jeudi 22 décembre 2011

Biosphere / N-Plants





Sans compter les disques de remixes/réinterprétations ou les bandes originales de films, N-Plants est le neuvième enregistrement de Geir Jenssen sous l’alias de Biosphere. C’est malheureusement aussi le plus décevant de tous.
On peut être totalement insensible à l’esthétique molle de cette musique électronique œuvrant principalement – mais pas que – dans le domaine de l’ambient et ne s’interdisant aucune référence au monde de l’eau froide, des icebergs et des cercles polaires sans oublier quelques relents écolos bon teint voire même new-age. Mais on peut également reconnaitre à Geir Jenssen/Biosphere un sens très poussé dans cette esthétique sonore qu’il a principalement créée – on pourrait parler aussi de Thomas Koner mais si les influences des deux hommes peuvent être assez similaires, les résultats obtenus sont vraiment très différents.
Il n’est donc pas très étonnant que Biosphere ait atterri chez Touch, label spécialisé en musiques électroniques expérimentales mais pas trop, du moins pas suffisamment pour faire peur ou même déranger. En matière de techno intelligente, d’electro à bulles, de vaporisations glacées, de trips sous LSD au pays de Nanouk l’Esquimau ou de déambulation au milieu de forêts sombres et humides, on préfèrera finalement quelqu’un comme Wolfgang Voigt/Gas et ce pour deux raisons essentielles et indiscutables : premièrement la musique de Gas n’a jamais eu aucun scrupule à donner envie de danser à l’auditeur ; deuxièmement Biosphère finit par tourner rapidement en rond et s’auto-contempler – objection votre honneur : l’auto-contemplation et l’enfermement ombilical sont les deux caractéristiques essentielles des musiques électroniques dites évoluées. Oui, bon… si on veut, objection retenue. Mais on n’enlèvera pas de l’esprit de l’accusation que Biosphere est ce que l’on appelle poliment un second couteau, un second couteau avec un petit talent et que l’on aime certes retrouver au fil d’albums éparpillés sur déjà 20 années.
N-Plants a une thématique assez différente dans la discographie de Biosphere. « N » comme « nuclear » et « plants » comme ces végétaux ou algues parasites et friands de radioactivité qui poussent à proximité des centrales nucléaires : Geir Jenssen s’est ainsi interrogé au sujet des nombreux sites qui au Japon bordent les côtes, à la merci des raz-de-marée ou qui sont situés sur des zones à activité sismique intense. Le truc c’est que ces questions, notre homme se les est posé avant le séisme du 17 mars 2011 et la destruction de Fukushima, jouant en quelque sorte les cassandres, prédisant un avenir sombre et catastrophique. L’album a été achevé en février 2011 et c’est pour cette raison que l’on épargnera relativement N-Plants, pour cette lucidité. Mais celle-ci n’a rien à voir avec le fait de faire de la musique. Et dans le cas d’un titre tel que Monju-1 – à peine plus évolué qu’un tube interplanétaire de Deep Forrest – la pilule reste difficile à avaler. Sur N-Plants Biosphere fait en effet trop souvent preuve d’une incroyable légèreté musicale, se laissant rattraper par la joliesse de chouettes petites mélopées interprétées avec des sons de synthétiseur à la limite de l’affreux. La musique d’ascenseur n’est pas très loin, un ascenseur peut-être plein de bonnes intentions mais un ascenseur quand même. Plus dure sera la chute.