mercredi 11 février 2009

Stephen O'Malley / Salt
















En matière de doom/drone/machin noise atmosphérique, la grande affaire de 2009 sera le nouvel album de Sunn que Greg Anderson et Stephen O’Malley sont en train de nous enregistrer avec leurs potes habituels (Attila Csihar, Oren Ambarchi). Petit détracteur de ce groupe très en vue, même si tu n’as plus qu’une seule main pour compter tu sauras que Sunn a déjà cinq albums à son actif et que le nouveau né sera à la fois le sixième et le moignon dont tu te sers d’ordinaire pour t’aider à vomir dès que tu penses à Stephen O’Malley et Greg Anderson. Si au contraire tu es un adorateur de Sunn et que tu te fais greffer les Grimmrobe Demos et Altar, l’album en commun avec Boris, tu sais que cela fera le huitième. Celui-ci devrait s’appeler Dimensions, un titre détestable dont on est en droit d’espérer qu’il ne cache pas un (in)opportun revirement progressif de la musique du groupe. On peut en effet tout imaginer avec Sunn -ses détestateurs (nombreux) affirment également que la seul chose que l’on ne pourra pas imaginer c’est l’ennui que le groupe va inévitablement procurer- donc on pourrait craindre une option musicale aussi catastrophique, Stephen O’Malley et Greg Anderson ayant déjà annoncé que Dimensions serait différent de tous leurs autres enregistrements. Les effets habituels d’une communication pre album. Comme je suis un fan de ces deux là, je suis prêt éventuellement à tout leur pardonner, sauf un putain de virage prog.
Près de trois années auront donc séparé Altar et Dimensions. Et pourtant les membres de Sunn n’ont pas chômé. Exemple en 2008 -et foutage de gueule il faut bien le dire- des activités annexes de O’Malley, Salt, un CD publié par Ideal recordings. Avec son emballage cartonné reprenant le format des productions Mego et l’illustration digne de la déco intérieure des sanitaires d’un train à grande vitesse, Salt ne trompe pas sur la marchandise : les soixante quinze minutes de ce CD sont la bande son de Bleed, une installation du plasticien Banks Violette (pour le LP Oracle de Sunn c’était déjà exactement la même chose). C’est quoi la bande son d’une installation d’art contemporain exactement ? En l’occurrence il s’agit ici d’un environnement sonore construit autour d’ondes sinusoïdales. Aucune variation, aucun changement, aucune évolution du truc. Exactement la même chose que la célèbre Dream House de La Monte Young et Marian Zazeela où pour échapper -ou les susciter, c’est selon- aux mirages sonores des ondes diffusées en continu il fallait déambuler dans la pièce ou bouger la tête à la vitesse de son choix : on entendait alors des variations sonores aussi fugitives que personnelles. Tout cela ne fonctionnait que grâce à une diffusion multisources de la matière sonore en question. Autant dire qu’écouter le travail de O’Malley sur Salt à l’aide de deux pauvres enceintes et d’un ampli stéréo ne procure absolument pas les mêmes effets. Soixante quinze minutes plus tard on en est encore à se demander quel est l’intérêt d’un tel disque -en restant une demi journée complète, le nez au vent, immobile dans la position du lotus sous une ligne à très haute tension d’EDF on aurait obtenu exactement le même résultat. Salt est le premier disque du monde dont le contenu s’apparente à un acouphène confortable comme un futon japonais. Bonne sieste.