samedi 22 novembre 2008

Neptune vs Reality























Deuxième concert de la semaine -non, que l’on se rassure, je ne vais pas ressortir mon éternel couplet sur le mauvais père de famille qui abandonne une fois de plus progéniture et cogénitrice à leur quotidien morne et plat, le mien n’est pas mieux de quotidien et j’ai décidé une fois de plus d’aller à l’essentiel pour que cela s’améliore fugitivement, on verra demain pour le reste. Tu voix la couleur des flyers torchés par les gars du Sonic depuis la rentrée de septembre ? Ce truc couleur caca d’oie/vomi de chien végétarien/cervelle de zombi écrasée ? Je suis à peu près dans le même état, le glamour de la lose en plus.
Deuxième concert donc et pas des moindres avec Neptune, le trio art punk (chouette étiquette, non ?) qui nous revient après ce qui est il faut bien le dire son meilleur album -un album publié sur Radium/Table Of The Elements, mon label de snobs favori. Il y a une première partie aussi, bien évidemment, un objet sonore intitulé 202. Project et dont je n’ai jamais rien entendu. J’arrive donc à l’heure, je ne fais pas partie des hipsters qui traînent dans les bars ou devant la double glace de leur armoire Conforama pour arriver suffisamment en retard à un concert et ne voir que la tête d’affiche. Bordel, que je hais cette expression, tête d’affiche.
Une fois de plus, sans manger la grenouille, le Sonic ne va pas réellement faire le plein, c’est à la fois désespérant pour eux (il est de plus en plus question que ce lieu ferme définitivement ses portes dans quelques semaines, maximum quelques mois) et c’est désespérant pour un groupe comme Neptune, moins de personnes venues les voir que lors de la fois précédente alors que leur disque le plus récent est d’un tel niveau…























202. Project. Comme d’habitude j’ai eu tort. J’aurais mieux fait d’arriver en retard moi aussi et de me bourrer la gueule ailleurs dès le début de la soirée pour torde le cou à ce foutu principe de réalité. Mais reprenons depuis le début. Je débarque au Sonic, l’un des Neptune est en train d’essayer de dormir sur la banquette tandis que devant la scène 202. Project finit ses balances. J’apprends que le type en question (202. Project est un one man band) vient de St Etienne et qu’il a un temps participé à Tamagawa (mais il ne faut pas le dire trop fort, paraîtrait il que maintenant ils sont très très fâchés), ce qui se laisse deviner sur les quelques bribes de musique que j’entends alors. Un ordinateur portable, un clavier, une guitare, quelques boites à effet, un micro, le tout est posé sur une petite table, ce sera un concert assis. J’allais oublier le gyrophare qui entre en action dès le début du concert et qui me nique les yeux, ce même gyrophare dont s’était servi Tamagawa lors d’un concert au même endroit -je reconnais enfin notre homme que j’ai donc déjà vu jouer avec cet autre groupe dont il ne fait plus partie. 
Autant j’aime Tamagawa, autant 202. Project est ennuyeux. Gratouillis indigents à la guitare, chant de pleureur passe partout, boite à rythmes ultra cheap qui fait des boom-tchics horripilants et surtout des sons de synthés ignobles et baveux, des sons de synthés comme s’il en pleuvait (normal lorsque on est stéphanois me direz vous) mais moi je préfère la guitare, je suis venu pour entendre de la guitare, pas pour me taper un énième geignard qui se prend pour un génie. Je bouille d’indignation et je vais éteindre la rage qui me consume au bar où je retrouve quelques hipsters -qu’est ce que je disais- de ma connaissance qui viennent enfin d’arriver. Fin de (première) partie.
























Neptune ce sera carrément autre chose. Cela fait plaisir de retrouver le bordel insensé dont le groupe se sert pour sa musique : les fameuses guitares en metal, les générateurs de son bidouillés avec des interrupteurs électriques volés dans le vieil appartement de tes grands-parents, des pianos à pouces amplifiés, le seul instrument qui conserve une forme classique reste la batterie. Et encore.
Je garde finalement une idée assez floue du précédent passage de Neptune à Lyon : mes quelques souvenirs concernent un groupe très bruitiste et presque indus par moments, avec des guitares évidemment mais surtout avec un sens du fracas perpétuel. Le côté mélodieux et harmonique du groupe (celui qui se respire tellement fort sur disques) m’était un peu passé au dessus de la tête. Je doit être un garçon beaucoup trop facilement impressionnable. Ou peut être que je suis tout simplement un gros naïf. La candeur de l’amateur. 

Hormis un début de concert plein de percussions, de bidouillages de boites à boutons magiques et de piano à pouces traficoté, la prestation de Neptune a été résolument rock (oui) et noise (encore oui : dans le sens des premiers Sonic Youth mais avec un vrai sens mélodique) à l’image du dernier album, Gong Lake, qui rappelons le une fois de plus le comporte son lot de pépites et de hits incandescents.


















Ce qui m’a marqué également, c’est à quel point le batteur est droit. Et complètement fou. Ce qui n’est absolument pas incompatible. C’est une lapalissade que d’affirmer qu’un bon groupe de rock c’est d’abord un bon batteur (merde alors, on se croirait dans Guitare & Claviers) et celui de Neptune est l’épine dorsale du groupe sans aucun doute possible. Enlevez ce type et le trio ne sera qu’un pourvoyeur de chaos aux formes aléatoires -ce qui au passage ne signifie pas qu’il en deviendrait mauvais pour autant. La puissance de Neptune, son assise mélodique, tout cela est rendu possible grâce à lui, faut toujours se méfier des garçons un peu rondouillards, en général ils cachent bien leur jeu.
Je n’avais jamais fait attention non plus à quel point le chanteur/guitariste aux cheveux grisonnants (celui qui était allongé à mon arrivée) avait l’air triste lorsqu’il chante, presque ailleurs. En opposition complète avec l’autre guitariste/percussionniste/chanteur/bidouilleur qui lui s’agite comme un mongolien et qui rigole tout seul pour des raisons complètement inconnues de tous. C’est comme si on assistait à une représentation d’un spectacle de clowns -le blanc à gauche et le rouge à droite. 

Neptune en rajoute avec des titres ouvertement noise rock aux accroches presque irrésistibles, deux guitares en piqué et une batterie qui taille la route en défonçant systématiquement les bas-côtés. Le trio s’arrête, chacun décroche son instrument (ces foutus guitares en métal doivent peser des tonnes) mais devant les réclamations d’une partie du public, le clown rouge demande au homeboy du Sonic qui ce soir assure le son s’ils peuvent encore jouer deux autres titres. La réponse étant affirmative, Neptune lâche les gaz avec le titre le plus ouvertement rock -et speed- de la soirée, on croirait presque entendre une reprise d’un vieux truc obscur (peut être que oui, après tout). Le groupe retrouve un second souffle et ce sera la seule fois où le guitariste/clown blanc sortira de sa réserve tristounette et fera même une grimace indéchiffrable, comme rattrapé par une quelconque réalité. A moins qu’il n’ait justement réussi à lui échapper. Va savoir.