mardi 10 novembre 2009

Converge / Axe To Fall























Allez, c’est au tour de Axe To Fall, le nouvel album de Converge. Les quatre de Boston nous reviennent comme tous les trois ans, avec une régularité sans failles. Des horlogers, des maîtres d’œuvre perfectionnistes, calculateurs peut être, décidés sûrement et clairement ambitieux. Les adorateurs de la sainte trinité Petitioning The Empty Sky/When Forever Comes Crashing/Jane Doe, de ses méandres torturés et de sa folie rampante et contagieuse vont encore râler. Converge n’est plus le groupe le plus innovant de la planète hardcore mais, avec un album pareil, nos quatre tatoués risquent bien de devenir, si ce n’est déjà le cas, le plus gros groupe actuel de hardcore tout court. C’est tout le mal que je leur souhaite. Quelle bienveillance me direz-vous, il est vrai que ce n’est pas le style de la maison et non ça ne me perdra pas.
No Heroes
, l’album précédent et pas si différent que ça de Axe To Fall, n’avait pas laissé un souvenir impérissable, disons qu’il ronronnait et recyclait passablement efficacement les recettes méthodiquement mises en place depuis Jane Doe. Et bien Axe To Fall fait exactement la même chose mais au centuple. Converge y accentue tous ses traits de caractères, les plus violents et directs (la salve prévisible et attendue des quatre premiers titres joués à fond les ballons, vertigineuse et jouissive) comme les plus pathétiques et dégoulinants (le final Cruel Bloom/Wretched World).
La production - signée comme il se doit et comme d’habitude par Kurt Ballou - est d’une clarté et d’une lisibilité hallucinantes, avec un relief et une définition des concours des différents instruments qui réussissent à ne pas trop tomber dans le clinique et l’aseptisé. On est très loin de la cradeur et de la noirceur de When Forever Comes Crashing mais le son de Axe To Fall est parfaitement équilibré - une écoute répétée au casque ne donne pas mal aux oreilles, tout va bien monsieur l’oto-rhino. Sur ce tapis technique Converge place donc tous les éléments déjà connus de sa musique de dingues : rythmiques effrénées, rasades de double pédale, turbobasse, guitare-roquette, chœurs de guerriers en rut et le chant toujours aussi limité de Jacob Bannon. On a droit également aux quelques ralentissements reptiliens imposés par le cahier des charges (aération du disque et, pour les futurs concerts, repos des musiciens avant la prochaine cavalcade) et on trouve de-ci de-là des soli de guitare parfois très drôles avec plein de notes sur fond de D-beat, effet à haute teneur métallurgique garantie – par exemple les parties de guitare de Steven Brodsky de Cave In (et ancien membre de Converge) sur Effigy.
Oui, Steve Brodsky puisque Converge a surtout et comme à son habitude invité plein de musiciens extérieurs et amis à participer à l’enregistrement de Axe To Fall. Sauf que là aussi la surenchère est de mise, la liste de ce who’s who hardcore et metal est beaucoup trop longue pour en faire un tour d’horizon exhaustif. Citons tout de même Steve Von Till de Neurosis toujours aussi impérial au chant. Le problème de ces featurings est que les invités peuvent tellement bien s’approprier le titre sur lequel ils jouent (et qu’ils ont composé en commun avec Converge) que l’on en vient à se demander si c’est toujours du Converge que l’on écoute. Remarque particulièrement évidente à propos de Wretched World, chanson sur laquelle on retrouve l’intégralité du line-up de Genghis Tron. Mais que l’on se rassure tout de suite : Wretched World ne ressemble pas non plus à la diarrhée prog metal habituelle du trio new-yorkais, disons que l’on écoute un hybride mélodramatiquement ralenti et sucré de Converge associé au kitsch insupportable de Genghis Tron… On ne peut pas non plus nier que tous ces invités sont également là pour cacher les limites (admises et reconnues) du chant de Jacob Bannon, donnant un peu de relief vocal à Axe To Fall.
Un dernier mot sur l’artwork très symptomatique - signé Jacob Bannon - qui passe limite sur le recto mais qui se révèle terriblement affreux et répétitif dans les pages du livret (au passage beaucoup trop épais pour des textes aussi basiquement hardcore) : cet artwork est une énième resucée de ce que le groupe de Boston nous a déjà proposé dans le passé, on y reconnaît même des bouts de celui de Jane Doe, là aussi l’imagination est en berne. Converge saura t-il éviter encore longtemps l’écueil du mauvais goût ? Le groupe trouvera t-il un jour de nouvelles sources d’inspirations ? Non, je ne pense pas mais en attendant Axe To Fall réussit son pari d’un hardcore violent mais accessible.