Je crois que la première fois que j’ai assisté à un concert de One Second Riot, j’ai franchement détesté le duo lyonnais. Un vieil ami également présent ce soir là et qui avait déjà vu et entendu nos deux trublions m’avait lancé un ah non pas encore eux dont je m’étais confortablement emparé pour justifier une indifférence de principe et un rejet qualitatif certain. On peut faire confiance à un ami surtout lorsque vous avez quelques points communs (une calvitie naissante, un coussin abdominal gonflé à la bière, des lunettes, une fâcheuse tendance à vous habiller en noir et éventuellement quelques goûts musicaux) mais, dès qu’il est question de musique, d’un groupe, mieux vaut faire confiance à ce qu’il vous reste d’oreille et de jugement, quoi que pour le jugement, haha, non rien.
Je crois donc que la deuxième fois que j’ai assisté à un concert de One Second Riot, je n’ai pas aimé non plus, pas assez en place. Et puis c’est toujours un peu chiant d’avoir à se dévisser le cou alors que l’on a mal au dos pour arriver à voir un groupe qui a décidé de jouer par terre. Surtout que j’ai souvent des difficultés à comprendre cette manie de jouer devant la scène pour des raisons stylistiques (ouah trop fort ils font comme Lightning Bolt) ou des raisons éthiques (tu comprends mec comme ça on est au même niveau que notre public, on est tous pareil) alors qu’en fait pas du tout (toi tu joues et moi je regarde) et qu’à la vérité la plupart du temps c’est surtout beaucoup plus pratique pour les changements de plateau, ce qui était bel et bien le cas ici.
C’est en écoutant les deux premiers disques de One Second Riot que j’ai réellement commencer à m’intéresser à la musique du groupe, je récapitule : un premier maxi partagé avec les bostoniens de Neptune et un second 25 centimètres en collocation avec les clermontois de Sofy Major, deux disques non exempts de défauts mais le mal était fait. La maturation étant une chose plutôt lente chez tout un chacun -surtout lorsque on ne fait rien pour ça, pour ma part il y a quelques domaines pour lesquels je tiens absolument à rester immature- j’ai fait mon petit bonhomme de chemin avec cette musique là tandis que One Second Riot devenait de plus en plus aguerri sur scène, je ne doute pas par contre que les deux ont du bosser dur pour y arriver. Les prestations en concerts suivantes de One Second Riot ont logiquement été des plus convaincantes (avec une mention spéciale à celle donnée lors de la release party du Born Again d’Overmars).
Le premier album du groupe est donc là, c’est Music Fear Satan qui s’en est occupé. Dessus on retrouve neuf titres (dont deux déjà présents sur les disques précédents mais ayant été réengistrés pour l’occasion), neuf titres variés -du tendu, du sec et du nerveux comme du plus profond et du plus atmosphérique, tel l’énigmatique Brautigan, un titre qui me fait passer dans un nombre d’états incalculables allant de l’agacement à la contemplation (et inversement), à croire que la frontière entre emphase et extase est plus fine qu’on ne le croit. Je n’arrive toujours pas à me décider sur ce titre mais c’est bien le seul.
One Second Riot délaisse complètement les schémas du duo basse/batterie (ou guitare/batterie) classique, celui qui brasse le math core avec autant d’élégance qu’un houblonneur alsacien ou sculpte le chaos comme un tailleur de pierre creusois, pour ériger une musique fine, racée, mélodique mais également non dénuée d’une certaine puissance de feu et parsemé d’un sentiment d’étrangeté, voire de mélancolie. Pas de contemplation dans la musique de One Second Riot, mais un mélange réussi de rage salutaire et de franche élégance, parsemé de quelques vraies chansons, autant de véritable hits en puissance. Un excellent premier album.
[Et ce soir, mercredi 1er octobre, One Second Riot jouera au Sonic de Lyon avec les progueux post crimsoniens britanniques de Guapo, qu’on se dise. Une mini tournée en compagnie des lyonnais Kiruna est également prévue à la fin du mois, qu’on se le dise aussi.]