vendredi 4 juin 2010

Ten Volt Shock explose le compteur























J’ai toujours cru que Franck Otto, chanteur et guitariste de Kurt, avait monté Ten Volt Shock pour se consoler du split de son ancien groupe : La Guard, excellent album de 2002, n’était plus pour moi qu’un bon (et lointain) souvenir, un disque voué à disparaître de ma mémoire, enseveli sous tant d’autres sortis depuis, hop au rancart. J’avais tout faux parce qu’en 2002 Ten Volt Shock existait déjà mais ça je ne le savais pas. J’avais aussi tout faux parce que Kurt existe toujours – ils se sont reformés ou quoi ? – et, mieux, le trio allemand effectuera même une toute petite tournée française fin juillet/début août (le 1er août à Lyon au Grrrnd Zero) ce qui est une sacrée bonne nouvelle. J’avais surtout tout faux parce que si Ten Volt Shock reprend une bonne partie du langage de Kurt (même type de formation en power trio guitare/basse/batterie et chant, même dynamique irrésistible, même concision, etc) la musique des deux groupes est finalement différente. Kurt c’est du lourd et de l’irrépressible, panzer style. Ten Volt Shock, plus léger musicalement, plus précis aussi, virevolte et stridule comme un Messerschmitt lancé en piqué sur la ligne Oder-Neisse. Aujourd’hui je préfère Ten Volt Shock à Kurt, peut être parce que je viens de voir les premiers en concert et qu’ils ont tout simplement été excellents – on révisera ce jugement, ou pas, le 1er août prochain.
















Il a été un temps question que les organisateurs du jour prévoient un troisième groupe, même un super groupe mystère de la mort murmurait-on, mais on se contentera finalement de deux. Ce fut malgré tout un bon moment parce que autant Ten Volt Shock a délivré un foutu concert – je sais que je viens tout juste de le dire mais je crois que je vais le répéter encore au moins une fois un peu plus loin – autant les deux (jeunes) Carne qui ouvraient ce soir là ont eux aussi assuré un set impressionnant.
Il fut un temps aussi où faute de mieux on présentait le duo lyonnais comme le nouveau groupe d’un ancien Llorah – alors fraîchement débandé – mais maintenant il va falloir définitivement oublier ce genre de raccourci biographique. Nos deux tourtereaux (un guitariste qui hurle aussi et un batteur qui cogne comme une brute) prétendent qu’ils se sont rencontrés sur Meetic et après des débuts difficiles mais prometteurs ils ont rapidement trouvé leur vitesse de croisière (d’amour ?). Aujourd’hui Carne a plein de toutes nouvelles compositions et vient de publier son premier EP, Metropolis, chez Atropine records (il faut dire la vérité : il s'agit du label du guitariste/chanteur).
Passée la surprise de ne pas vraiment reconnaître de compositions entendues lors des précédents concerts de Carne, on ne peut que trouver que le duo a mis les bouchées doubles et a refondu son sludge/hardcore/metal, l’a épaissi, conservant ces mid-tempos ravageurs et distillant une vraie lourdeur poisseuse, métronomique et écrasante sur fond de riffs bien saignants et graisseux et de rythmes surpuissants. Le groupe joue mieux, avec plus d’aplomb et d’assurance – les deux ont définitivement laissé tomber le positionnement l’un en face de l’autre mais de profil par rapport au public pour jouer face à celles et ceux qui sont venus les écouter et Carne est de plus en plus accrocheur et efficace. Le chant est plutôt rare mais assez réussi dans le genre rocailleux et beer drinker qui pue de la gueule (Jon Weisnewski/Matt Pike/Lemmy/etc). Le groupe a l’intention de tourner sur toute la première quinzaine du mois d’octobre prochain : allez donc les voir ou mieux, bookez-les vous-mêmes.
















Pour la suite je m’attendais donc à du Kurt mk2 (je n’avais jamais vraiment jeté une oreille sur les enregistrements de Ten Volt Shock qui sont pourtant très nombreux, la honte, vraiment) mais le trio de Fribourg est nettement plus orienté noise punk, avec une pointe de dansabilité et toujours ces rythmes effrénés – le batteur de Ten Volt Shock, du haut de sa batterie minimale (pas de toms mis à part le tom basse mais une cymbale perforée de gros trous) est celui qui emmène le groupe toujours plus loin, et on se demande toujours jusqu’où tellement il a l’air de passer en force par des recoins improbables en empruntant des chemins tordus. Mais l’ensemble reste toujours étonnement fluide et direct : Ten Volt Shock a ce double talent d’aller droit au but tout en se contorsionnant.
Ce batteur est donc vraiment incroyable et ses deux petits camarades s’empressent de le suivre sur ce terrain là, celui d’une musique ultra énergique et torsadée. Le son du groupe est tout dans les médiums et les aigus – la caisse claire claque on ne peut plus sèchement mais c’est la basse qui remporte la palme. Elle est même un peu trop forte cette basse, masque parfois un peu trop le chanteur/guitariste mais rien de très grave. Par contre l’ensemble du groupe joue à un volume terriblement élevé, à tel point que le sondier du Sonic viendra au moins deux fois pour leur demander de baisser un peu, demande que le guitariste et le bassiste s’empresseront de faire semblant d’accepter, genre je baisse d’un demi-millimètre mon potard et je le remontre direct derrière de deux fois plus.
Résultat, je sors du concert de Ten Volt Shock vraiment ravi mais complètement sourd. Comme à peu près toutes les personnes présentes. Toutes les personnes présentes ? C’est bien là le principal problème du jour : à peine une quarantaine de personnes ont payé cinq euros pour assister au concert et c’est décidément trop peu. Trop peu parce que ce concert en valait totalement la peine. En espérant qu’un peu plus de monde se déplacera le 1er août prochain pour le retour de Kurt.