PORTAL est, dit-on, le plus extrême des plus
extrêmes des groupes de metal. Ouais, bon, ben… on se calme tout de suite,
hein, s’il vous plait. En 2013 le « plus extrémiste des groupes de
metal » cela ne veut plus dire grand-chose. Portal reste, c’est vrai, le
cas typique du groupe qui semble toujours vouloir et pouvoir aller plus loin, les
rois de la surenchère – du build-up metal comme on dit dans les milieux
autorisés – mais prend également un malin plaisir à jouer avec les codes établis
dans les genres death metal et black metal. Allez, juste pour rire j’en profite
vous donner tout de suite les pseudonymes de ces jeunes gens : The
Currator au chant, Horror Illogium et Aphotic Mote aux guitares, Omenous Fugue
à la basse et Ignis Fatuus à la batterie. Précisons également que les cinq
Portal montent sur scène déguisés, sûrement pour faire (un peu) peur mais, aussi et surtout, pour faire rire. Il y a de toute évidence du grand-guignol là dedans, du
grand-guignol mélangé à de la complaisance morbide, un peu comme lorsque Mayhem
apparaissait sur scène entouré de têtes de porcs sanguinolentes.
Ce premier paragraphe en guise de cassage de
réputation en règle ne tend à expliquer que deux ou trois petites choses :
premièrement on s’en fout de savoir qui est le plus extrême des extrêmes ;
deuxièmement, combien même on s’en soucierait malgré tout, Portal ne saurait
prétendre à ce titre de gloire parce que sa musique, on a du mal à la prendre
totalement réellement au sérieux. Et citons quelques contre-exemples – cette
liste est non-exhaustive ni limitative et ces noms sont uniquement les premiers
qui me viennent à l’esprit : chacun dans leurs genres respectifs, From Enslavement To Obliteration de
Napalm Death, Streetcleaner de
Godflesh, Left Hand Path de Entombed
ou Murderworks de Rotten Sound sont
des disques que l’on peut continuer à prendre au sérieux tant ils font toujours
aussi mal. Vous avez remarqué ? Il n’y a en fait aucun groupe de black
metal dans cette liste (qui n’est donc pas tout à fait donnée au hasard) tout
simplement parce que les groupes de black metal sont des groupes de comédiens
de boulevard et d’éternels adolescents perturbés. De la musique totalement
immature.
On en revient au côté grand-guignol de Portal et
on n’a pas peur d’affirmer non plus que le groupe a fini par ne garder que
cette seule composante du noir metal dans sa propre musique : la
bouffonnerie des enfers, laquelle est, dans le cas de Portal, effectivement
poussée aux extrêmes. Vous allez finir par croire que je n’aime ni Portal ni Vexovoid, le quatrième album du groupe,
alors qu’en fait c’est tout le contraire. Honnêtement je lui préfère ses deux
prédécesseurs, principalement Outre
(2007) et – un peu moins – Swarth
(2009) mais je l’aime quand même beaucoup ce Vexovoid. Un disque qui a
de plus en plus à voir avec le death metal uniquement, certes un death d’apparence
très sombre, parfois inutilement compliqué, ultra violent, über rapide et
terriblement malsain dans ses intentions affichées. Et c’est là tout le génie
de Portal : désacraliser le metal qui fait peur, le rendre à nouveau profondément
jouissif mais (enfin !) pour de bonnes raisons. La musique est un plaisir,
une façon comme une autre de s’amuser et ça les cinq Portal l’ont très bien
compris. Ils s’amusent comme on joue au loup dans les cours de récréation,
comme on montre sa bite en classe de cinquième pour voir qui a déjà des poils
et qui n’en a pas, comme on fait exploser des pétards dans des merdes de chiens
pour saloper les carrosseries des voitures stationnées juste à côté, comme on
écrase du pied une coquille d’escargot gluant pour voir comment c’est à
l’intérieur. De la musique de gamins, pour d’autres gosses, éternellement. Quelle
malédiction !
[Vexovoid
est publié en CD digipak et en vinyle par Profound Lore records – à noter
que le livret est aussi moche que l’artwork du disque mais ce n’est pas bien
grave non plus]