S’il y a vraiment un parcours musical atypique,
c’est bien celui de ROBERT HAMPSON.
Après avoir partiellement réinventé la pop psychédélique et noisy au sein de Loop – influençant ainsi des tonnes de groupes qu’au pire on qualifiera de
merdiques et au mieux de shoegaze –, le musicien anglais a sombré pour notre
plus grand bonheur dans la musique expérimentale. Si Main – son deuxième groupe
– lui a servi de passerelle entre le monde de l’électricité et celui de la
composition acousmatique, Robert Hampson vole depuis quelques années de ses
propres ailes et publie dorénavant ses pièces sous son propre nom. Répercussions est son deuxième véritable
album studio édité en 2012 par les Editions Mego – pour
mémoire son tout premier Vectors a été publié en 2009 par
Touch records.
On ne
parlera ici que de la version CD et stéréo de Répercussions ; le digipak contient en effet un DVD avec un
mixage surround 5.1 mais que l’on n’a jamais pu écouter, faute de matériel adéquat.
On y perd peut-être quelque chose – de la profondeur et du volume
d’appréciation sur les trois pièces proposées ici – mais on s’en contentera. On
s’en contentera parce qu’autant Vectors
avait un côté un peu froid et rigide autant Répercussions
lui est bien supérieur. Son enregistrement est bien sûr postérieur à celui de Vectors et les progrès de Robert Hampson
en tant que compositeur et fin assembleur de sons sont gigantesques.
Les travaux du musicien/compositeur sont presque toujours
des commandes – Répercussions a été
composé pour le GRM, Groupe de Recherches Musicales, en 2011 ; De La Terre A La Lune a été commissionné
par le Planétarium de Poitiers – et ont tous été créés et enregistrés au même
endroit, les studios du GRM à la Maison de la Radio à Paris. Et on sent que
Hampson a passé beaucoup de temps dans ce laboratoire, travaillant, peaufinant
et repoussant les limites de son imagination. Ainsi le travail percussif sur Répercussions est époustouflant
d’enchantement et de légèreté multidimensionnelle (même sans le son 5.1) ;
les ondes « magnétiques » et les flux sonores de De La Terre A La Lune relèvent d’une magie sans cesse renouvelée et
on note également un final céleste basé sur des tintements, une sorte de continuité
avec Répercussions. A ce stade du
disque on pense que le musicien a réussi à s’extraire des carcans stylistique
propre à la musique acousmatique et qui le retenaient encore trop étroitement
sur ses précédents enregistrements.
Or la véritable surprise vient avec Antarctica Ends Here (doté d’un titre
sans doute volontairement à double sens) : on peut clairement identifier
les premiers sons utilisés par Robert Hampson, ce sont des sons qui sont habituellement
associés au Pôle Sud et à l’imagerie des grands froids et des déserts de glace (vent,
cliquetis – encore – d’un attelage de traineau, etc.) or le musicien y adjoint
des cordes (ou des sons en glissé persistant) et quelques notes de piano qui
donnent un côté extrêmement poignant voire nostalgique à l’ensemble – du coup
on penche définitivement pour que la traduction d’Antarctica Ends Here signifie en réalité quelque chose comme
« c’est la fin de l’Antarctique » ou « s’en est finit de
l’Antarctique ». On entend trop peu souvent des compositions réussissant
le mariage de sons collectés – et identifiables – avec des sons composés et/ou
interprétés. Sans doute le passé d’instrumentiste de Robert Hampson lui
permet-il de joindre sans artificialité ces deux techniques/points de vue. Antarctica Ends Here semblera sans doute
un peu simpliste aux ayatollahs de la musique concrète et acousmatique mais il
s’agit sans nul doute d’un moment de grâce dont la brièveté (moins de dix
minutes) renforce encore le caractère surnaturel et émotionnel.