La grande escroquerie du rock’n’roll : vendre
plusieurs fois le même disque aux mêmes personnes. C’est facile, il suffit de
rééditer le disque en question avec des titres en plus (et des titres en moins
en prévision de la prochaine réédition), de changer un peu l’emballage, de
rafraichir l’artwork, d’attendre le bon moment (le trentième-cinquième
anniversaire de la première parution du disque, par exemple, ça en jette
toujours un peu) et de surfer sur la vague du revival.
C’est donc au tour de Never Mind The Bollocks Here’s The SexPistols de faire l’objet d’une réédition/énième mise en bière avec d’un
côté une édition double CD « deluxe » et de l’autre un coffret
(carrément) de trois CDs et d’un DVD. On a donc droit à « the original
album remastered from the original master tapes », aux faces B des singles
(et surtout à un énorme No Fun repris
des Stooges et qui originellement collait au train du 7’ Pretty Vacant), à des versions alternatives avec pistes de chant pas
pareilles mais que personne ne peut s’en rendre compte, aux versions démos (déjà
piratées sur Spunk, un disque qui
lui-même a été réédité maintes et maintes fois, y compris très officiellement
par Castle records) et à du live. Vas-y, fais chauffer la cébé parce que la
version 2CD (l’album + les b-sides + le live) est vendue aux alentours de 13
£ivres Sterling – 17 €uros) alors que la
version 3CD + DVD (donc la totale + un bouquin + des fac-similés comme à
l’époque) coûte elle environ £60 (100 € tout rond, tête de con).
Alors, est-ce qu’on s’en bat les couilles ?
Oui. Non. A chaque réédition de Never
Mind The Bollocks c’est toujours un peu la même histoire, il y a toujours
des grincheux qui la ramènent pour dire que déjà en 1977 ils n’aimaient pas les
Sex Pistols, qu’ils trouvaient le groupe un peu mou, pas assez rapide (surtout
comparé aux Ramones et aux Damned), pas assez rock’n’roll (comparé aux
Heartbreakers de Johnny Thunders) ou pas assez glamour (comparé aux
social-traitres de Clash). Mais ces gens ont tort : qu’ils (ré)écoutent un
peu les démos – avec un son plus sec que les versions albums – et les titres
live, même si le son de ceux-ci est un peu shiteux (par contre je connais
plein de groupes de garage parisiens mes couilles qui donneraient n’importe
quoi pour sonner en studio comme ces enregistrements en concert) et qu’ils
réécoutent surtout cet album dans sa version normale : c’est un pur
monument de hargne et de crasse.
La légende, à la fois fabriquée mais
définitivement méritée, des Sex Pistols est ainsi toujours aussi vivace. Pour
un groupe qui n’aura publié qu’un seul demi-disque de son vivant, l’exploit est
quand même de taille… Un seul disque, oui, mais quel disque ! Que des
chef-d’œuvres du rock’n’roll – car musicalement les Sex Pistols n’avaient vraiment
rien d’une révolution – et des compositions dont tout le monde se souvient
encore aujourd’hui, y compris celles et ceux qui n’étaient pas encore né(e)s en
1976/1977 : Holidays In The Sun,
E.M.I., Pretty Vacant, Liar, God The Queen, Anarchy In The UK, Seventeen, Bodies (ma préférée), Submission, Problems, No Feelings, …
tout les titres de Never Mind The
Bollocks, il y en a douze, sont des incontournables (à l’exception de New-York que je n’ai jamais vraiment
aimé, et encore). On rajoutera que cette version remasterisée met davantage en
avant la basse (écoutez un peu comme elle sonne sur Liars ou Seventeen),
résolvant ainsi l’une des fausses énigmes les plus célèbres de l’histoire du
rock’n’roll : oui Steve Jones s’était bien occupé d’enregistrer les
parties de basse puisque Glen Matlock avait déjà été viré du groupe – il joue
quand même sur Anarchy In The UK – et
que Sid Vicious n’était pas vraiment opérationnel et on se demande encore
pourquoi on a attendu autant de temps pour entendre enfin un mix où la basse
est à sa juste place, donc audible.
I’m A Lazy Sod ? Oui, assurément.