lundi 27 octobre 2008

La classe du surfer, la suprématie du branleur et la lâcheté du chroniqueur



















Concert sans prétention samedi soir, sur les trois groupes de programmés je n’en connais à vrai dire qu’un seul, le reste sera de l’ordre de la surprise -bonne ou mauvaise- et c’est très bien comme ça. Concert sans prétention mais sans public non plus, des crétins désoeuvrés comme moi venus exprès et prêts à payer cinq euros je n’en compte pas beaucoup : quelques amis ou même de la famille de l’un des groupes, bonne ambiance de cour de lycée, heureusement qu’on est là parce qu’on est leurs seuls fans, franchement qu’est ce qu’ils feraient sans nous, uh uh uh. Glups.
En ce concerne le premier groupe, X-ray Vision, ces quatre garçons ne doivent vraiment rien à personne. Ils pratiquent un surf punk énergique et bienveillant, qui donne immédiatement envie de se trémousser, de dodeliner comme un abruti, voire même de crier son contentement en applaudissant des deux mains, si si. La rythmique est bien en place et carrée, les deux guitaristes s’amusent avec leurs gammes de garçons de plage hydratés au jus de houblon, il ne manque que les chemises à fleurs, les tongs et le poil aux pattes pour que le tableau soit parfait.
Le power surf fluvial (comprendre : engendré entre Lyon, Vienne et Givors) de X-Ray Vision est communicatif et enlevé, le répertoire du groupe est partagé entre reprises de trucs complètement obscurs -au moins pour moi- et de compositions maison. C’est un parfait début pour un bon concert, limite fièvre du samedi soir et top moumoute, vive la fête. Histoire de marquer le coup le homeboy du Sonic a décidé pour le changement de plateau -et en l’absence de l’un de ses patrons peu porté sur la chose- d’envoyer dans la sono une musique d’adolescents boutonneux dont il a le secret : ce sera Metal Heart d’Accept, un titre dont le solo de guitare/hommage à La Lettre à Elise de ce cher Ludwig Von B. est l’un des sommets plus kitsch tu meurs de toute la discographie des allemands bien que je doive quand même concéder une courte préférence pour Princess Of The Dawn. On ne se refait pas. 
















A ma grande surprise c’est Shub qui enchaîne. Shub, c’est le groupe que je suis venu voir. A peine le temps de faire l’acquisition du nouvel album (qui se présente sous la forme d’un LP + CD sauf que dans la pochette sérigraphiée il n’y a que le vinyl -le groupe n’a pas encore reçu ses CDs, haha bande de losers- alors je donne mes nom et adresse pour qu’ils me l’envoient plus tard par la poste, vous ne m’oubliez pas les gars, hein ?) à peine le temps de faire ses courses donc que les trois nîmois (?) sont installés. Lyon est la première date d’une petite tournée à la configuration géographique plutôt absurde -Lyon/Toulouse/Bordeaux/Angoulème/Amiens/Dijon/Montpellier/Nîmes/St Etienne- oui vous avez bien lu : l’itinéraire tracerait presque une sorte de pentagramme (il faudrait rajouter Limoges, la capitale des culs-terreux, entre Amiens et Dijon), j’y vois comme un signe du destin irréfutable et implacable, ce concert sera bon ou ne sera pas.
On peut faire à Shub le procès de trop coller à l’école noise 90’s de Chicago, de trop lécher le cul de Steve Albini et de manquer totalement d’originalité. Moi je trouve surtout beaucoup d’humour dans la musique du trio, un humour absurde (le véritable premier album du groupe publié en autoprod s’intitulait If You Can't Read Shub, Bad Luck You're Colorblind!), un humour que le groupe retourne principalement contre lui-même, ce qu’il assume très bien. Ça sent la grosse déconnade, le foutage de gueule de haut vol et sans filets.
Sans filets ? Pas si sûr en fait. On a déjà évoqué Shellac à propos du groupe, OK le chanteur/guitariste aime astiquer sa guitare dotée d’un manche en aluminium et porte des lunettes d’albinos, mais les comparaisons doivent s’arrêter là, il y a également une bonne dose de disco post punk chez Shub, un sens du déhanchement bien en place (malgré ses airs d’alcoolique mangeur de viande fraîche le bassiste est tout simplement redoutable), un groove comme l’affectionnaient tant les meilleurs groupes de l’écurie Skingraft, et parfois j’y trouve également une pointe de The Ex.


















Ah bon ? Oui, celle-ci est plus perceptible sur le tout nouveau disque du groupe, The Snake, The Goose & The Ladder qui bien évidemment aura la part belle lors du concert de ce soir, avec en premier lieu le hit déjà incontournable Franky Vincent Goes To Hollywood et son intro balkano-surf, très The Ex donc. Un album plus nerveux, rapide et acéré me semble t-il, quoi que reprenant les mêmes ingrédients que If You Can't Read Shub, Bad Luck You're Colorblind! mais avec encore plus de réussite. Prok’o’Fiev a des bouts de Sergueï dedans (le compositeur, vous connaissez Roméo Et Juliette ?), c’est drôle et vraiment bien foutu, en fait faussement emphatique -il me faut donc rajouter Accept dans la liste déjà longue des références musicales de Shub, Ludwig/Sergueï même combat- avant de s’achever par un passage à la fois chaloupé et nonchalant à faire pâlir de rage n’importe quel rock critic confondant présent du vindicatif et amour du lard (ce dont Shub parle également dans Rockcriticsong, dernier titre de la deuxième face du LP, que malheureusement le groupe ne me semble pas avoir joué ce soir).
Pour revenir au concert, c’est un mélange de dilettantisme juteux et de précision au taquet, encore une fois une très bonne rythmique (le batteur ne tarde pas à tomber les lunettes), au millimètre, anguleuse et pleine de soubresauts, un guitariste/chanteur dans le rôle du nerd charismatique -je me surprends plusieurs fois à regarder ses doigts courir sur le bas de son manche de guitare alors il en extirpe des sons déchirants. Shub annonce un titre du nouvel album, ce sera In The Mudland I Live, le plus énervé du lot et qui donne bien envie de sauter en l’air.






















Alors que tout le monde est chaud, Shub déclare que c’est terminé, le public réclame logiquement une dose supplémentaire ce que le groupe semble enclin à faire, reprenant guitare et basse en main mais les lumières se rallument, le homeboy du Sonic et sa discothèque maléfique reprennent alors du service -pour les amateurs de Hair Metal, un petit Ratt ça ne fera pas de mal… mais il paraît que c’est meilleur avec les images.
Il reste un groupe, ce sera Futur 2000 dont le monospace indique trio rock bossa-nova groovy punk chanson française et c’est exactement ça. Mais je n’en parlerai pas davantage et ce pour une seule et unique raison : la musique du groupe -en dehors de toutes les qualités d’instrumentistes que l’on peut trouver aux trois musiciens- ne me parle absolument pas, est à mille lieues de ce qui m’intrigue ou me fait vibrer. En parler, et donc dans le cas présent en dire du mal, reviendrait pour moi à écrire une chronique sur un disque de chanson française behavioriste ou neurasthénique (ce ne sont que des exemples), ce qui ne m’intéresse en aucune façon. Tu demanderais toi à Philippe Manœuvre de faire un numéro spécial rock français dans Rock’n’Folk avec Death To Pigs, Doppler, Shub, Passe Montagne, Binaire, Marvin, Pneu, One Second Riot, Café Flesh, 37500 Yens, Revok, Ned, Overmars, Moller Plesset ou Papier Tigre ? Aujourd’hui je serai donc lâche de chez lâche. Comme Philou.
J’attends uniquement la fin du concert de Futur 2000 parce que j’ai envie de boire des bières et surtout parce que j’attends la suite de la play-list du homeboy. Judas Priest, Twisted Sister, Def Leppard, Metallica et -seule incursion dans les 90’s- Type O’Negative (My Girlfriend’s Girlfriend), c’était beaucoup mieux qu’à un mariage.