Vous n’êtes vraiment pas obligés de croire tout ce que l’on vous raconte. La preuve, moi je vais dire exactement le contraire en ce qui concerne cet énième objet sonore produit par les désormais regrettés Yellow Swans. Et oui, Pete Swanson et Gabriel Mindel Saloman auraient décidé de continuer à faire de la musique séparément, Deterioration serait donc un disque posthume. Cela me plait de mettre le conditionnel parce qu’à part une news publiée par Pitchfork, news que tout le monde a repris en choeur, il n’y a pas vraiment eu d’annonce officielle de ce split. Une mise en parenthèse ? Un ultime album studio serait même prêt, date éventuelle de publication pour début 2009, toujours chez Load records. En attendant, pour aider à faire son deuil de l’un des meilleurs duos dronoise de ces dernières années, on peut largement se précipiter sur Deterioration qui n’est jamais que la réédition CD d’une cassette que le groupe vendait à l’occasion de ses concerts. C’est le label de Mineapolis Modern Radio qui s’est lancé dans cette publication, assez différente de ce que l’on trouve habituellement dans son catalogue (les géniaux Signal To Trust ou les indispensables Stnnng).
Concédons que ce disque n’est pas forcément à la hauteur des autres enregistrements de Yellow Swans -assertion pour le moins présomptueuse lorsqu’on parle d’un groupe qui revendique plus de soixante-dix cassettes/vinyles/CDs : je n’en ai même pas écouté la moitié des trois quarts- mais il a cette particularité de coller assez bien à ce à quoi ressemblait Yellow Swans en concert. Le troisième titre, Burnt Dub, commence par des gratouillis de guitare vite submergés par de lourds effets de bidouilles (Merzbow inside) où surnage une voix lointaine et déréglée. Lorsque j’écoute ça, je me retrouve en plein milieu du Sonic, lorsque nos deux californiens s’étaient particulièrement bien employés -et avec humour- à vriller nos oreilles fatiguées. C’est tout à fait le genre de disque que l’on peut écouter des heures et des heures, il possède un impact proprement physique qui relève de l’abandon.
Mais le titre que je préfère, c’est bien évidemment le premier, l’énorme Broken Eraser/Time Stretch, qui serpente lentement dans l’esprit, ne confond pas lenteur et monotonie d’une pluie d’été, joue l’effondrement lors d’une accalmie pleine de petits bruits dignes d’une rêverie nocturne et offre un final magnifique. Un disque qui malgré son caractère inachevé et brut -on sent très bien par moments que ces deux là ont laissé tourné la bande et que leurs titres n’ont pas réellement de fin- restitue intact toute la poésie des Yellow Swans. Adieu les gars.