jeudi 4 juin 2009

Kourgane / Bunker Bato Club























Avec son digipak fait main (bravo pour la découpe au cutter les gars) agrémenté de ce qui ressemble à une vraie photo recoloriée, Bunker Bato Club est le disque avec lequel tout a recommencé pour Kourgane. Nous sommes en 2005 et le groupe de Pau se retrouve en formation quatuor autour de l’incroyable chanteur Fréderic Jouanlong serré de très près par deux guitares (dont une baryton) et un batteur acrobate. Cette renaissance était plutôt inespérée, disons plutôt qu’elle a permis de remettre un peu d’attention sur un groupe qui méritait bien ça. Mais le pire c’est que pour beaucoup -dont moi- Bunker Bato Club, premier disque résultant de cette résurrection et publié dès 2006, n’a été découvert qu’après l’extraordinaire révélation occasionnée par Heavy -deuxième album post reformation et principale bombe incendiaire de l’année 2008.
Comme son incontournable successeur, Bunker Bato Club a été enregistré par Stephan Krieger aux studios Amanita, autant dire que ça sonne bel et bien. Mais cela ne sonne pas tout à fait comme Heavy et dans un certain sens c’est vraiment tant mieux. On peut dire que Bunker Bato Club est le chaînon manquant dans la discographie de Kourgane, un enregistrement à la croisée de l’ancienne version du groupe (l’album Ivan Rebroff Lonely Heart Club Band sur le label Sonore) et du son imposant, massif, épidermique et animal de maintenant.
On reconnaît sans peine l’écriture si particulière du groupe : le premier titre Cerf A est caractéristique d’une structure se passant admirablement bien du très classique couplet/refrain/pont/etc et qui délie un sens de l’énergie explosif au service d’une narration -musicale- captivante et d’une poésie -toujours les textes très rythmiques et phonétiques de Fréderic Jouanlong- invraisemblable. Mais les éléments free bordéliques et barrés sont toujours présents, comme sur Guernica Sobresalto haché par une syncope persuasive et traversé de gazouillis improbables. Les guitares sont également moins pleines, leur son est moins saturé (Schizophrenic Outsider), les riffs plus alambiqués, prenant quelques détours bien sentis et lorsque les six-cordes partent en vrille dans des crescendos bruitistes (Victoria Lac) on a le droit de penser à Sonic Youth -le Sonic Youth éternel de Sister et Daydream Nation, pas celui du dernier album gériatrique des new-yorkais. Le travail sur la voix aussi paraît plus varié, encore plus proche de Phil Milton voire même d’un Mike Patton qui aurait oublié d’être pénible. Sur What Did You Do Today Darling ? Fréderic Jouanlong se paye à nouveau le luxe de la préciosité sans risquer une seule fois d’être ridicule et vain.
La seule chose qui reste un réel mystère chez Kourgane c’est cet attrait pour les métaphores animalières (le dessin sur la photo du recto de la pochette, ceux du verso, les titres des chansons, les paroles…). Ces mecs là se prennent ils pour des grands cerfs majestueux et insaisissables ou préfèrent ils les sangliers violemment sauvages et destructeurs ? Bunker Bato Club penche plutôt du côté des coups de cornes, de la grâce provocatrice et du rut païen en plein solstice d’hiver.















[Ce soir Kourgane sera enfin en concert à Lyon, cela se passe au Sonic avec Kiruna en première partie. La chasse est ouverte.]