samedi 4 décembre 2010

The Conformists / None Hundred























J’avais cru faire mon gros malin en feignant de croire que le troisième album de The Conformists allait s’appeler Four Hundred. Bien mal m’en a pris : je ne vous raconte même pas le nombre de courriers de lecteurs profondément indignés que j’ai reçus à la suite de cette malheureuse voire malencontreuse tentative de désinformation notoire – pire que si le rédac chef de Noise mag s’était mis à chier voluptueusement sur Mike Patton et Faith No More dans son journal chéri. Jamais plus je ne recommencerai et je reconnais que question propagande je suis très loin d’avoir l’étoffe d’un Goebbels ou d’un Hu Jintao. Tout est de ma faute.
De plus The Conformists ont procédé avec les titres de leurs albums à une entourloupe comme seuls eux en ont le secret : le premier s’intitulait Two Hundred, le deuxième Three Hundred, et le petit nouveau, le troisième donc, None Hundred. Une façon de compter et une logique qui n’est vraiment pas pour me déplaire, on ne sait jamais où en sont The Conformists mais eux le savent parfaitement. C’est cette logique que l’on retrouve sur un titre tel que Swim Home, exactement le genre de composition pour laquelle on comprend que le mot structure n’a strictement pas la même signification pour le groupe et pour l’auditeur : aux alentours de la troisième minute la musique se met à avoir le hoquet, on peut même dire qu’elle saute littéralement et s’il n’y avait ces petits décalages microscopiques qui font toujours plus glisser Swim Home vers l’absurde on resterait persuadé que le CD (ou le mp3) a un problème de lecture ou d’encodage. Lorsqu’on écoute Swim Home comme l’intégralité de None Hundred sur vinyle l’illusion devient absolument parfaite – None Hundred est un disque qui vous fera lever plusieurs fois de suite de votre fauteuil uniquement pour vérifier que le microsillon n’est pas complètement bousillé et ce sera alors peine perdue : vous vous serez levé pour rien du tout.
De l’absurde, du décalage, de l’incompréhensible, de l’éclat, des bribes, des faux départs, des arrivées manquées, des pauses inconfortables, des sièges éjectables, des lits de clous, des escalators à l’envers il n’y a que ça sur None Hundred mais n’allez pas croire que ce disque est insupportable, vain, stérile, prétentieux et abscond : None Hundred est même tout le contraire d’un disque arty alors que logiquement il devrait l’être (mais on a déjà dit que la logique et The Conformists ça faisait au minimum un multiple de la racine carré de 666 – il est là, le diable en musique, et pas ailleurs). Certains titres sont même d’une efficacité redoutable (Jesus Was A Shitty Carpenter, Times Beach ou Quality) et donnent également du fil à retordre question tension et électricité. Sur Quality justement on s’affole sur la guitare qui dissone de plus en plus avant qu’intervienne un break qui casse tout et débouche sur une voie de garage encore une fois en trompe-l’oreille, d’une élasticité caoutchouteuse qui vous rebondit à la gueule. Et pendant ce temps là le chanteur en profite pour piailler, aussi concerné qu’il peut paraitre à côté de la plaque. En fait je crois que dans le groupe il n’y en a pas un pour rattraper l’autre lorsqu’il s’agit de foutre le bordel. Pro Gear, Pro Attitude vient conclure un album qui décidemment ne triche pas alors qu’il adore jouer sur les faux-semblants. Cela promet de belles prestations en concert et cela tombe bien, The Conformists seront en France aux alentours de la fin avril/début mai avec un passage obligé à Lyon lors du festival Africantape (mais on en reparle très très bientôt, c’est promis).

None Hundred a été publié sous la forme magique d’un LP (accompagné d’un CD) par deux labels qui se sont partagé le marché comme d’autres se partagent le monde : Sickroom s’occupe de l’Amérique, de la zone pacifique et de l’Océanie tandis que Africantape a décidé d’envahir l’Europe, l’Asie occidentale, le Moyen Orient et l’Afrique avec ce disque. Préparez-vous à souffrir de bonheur.