Cela ne sert à rien de s’acharner… Peut-être que
cette chronique de Push The Sky Away,
quinzième album studio officiel de NICK CAVE & THE BAD SEEDS va rapidement s’avérer inutile et sans surprise – en
résumé : cet album est terriblement mauvais – mais surtout cette chronique
a pour sujet de préoccupation un album qui lui-même n’en est pas moins inutile
et sans surprise. On a pourtant voulu l’écouter, s’acharner donc, parce que
Nick Cave faisait partie de ces gens importants musicalement et nous a
accompagnés pendant de nombreuses années.
Successeur
de l’affreux Dig !!! Lazarus, Dig !!!, Push
The Sky Away est un énième album de ballades d’un chanteur qui aime
raconter des histoires dont on se fout complètement – exemple avec Jubilee Street : « On Jubilee
street there was a girl named Bee/She had a history, but no past/When they shut
her down the Russians moved in/Now I am too scared to even walk on past […] ».
On pourrait peut-être apprécier le style que Nick Cave défend désormais depuis
de nombreuses années (et on l’a fait : l’album The Boatman’s Call en 1997 est dans le genre un album réussi des
Bad Seeds) mais sur Push The Sky Away
on constate deux choses ; d’une manière générale le songwriting de Nick
Cave est ici d’une pauvreté absolue et encore jamais atteinte, voire
indigente : faiblesse des lignes de chant, mélodies à la petite semaine,
couleurs insipides et redites d’anciens morceaux à profusion ;
deuxièmement les arrangements de Warren Ellis (aux manettes depuis le départ de
Mick Harvey) sont tout simplement impossibles : de la flûte sur un We No Who U R à mourir de rire, du
violon à pleurer de partout, des chœurs comme s’il en pleuvait et tout un
assortiment de coquetteries définitivement ridicules.
Que Nick Cave se soit accoquiné avec Warren Ellis
– piètre arrangeur s’il en est et également leader des hippies de Dirty Three –
est même le principal problème du crooner australien (on se souvient des
deux albums calamiteux de Grinderman, sorte de faux groupe bruyant n’arrivant à
effrayer que les petits garçons ; n’oublions pas non plus les trop
nombreuses bandes originales de film sans aucun intérêt) et on ne peut même pas
reprocher à Cave de capitaliser sur son
passé, passé mythique pour les uns ou dangereusement éprouvant pour les autres,
puisque son passé n’existe apparemment plus pour lui. La seule explication aux
louanges habituelles rencontrées par Nick Cave en général et par Push The Sky Away en particulier
s’explique sûrement par le fait que le chanteur vieillit en même temps que son
public (et inversement : on appelle ça le syndrome Télérama/Inrockuptibles).
Au milieu de cet étalage de musique de vieux pépère
on trouve néanmoins un Water’s Edge (mais
complètement foutu en l’air par un final ridicule) et un Higgs Boson Blues qui illuminent presque Push The Sky Away d’une lueur plus vivace et d’une tension qui fait
défaut à tout le reste de l’album. C’est bien peu. Rendez-vous
est pris pour dans trois ou quatre ans pour parler du seizième album de Nick
Cave & The Bad Seeds parce que l’espoir fait vivre ; mais rien ne
saura remplacer les quatre premiers albums des Bad Seeds (From Her To Eternity, The Firstborn Is Dead, Kicking Against The Pricks et Your Funeral… My Trial) et certains des albums suivant immédiatement après
(l’acclamé Tender Prey
et les inégaux The Good Son
et Henry’s Dream).
[pour Push
The Sky Away Nick Cave a semble-t-il quitté Mute. L’album a été publié par
Bad Seeds Ltd et existe en quatre versions différentes : coffret, version
deluxe, version simple et version vinyle LP + 7’]