vendredi 1 octobre 2010

Witt / Whip & There's Blood




















Il va sûrement falloir que je m’y fasse : de plus en plus de musiques ne sont disponibles qu’en format numérique, ce truc tout compressé qui malheureusement déforme le son. Quand on est de la vieille école, recevoir des codes pour télécharger l’album d’un groupe que l’on ne connait pas est guère motivant. Au mieux on télécharge le fichier, on le balance direct dans un dossier intitulé à écouter plus tard si possible et on l’oublie aussitôt. C’est exactement ce qui est arrivé à Witt et aux deux disques de ce groupe arrivés en même temps au début de l’été dans la machine à bordel musique. Hop : directement en bas de la liste, coincés à la lettre W entre Witch Hats et Woman. Quel destin tragique. L’album, intitulé Whip, date de 2009. There’s Blood, un EP, est lui une nouveauté de 2010. Mais il semblerait que Witt voit tellement les choses en petit – tirage de l’album = 100 exemplaires ! – que l’un comme l’autre semblent déjà épuisés. Donc on se contente de mp3 en attendant un éventuel retirage (prévu parait-il) de ces deux disques. C’est l’annonce d’une tournée européenne de Witt entre la fin du mois de décembre 2010 et début janvier 2011 qui a rallumé la mèche.




















Un peu plus de curiosité et de temps m’auraient certainement permis d’écouter plus tôt ce trio instrumental originaire de San Diego/Californie. Ces deux disques (18 titres pour Whip et 8 pour There’s Blood, dont trois nouvelles versions de titres de l’album et une inutile parodie de « fusion » 90’s à la fin) ravivent une énième fois en moi la fièvre math rock. Laquelle me donne de moins en moins de boutons… Une rechute sans avertissement. Il faut préciser quand même que les trois membres de Witt (un guitariste, un bassiste et un batteur – la routine quoi), bien que parfaitement inconnus, ne sont pas n’importe qui. Et loin de là : ces trois types – sont-ce vraiment des gamins comme je me le suis laissé dire ? – jouent leur truc et maitrisent leurs instruments comme des dieux. En toute simplicité. Et puis math rock, la musique de Witt ne l’est pas vraiment non plus. On ne parlera pas non plus de post rock parce qu’on a pas le temps de s’ennuyer ni de compter les minutes qui nous séparent de la fin des deux disques (ce qui est la parfaite définition d’une écoute passive des derniers albums de Tortoise ou de tous ceux de Mogwai, Mono et autre Silver Mount Zion, autant de groupes que l’on qualifie tous de post rock alors qu’ils n’ont rien en commun si ce n’est cette aptitude jamais démentie à faire sombrer l’auditeur dans le plus profond des sommeils).
On décèle ici une certaine nonchalance (genre les doigts dans le nez) et en même temps une élasticité et une souplesse (je n’ose appeler ça du groove mais il y a de l’idée) qui font passer la pilule de l’instru rock arrogant alors que généralement c’est un genre qui arrive tout juste à n’être que mollement turgescent ou qui cache son caractère inepte sous un verni progressif qui ne l’est pas moins. Donc, quitte à choisir, Witt a décidé de ne pas bander mou en 3D mais de bander petit et juste. La musique du trio est claire et limpide, immédiate et rafraichissante. Quitte à choisir encore, There’s Blood remportera davantage de suffrages que Whip d’abord parce que tout y est plus enlevé mais surtout pour la simple et bonne raison que quelques incartades chantées y font leur apparition. De ce chant maladroit et à côté de la plaque, lorsque il s’agit uniquement de se faire plaisir et de voir ce qu’il se passe (ou pas). Alors oui, plus j’écoute la musique de Witt et plus j’y décèle une douceur et une ambivalence, quelque chose qui a à voir avec de la poésie. Pourtant c’est bien de musique dont on parle. Et donc à découvrir d’ici quelques mois en concert.