lundi 24 mai 2010

Pneu - Nervous Kid / split























Les splits fleurissent à l’heure actuelle, je ne vais pas m’en plaindre surtout lorsqu’ils sont de l’excellente teneur de celui-ci. Sorti par une tripotée de labels avant-gardistes – tu es prêt ? accroche-toi bien : Aïnu records, Head records, Electric Junk (contact), Les Pourricords (contact) et Wild Love records (des italiens, des vrais) – ce magnifique 12 pouces est emballé dans une pochette sérigraphiée sur du carton recyclé, ça veut dire que le dit carton est de la même couleur que celui dont est fabriqué les supports de rouleaux de papier-cul, et il est pressé dans un vinyle de couleur dans des tons parfaitement raccord avec ce même carton. Il n’y a que lorsque on regarde le disque par transparence devant une source de lumière que l’on peut s’apercevoir que sa couleur est vraiment jolie, un peu ambrée, preuve irréfutable pour ceux qui en doutaient encore que la lumière/vérité ne se trouve que rarement au fond de la cuvette des chiottes.
Pour une fois on va provisoirement laisser de côté les stars du disque pour s’intéresser à l’autre groupe, j’ai nommé Nervous Kid. De ce duo guitare/batterie italien je ne connais rien, tout juste ai-je le vague souvenir d’un concert où je n’étais pas allé, voilà qui est constructif (et intéressant). Les deux titres proposés par Nervous Kid – dont un très long Mystic Moustache – sont tout simplement excellents. Le groupe y développe un kraut rock hypnotique du meilleur effet, lancinant, répétitif à souhait, limite shamanique et envoûtant. La surprise est d’autant plus de taille que Mystic Moustache démarre en trombe comme n’importe quelle cavalcade de math instru machin truc chose et que les répétitions – en langage châtié on appelle ça des patterns – s’immiscent rapidement mais efficacement, deviennent majoritaires, le chaos arty laissant sa place à des coulées de guitare jouée en taping (mais pas comme chez Eddie Van Halen) avec roulements free de batterie et beat soutenu à la grosse caisse en guise de balises. Le second titre de Nervous Kid, Shaver Laser, est beaucoup plus court mais tout aussi bon, sorte de math rock psychédélique, plus syncrétique qu’outrancier. Nervous Kid est donc l’inventeur du math kraut rock.
On compte trois titres sur la face Pneu dont un Hallemagne que l’on retrouvait déjà sur le split single partagé avec Revok chez Music Fear Satan. Dommage, sauf pour celles et ceux qui ne connaissent pas ce disque, les autres pourront toujours en profiter pour réviser leur Pneu et vérifier que question pression et équilibre, le duo guitare et batterie (encore) de Tours est le champion du monde des fouteurs de merde (on y revient) en matière de math rock. Non pas que ça dégouline et que ça tapisse, au contraire, Pneu est sec et rapide comme un pet de nonne agenouillée à confesses. Oiseau-Aigle, le premier des deux inédits, confirme que Pneu est le seul groupe de noise instrumentale et trigonométrée qui n’a pas peur de traverser hors des clous. Le second inédit, Chaours, est ce titre que le groupe joue actuellement en fin de set avec un final ralenti – sauf qu’en concert ça dure jusqu’à la torture doom pure et simple – et qui fait tirer la langue. Avec ce split, on a tout simplement deux facettes opposées d’une même formule musicale, les deux sont tout aussi excellentes l’une que l’autre et ce disque scelle définitivement une nouvelle étape dans l’amitié franco-italienne.