gratifiera d’une courte performance de harsh lofi option sac poubelle, assez drôle et complètement décalée. Finalement cette soirée ne s’annonce pas si mal.















Les choses sérieuses vont donc enfin pouvoir commencer. Et les choses sérieuses c’est No Drum No Delay, groupe vu il n’y a pas si longtemps de cela lors d’un concert de The Healthy Boy & The Badass Motherfuckers au Sonic. On le sait, No Drum No Delay est formé d’anciens Bananas At The Audience et, après ce concert au Sonic justement, j’en avais parlé plus d’une fois autour de moi et avais souvent récolté cette simple réponse – assez énervante je dois le dire – « ouais j’en ai déjà entendu parler mais, tu comprends, j’aimais trop les Bananas pour aller voir leur nouveau groupe en concert ». Ouch. Ce deuxième concert vu d’eux confirme pourtant tout le bien que j’en pensais déjà et inutile de dire que tous les frileux ont tort de ne pas oser goûter aux saveurs fortes et enivrantes de ces quatre garçons.
Un vocaliste – on ne peut plus vraiment dire chanteur – également saxophoniste, un bassiste/pois sauteur, un guitariste et un batteur : No Drum No Delay improvise tout le temps, se cherche, se rue dans des passages complètement furieux, alterne avec des accalmies peut être parfois un petit peu trop indécises, se relance, en déséquilibre, s’arrache une nouvelle fois du sol et réussit quelque chose de bien difficile à faire sans faute de goût et sur laquelle beaucoup d’autres se sont cassés les dents : le mariage de l’impro, du free avec le hard core et la noise. Une certaine classe malgré quelques hésitations et peut être aussi que je commence à m’habituer aux bidouilles vocales – grrrroooooound zeeeeeeero tournant en boucle et manipulé à l’envie. Allez donc voir No Drum No Delay en concert, allez les encourager, le groupe fait bien plus que le mériter.















Je les attendais de pied ferme et non sans impatience et ils sont là, les Welldone Dumboyz. Comme on va encore me reprocher de m’enflammer outrageusement et d’exagérer à propos de ce petit groupe de province (qui plus est de l’est de la France et plus précisément de Belfort : il parait que c’est encore pire que d’être alsacien et lorrain réunis), j’affirmerai tout de suite et pour en finir que les Welldone Dumboyz c’est un peu comme si les Melvins passaient à la moulinette psychotique des Butthole Surfers. Quelques riffs sabbathien font leur apparition mais les rythmiques punks règnent en maitre, suivis de breaks assez incroyables, surtout lorsqu’en même temps vous regardez ce batteur – qui n’est autre que le harsher à barbe et magnéto-cassettes de tout à l’heure** – s’éreinter et fracasser ses futs en grimaçant comme un cornu. Les parties chantées sont assurées par le guitariste – mais également pour une bonne partie par le batteur – sur un mode décalé, pas tout à fait grotesque et absurde mais presque et le spectacle fascinant d’un trio de malades dégénérés et excessifs vous accapare rapidement. En bonus : des private jokes qui font rire tout le monde pour une représentation permanente qui, on l’apprendra plus tard, n’en est pas une – ces trois types agissent pareil lorsqu’ils ne jouent pas, une fois le concert terminé.
Si on apprécie l’humour décalé et la douce folie brute de ces jeunes gens, on apprécie encore plus la musique des Welldone Dumboyz. Décharges électriques, basse bourdonnante à la big muff mais aussi très souvent jouée de manière très fluide aux doigts et avec un son clair et chaud très réussi (qui plus est, sans souffle, s’il vous plait), batterie de malade, chant de mongoloïdes trépanés (donc) et surtout des compositions de bonne qualité : des titres que l’on connait déjà comme le mega hit I Am The Cachalot ou des bizarreries telle que Bloody Green (aka la chanson au triangle) ; et puis aussi des compositions que l’on ne connait pas encore car les Welldone Dumboyz ont un trois titres déjà enregistré et mixé, tout ce qu’il y a de plus prêt, la seule chose qu’il leur manque c’est les moyens et donc un ou des labels pour le publier décemment (avis aux amateurs).





















Le batteur des Welldone Dumboyz donne des grands coups de latte dans sa batterie pour la faire valdinguer mais comme la grosse caisse est dument callée, il nous fait un double salto arrière pour atterrir sur les fesses, pas très loin de la scène sur laquelle s’est installé un nouveau venu. Sanair c’est lui et il démarre son set alors que le guitariste des welldone Dumboyz nourrit son ampli de feedback. Transition d’autant plus intrigante que la musique de Sanair n’a rien à voir avec celle du trio.
A l’aide de pédales d’effet, d’une guitare ou d’un archet Sanair est l’un des nombreux one man bands pratiquant une musique instrumentale, ambient, évanescente parfois, répétitive mais pas trop, bruitiste à l’occasion mais surtout extrêmement mélodique et emprunte d’une mélancolie certaine. Ah j’en vois quelques uns qui baillent déjà d’ennui… quel manque de générosité et de curiosité de leur part, je ne le cache pas. Car Ben***/Sanair c’est largement le dessus du panier question accroche sensitive et pouvoir attractif. Bien construite, judicieusement agencée et sachant distiller ses effets sans perdre l’attention de l’auditeur en route, la musique de Sanair n’a pas besoin de revendiquer un quelconque côté expérimental : Sanair est déjà une expérience en soi, aussi belle que forte. Aussi lorsque les rares personnes présentes en cette fin de soirée lui réclame de jouer un titre en plus, il s’exécutera sans problème. Merci.
[les photos du concert, notamment quelques unes de Pizza OD et du vilain barbu, sont ici]
* pas de confusion : je parlais uniquement de ça
** plus connu des amateurs sous le nom de Lord x Gonzo
*** détail qui ne gâche rien, ce garçon est aussi le Président Directeur Général de Fragments, micro label fort intriguant sur lequel a justement été publié le premier album des Welldone Dumboyz