mercredi 21 décembre 2011

Full Blast & Friends / Sketches And Ballads


On avait laissé Full Blast – c'est-à-dire le trio composé de Peter Brötzmann, Marino Pliakas et Michael Wertmüller – sur deux albums studio : un premier disque sans titre remettant d’actualité le free jazz 60’s/70’s le plus débridé tout en lui insufflant une bonne dose de blasts et un deuxième, Black Hole, malheureusement moins bon car souffrant d’une production et d’une qualité d’enregistrement trop lisses pour rendre réellement justice à la furie initiale du trio. Full Blast est revenu en force en 2010 grâce à Crumbling Brain, un LP publié par Okka Disk et enregistré en concert. Crumbling Brain possède également cette autre particularité d’accueillir des invités – de fait cet album a été publié sous le nom de Full Blast & Friends – dont quelques noms prestigieux, on se souvient notamment du solo de guitare électrique complètement dément que Keiji Haino a placé sur Pull Up ! Pull Up ! Terrain ! Terrain !
Avec Sketches And Ballads – publié par Trost records – Full Blast est à nouveau de retour avec des invités et à nouveau pour un enregistrement en concert. Les friends du jour se nomment en l’occurrence Ken Vandermark au baryton et à la clarinette, Thomas Heberer à la trompette et Dirk Rothbrust aux percussions. Si on connait très bien le premier, on peut préciser que le deuxième joue avec l’ICP et que le troisième joue ou a joué sur nombre d’enregistrements de musique contemporaine (des compositions d’Helmut Lachenmann par exemple).



La principale nouveauté de Sketches And Ballads se situe pourtant ailleurs : cet enregistrement comporte une composition unique signée du seul Mickael Wertmüller. Et cela s’entend. Sketches And Ballads démarre en effet sur une courte intro/pilonnage à la batterie, Wertmüller y démontre toute sa capacité à enchainer les explosions, roulements de caisse claire et de toms, et il maîtrise toujours aussi parfaitement la technique de la double pédale, comme au bon vieux temps d’Alboth!. Il en profite ainsi pour en mettre un peu de partout dès que l’occasion lui en est donnée. C’est ce qui rend Sketches And Ballads aussi binaire, alternance de moments furieux drivés par une batterie de malade et passages très calmes et quasiment inévitables pendant lesquels presque chaque musicien place son solo – celui de Thomas Heberer à la trompette à la 18ème minute est vraiment magnifique.
L’exposition des différents « thèmes » révèle en début de disque un travail assez fin en matière de composition et d’arrangements, avec des dialogues intéressants entre les musiciens, mais cela ne dure pas vraiment : les passages collectifs prennent le dessus, virent régulièrement à la démence, plusieurs solistes en même temps, dans la droite lignée de ce que Brotzmann a quasiment toujours fait ou du Global Unity Orchestra d’Alexander Von Schlippenbach. L’effort de composition est donc rattrapé par le free, le free est boosté par le jeu de Wertmüller et en conséquence on obtient une pièce de 36 minutes entre sophistication appuyée et sauvagerie débridée.