Et puisque on est en plein dans les rééditions, voici celle des trois maxis de Liquid Liquid augmentés de quelques live et inédits, parution sous le titre de Slip In And Out Phenomenon chez Domino cette année. Trois maxis, cela ne fait pas beaucoup dans la vie d’un groupe, même lorsque l’un d'eux a été allégrement samplé/pompé par le Grandmaster Flash pour les besoins de l’un de ses hits parmi les plus populaires (White Lines). Ceci n’est pas la première réédition des oeuvres de Liquid Liquid puisque Grand Royal, le défunt label des Beastie Boys s’en était déjà chargé dans le passé (1997).
Il faut faire fi de tous les groupes de trouducs qui se réclame du quatuor new-yorkais si on ne veut pas en être dégoûté à l’avance. Vous aimez Happy Mondays ? Moi non plus. Vous aimez Rapture ? N’en parlons même pas. Et replongeons nous dans la courte discographie d’un groupe qui est allé à l’essence même d’une musique groove et funk, robotique et rigide. Pas de guitare chez Liquid Liquid, juste une basse qui fait tout le boulot, des percussions à profusion et une voix proche du chant de baleine sous méthadone d’un John Lydon en plein délire Public Image. Et c’est tout. Pas très loin de l’épure sensuelle mais également mécanique des soeurs Scroggins d’E.S.G.
A l’époque où les quatre Liquid Liquid commencent à faire parler d’eux, écumant les clubs new-yorkais, la no wave n’est déjà plus qu’un lointain souvenir ou est en passe de le devenir, la Grosse Pomme semble avoir oublié pour un temps ses racines velvetiennes (Sonic Youth n’a pas encore commencé à casser les pieds et les oreilles de tout le monde) et s’adonne aux joies d’un funk primal et désossé, froid et mutant, dansant et aride. Cela tombe bien car sans le savoir, de nombreux groupes ont découvert en même temps de par le monde les joies du groove implacable. Enfin… de par le monde c’est beaucoup dire : ce que l’on a plus tard appelé le post punk (?) est en marche et l’une de ses composantes les plus vivaces est celle qui incorpore dub et funk -PiL, Gang Of Four, Pop Group, A Certain Ratio et quelques autres (pas toujours inoubliables) forment les rangs de l’anti rock sur fond de slogans révolutionnaires (haha).
Du dub il y en a chez Liquid Liquid (Bellhead) mais surtout il y a du funk -les super hits Optimo et Cavern- le seul funk qu’un petit blanc comme moi arrive à piffrer tellement il ressemble à un tas d’os polis s’entrechoquant entre eux, au claudiquement d’un chien borgne à trois pattes, aux crépitements des amphétamines dans la cervelle. Rien à voir avec la sensualité de James Brown ou la luxuriance de George Clinton. Finalement beaucoup plus accessible et carré que The Pop Group (dont on parlé juste au dessous), Liquid Liquid a pourtant subi le même sort, celui d’un groupe pour connaisseurs aficionados, amateurs de culte mais absolument pas partouzards ni partageurs. Encore une réédition qui va dans le bon sens…