jeudi 31 mars 2011

Pneu / Highway To Health





















L’annonce de l’enregistrement d’Highway To Health, le deuxième album de Pneu, par Kurt Ballou (de Converge, faut-il encore le rappeler ?) aux Godcity studios en novembre 2010 a de quoi surprendre : qu’est ce que nos deux tourangeaux préférés sont donc allés faire là-bas ? Avaient-ils réellement besoin du savoir-faire indéniable de Mr Ballou pour avoir un gros (gros) son ? Se sont-ils enfin convertis au dieu metal ? Ont-ils trahi la cause du math-rock ? Est-ce qu’ils vont eux aussi soudain réapparaitre couverts de tatouages et de piercings aussi sexys qu’affriolants ? Vont-ils se mettre à chanter voire se mettre à hurler des slogans politiques ? Sont-ils vraiment végétariens ? Ont-ils honteusement touché une subvention du ministère de la culture dans le cadre d’échanges franco-américains ? Et pour finir : ont-ils appris à jouer ? Quel suspense…
Comme pour presque tous les précédents disques de Pneu, c’est Head records qui a balancé le pavé dans la mare. Laquelle ne va pas tarder à déborder tant cet enregistrement s’est révélé être – après quelques écoutes seulement et l’effet persistant encore voire s’accentuant les jours d’après – la petite bombe de précision et de défouraillage intense que l’on pensait pouvoir espérer de la part du duo (mais n’allons pas trop vite). Rajoutons que le label a également eu la très bonne idée de publier Highway To Health simultanément en CD et en vinyle.
Mais reprenons toutes ces interrogations, une à une et dans l’ordre s’il vous plait :
- Qu’est ce que nos deux tourangeaux préférés sont donc allés faire aux Godcity studios, Salem, Massachusetts, USA ? En profiter pour changer d’air et prendre des vacances par exemple, ou peut être également donner quelques concerts aux alentours dans des rades pourris peuplés de mecs ne les connaissant pas/n’en ayant rien à foutre d’eux et en tous les cas visiter du pays – les voyages forment la jeunesse, c’est bien connu et autant en profiter avant que la roue tourne.
- Pneu avait-il réellement besoin du savoir-faire indéniable de Mr Ballou pour avoir un gros (gros) son ? Non mais le groupe aurait eu tort de s’en priver : Highway To Health est la première expérience réelle en studio professionnel pour Pneu et un bon exemple d’équilibre entre clarté et puissance du son d’un côté et folie et abrasivité de l’autre. Kurt Ballou a semble-t-il compris que nos deux amis avaient déjà suffisamment de pression et de rage pour ne pas gonfler davantage sa production ; il a aussi compris que sinon il risquait de trop rigidifier une musique virevoltante et aiguisée comme une boule de nerfs à vif (et lardée de moult accroches mélodiques).
- Pneu – désormais dûment clouté par Kurt Ballou – s’est-il enfin converti au dieu metal ? Alors ça c’est déjà fait depuis fort longtemps avec Chaours, le titre plus mega doom que mega boom de Pneu et que l’on peut retrouver sur le 12’ que le duo a splité l’année dernière avec les excellents Nervous Kid.
- Les deux Pneu ont-ils trahi la cause du math-rock ? La trahison aurait été que Pneu mette de l’eau dans son vin ou du tabac dans sa weed or il n’en est rien. La fureur de Pneu est toujours là, difficile d’en réchapper
- Est-ce que les membres de Pneu vont eux aussi réapparaitre couverts de tatouages et de piercings affriolants ? A ma connaissance non. Mais attendons donc de les revoir en concert*. Et puis, aux dernières nouvelles, JB (le batteur) fait toujours de la sérigraphie, ce qui bien sûr n’a rien à voir. Il s’est même occupé d’emballer le DVD qui retrace la fameuse tournée de la Colonie de Vacances et qui sera très bientôt disponible (featuring Marvin, Papier Tigre et Electric Electric).
- Vont-ils se mettre à chanter voire se mettre à hurler des slogans politiques ? Sur Highway To Health Pneu a eu la très bonne idée d’inviter Eugène Robinson d’Oxbow pour interpréter un titre, le bien-nommé Knife Fight : cela fait bien longtemps que l’on n’avait pas entendu Eugene couiner de plaisir avec une telle violence punk, façon supplice haïtien du collier – Knife Fight est ce que l’on appelle une collaboration réussie, de nos jours ça ne court pas les rues non plus.
- Sont-ils vraiment végétariens ? L’un des meilleurs titres d’Highway To Health s’intitule Choux Crane : en plus voilà deux jeunes gens d’une politesse exemplaire.
- les Pneu ont-t-ils honteusement touché une subvention du ministère de la culture dans les cadres d’échanges franco-américain ? OUI, bien sûr, c’est écrit en toutes lettres dans les dossiers de l’affaire Cluestream.
- Et enfin, le duo a-t-il appris à… mieux jouer ? Pas la peine : Pneu savait déjà en foutre de partout et dans tous les coins. Mais sur Highway To Health le groupe le fait avec davantage de précision encore. Cela ne sert à rien d’être un as du double tapping à douze doigts et un maitre des roulements de caisse claire de quelques nanosecondes pour finir dans le mur de la démonstration pure et simple or le nouveau disque du duo, passé ce sentiment appuyé d’en prendre plein la vue et les oreilles, persiste avec l’impression, meilleure encore, d’en prendre plein la gueule.












* Pneu est en tournée dans le monde entier en ce moment même ou presque avec un passage au festival Avatarium qui se déroulera du 13 au 16 avril principalement au Musée de la Mine de St Etienne ainsi que dans d’autres lieux de la ville.
Le 16 avril Pneu y jouera donc en compagnie d’Electric Electric – de la part de qui on attend avec une impatience démesurée la suite d’un premier album incroyable de plus d’un point de vue –, les géniaux détraqués de Don Vito – une chronique d’album et un report un peu moins élogieux – ainsi que Chris Carter et Casey Fanny-Tutti (une moitié de Throbbing Gristle).
Le festival Avatarium c’est beaucoup de musique(s) mais aussi des expos, des performances, du théâtre, etc – n’hésitez donc pas à consulter le programme.