samedi 27 septembre 2008

Fire Room / Broken Music























Décidément ce Paal Nilssen-Love est vraiment partout puisque on le retrouve encore au sein de Fire Room, énième projet du saxophoniste chicagoan Ken Vandermark avec également un certain Lasse Marhaug (Nash Kontroll et surtout Jazkamer/Jazzkammer). Ces trois là étaient déjà parti intégrante de Powerhouse Sound, un groupe multi formes comprenant aussi John Herndon et Jeff Parker de Tortoise ou Nate McBride et proposant un croisement entre jazz électrique et raisonnablement groovy et hard bop teinté de free. Mais revenons à Fire Room, encore une formation regroupant des musiciens avec un curriculum vitae aussi long que la liste des promesses électorales d’un président de la république autocrate et démagogue. Fire Room a donc publié un premier album, Broken Music, sur le label habituel de Vandermark, Atavistic. Jusque là, il n’y a aucune (mauvaise) surprise.
On peut souvent faire le reproche à Ken Vandermark de rester trop sage, respectueux non pas d’une tradition mais d’une histoire du jazz -celle qui semble l’intéresser va des années cinquante aux années soixante-dix, de Charlie Parker à Sun Ra- et de se contenter de la relire avec application, déférence et dévotion. Il n’y a guère que lorsque Mars Williams jouait encore avec lui au sein du Vandermark 5, lors d’un duo avec Paul Lytton ou lorsqu’il joue en sideman pour le Chicago tentet de Peter Brötzmann qu’il sort un peu de ses gonds et se laisse aller. Ken Vandermark est un (encore) jeune saxophoniste propre sur lui qui ne goûte à l’exubérance du dépassement de soi qu’avec modération. Cela ne m’empêche pas d’aimer sa musique, les disques du Vandermark 5 échappent toujours à la fadeur grâce à un sens aigu de la composition et des arrangements.
Les side projects du garçon offrent eux un peu plus d’aventurisme est c’est bien le cas de Broken Music. Déjà, la formation est inhabituelle (sax ténor, machines, batterie). Ensuite, le jeu de Nilssen-Love est très chargé, riche en détails (bonne utilisation des cymbales et des toms). Lasse Marhaug ne se contente pas d’ériger des murs du son infranchissables comme il a l’habitude de la faire avec Jazkamer -je ne saurais trop conseiller l’écoute de l’énorme Metal Music Machine- mais insuffle des textures granuleuses et pleines de petites piques qui laissent la part belle à Ken Vandermark. Car le patron, incontestablement, c’est lui. Son jeu de saxophone est plus mélodieux et romantique que jamais, même dans les passages free ses couacs et ses couics sont emprunts d’une élégance un peu compassée et il tient la vedette et le crachoir tout au long des sept titres qui compose ce disque.
Un peu plus de contraste entre l’electo bidouillée de Lasse Marhaug et le lyrisme bon teint de Ken Vandermark aurait été le bien venu : on frise parfois cet exploit mais malheureusement à de trop rares occasions du disque. Un disque qui fait penser qu’une fusion entre Fire Room et Offonoff (évoqué hier) en un quintet totalement improvisé serait une excellente idée parce que Vandermark n’est jamais aussi bon que lorsqu’il est bousculé et malmené, là les deux musiciens qui l’accompagnent sont finalement beaucoup trop gentils avec lui, et c’est dommage parce qu’il a ce merveilleux son de saxophone qui pourtant peut faire tant de miracles…