lundi 5 mai 2008

Boris / Smile (deuxième version)


Encore le nouvel album de Boris, Smile, mais cette fois ci dans son édition nord-américaine et européenne via Southern Lord. La version japonaise, déjà en circulation depuis quelques semaines et complètement bancale, a quand même fini par s’imposer, bizarrerie j’écris ton nom. C’est fou. Toujours le même piège avec ce groupe, capable de dégouliner (façon coulis de chamallows à la fraise) comme de fuzzer dans l’espace psychédélique ou de pratiquer le vrombissement (quelques enregistrements dans le passé en collaboration avec Merzbow et un autre, hystérique, avec Keiji Haino, du nom de Black : Implication Flooding). Toujours la même histoire, oui -malgré le chant définitivement nian nian qui depuis quelques albums me fait grincer des dents- et même bien davantage : la fausse surprise est que la deuxième version de ce disque est à peine moins bancale que la première, finalement les deux fonctionnent de la même façon et l’une comme l’autre vont me faire dire que Smile est un bon disque. Ça y est. Je l’ai dit. Mais cet avis ne découle que de la connaissance simultanée des deux éditions de celui ci.
Comme on pouvait s’y attendre, les différences de mix sont flagrantes mais pas primordiales non plus. Disons que la version occidentale est nettement plus carrée et formatée. Il y a quelques titres dont les nuances mises en exergue (comme Statement en première position du CD japonais mais relégué à la quatrième place du CD pressé par Southern Lord) ne le sont visiblement que pour accréditer la théorie que ces deux disques sont radicalement différents. Mais ils se ressemblent parfaitement. En écoutant la version Daymare on devine tout le travail de pseudo sabotage qui a été effectué au mix -et ce qui est énervant c’est qu’on le devine tellement bien que l’on n’en retient que le côté forcé, on l’a fait exprès car il fallait absolument obtenir deux versions. En écoutant après coup celle de Southern Lord, la réaction est équivalente mais inverse : on entend tout ce que le groupe n’a pas encore rajouté comme putasseries de studio. Résultat les deux disques s’écoutent indifféremment et même se mélangent, l’un (r)appelant l’autre. Du procès d’intention (Boris groupe de méchants mercantiles qui voudraient bien vendre deux fois plus d’exemplaires d’un même disque) je passe à l’admiration extatique du type qui s’est peut être -et même très sûrement- fait enculer par un très bon plan marketing et qui prétend que derrière tout ça il y a un formidable concept, que Boris est un groupe génial. J’assume.





















On l’a vu la principale différence tient autant dans l’ordre des morceaux que dans le relookage de certains d’entre eux. Une pratique déjà utilisée par Boris pour son album Pink ou pour la bande originale du film Mabuta No Ura. Ouh les vilains. Les deux disques ont le même nombre de titres alors que Southern a pourtant bien annoncé que sa version avait une chanson exclusive en bonus, You Were Holding An Umbrella, au passage d’un niveau très moyen et donc pas franchement indispensable. Evidemment ce titre figure également sur la version japonaise mais sous un autre nom, 君は傘をさしていたsi tu tiens vraiment à le savoir (et maintenant démerde-toi avec ça). Pour les perfectionnistes on peut également signaler que la version Daymare est de trois minutes plus longue que celle de Southern Lord, la faute au huitième et dernier morceau (sans titre) sur lequel la guitare de Stephen O’Malley fait une apparition lancinante et remarquée. Autre invité sur un tiers des titres : Michio Kurihara du groupe hippie-folkeux Ghost avec lequel Boris avait enregistré l’album Rainbow en 2006. Voilà pour les détails techniques.
 Si la version Daymare démarre (hum) par une version électroniquée de Statement, la version Southern Lord débute elle par Flower, Sun, Rain, sorte de slow guimauvesque comme Boris les affectionne tant désormais et dont une autre version constituait déjà l’un des principaux points faibles du double live Rock Dream (Southern Lord, 2007), disque qui pourtant n’en manque pas. En ce sens que Flower, Sun, Rain est un début aussi choquant que le remix de Statement, les deux disques prennent pareillement l’auditeur à rebrousse poils au lever du lit. Après c’est juste une question de correspondances et de parallèles entre les deux mais, pour écourter cette analyse fastidieuse et inutile, disons que Smile lorgne définitivement du côté du heavy rock à forte tendance psychédélique -think : Pink- avec les habituelles balades romantiques et le passage obligé (et longuet) vers plus d’expérimentation, tout le monde aura reconnu le titre avec Stephen O’Malley. Boris continue ainsi de satisfaire ses détracteurs comme ses admirateurs. Vivement le prochain, qu’on rigole encore un peu.