Il ne faut surtout pas se laisser aller à la paresse avec Dissolve Me, le troisième album de The Feeling Of Love – le tout premier pour Born Bad records – et se dire tout de suite, après une poignée d’écoutes tout juste à moitié attentives du fond de la cuisine tout en lavant la vaisselle accumulée depuis deux jours, que voilà bien un disque supplémentaire de The Feeling Of Love, sans grande surprise ni trépidations inattendues, hop emballez c’est pesé et combien je vous dois ma bonne dame. C’est pourtant exactement le sort que j’ai d’abord réservé à Dissolve Me, d’une moue boudeuse et caractérielle.
Erreur. Très grosse erreur. Le précédent disque du trio, OK Judge Revival, aura toujours une petite place à part dans mon cœur d’artichaut, peut être même que je l’emporterai sur une île déserte avec ma vieille platine, mon vélo et une dynamo pour produire l’électricité nécessaire à une énième écoute euphorique, mais Dissolve Me mérite également toute notre attention et toute notre admiration.
Finissons-en tout de suite avec un quelconque sentiment de bienveillance : le principal problème de Dissolve Me c’est presque uniquement celui de paraitre après OK Judge Revival. Le deuxième problème – et finalement second, seulement deux problèmes pour un disque ça ne fait vraiment pas beaucoup – de Dissolve Me c’est d’être plus que jamais orienté pop sixties et paradoxalement d’avoir l’air de comptabiliser bien moins de tubes que son illustre prédécesseur, la faute à un son moins rentre dedans et une chouille trop aplani. Mais ce n’est vraiment qu’un faux air et le « problème » se révèle d’autant plus mineur et l’appréciation inutilement tatillonne qu’on est rapidement obligé de se rendre compte que rien que sur la première face de Dissolve Me on dénombre, question chansons au futur incontournable : Cellephane Face, Dissolve Me ainsi que We Are Out Of Tune et c’est sans compter sur la reprise de Là Bas C’est Naturel de Serge Gainsbourg qui figurait déjà sur l’excellent EP School Yeah et que le groupe a eu la très bonne idée de réintégrer ici.
En face B, le déluge sixties se poursuit et l’avalanche de tubes continue également – « garageu sixtise roquaineurole » chante non sans humour et avec un accent français à couper au couteau Guillaume Marietta sur le presque génial Empty Trash Bag. Cette face B, c’est elle qui élève vraiment Dissolve Me au même niveau que les autres disques de The Feeling Of Love, c’est elle qui nous fait aimer ce disque avec la belle assurance qu’il va nous accompagner pendant un bon petit bout de temps, à chaque fois justement que l’on aura besoin (le cas échéant, rayez les mentions inutiles) de garage sixties, de rock’n’roll acidifié, de velours en sous-sol, de triolisme de l’espace ou de soleil amphétaminé.