L’ensemble du comité rédactionnel de 666rpm a
toujours eu un peu de mal avec PUTIFERIO. Et
c’est sciemment que l’on n’avait pas parlé ici de Ate Ate Ate*, le précédent et premier album du groupe, un album
finalement un peu gênant. Ah ! Qu’est ce que cela signifie donc, un album
« gênant » ? Par exemple un disque que l’on se sent très près
d’aimer alors que quelque chose nous en empêche définitivement**. C’était
précisément le cas de Ate Ate Ate et
cela se passe presque exactement de la même façon avec Lov Lov Lov. Tout est donc dans ce « presque » qui
selon les jours et les humeurs fait pencher la balance d’un côté plutôt que de
l’autre.
En fait tout commence on ne peut plus parfaitement
avec Void Void Void*** et sa noise
élégamment barrée et joyeusement hystérique. Pas mal maniérée également et
surchargée à l’occasion d’enluminures bidouillée – cela se reproduira à
plusieurs reprises sur Lov Lov Lov****
– qui n’apportent pas toujours grand-chose à l’ensemble. En bon amateur de
bourrinade et de violence gratuite je regrette parfois à l’écoute de Lov Lov Lov que les quatre Putiferio se soient
sentis obligés d’en rajouter dans l’excentricité et l’outrance expressive. Un
peu plus de frontalité et de rudesse comme chez leurs camarades de label
Lucertulas ne leur ferait pourtant pas de mal. Et le problème est que quand
on commence à écouter un disque tout en réfléchissant à ce que l’on aurait
préféré y entendre (s’amuser à changer l’ordre de la setlist, imaginer un tout
autre mix*****, virer une guitare ou en rajouter une autre, etc) cela signifie
que le ver est dans le fruit.
En même temps Lov
Lov Lov est un album souvent très accrocheur à la frontière du post punk et
du noise rock. Que l’on n’y soit que partiellement sensible ne signifie pas
qu’il soit mauvais ou faiblard ou même indigne. C’est même à peu près tout le
contraire car on ne peut que reconnaitre que Putiferio est un groupe sinon avec
une sacré personnalité du moins capable d’avoir des idées à la pelle. Bon, ces
idées sont ce qu’elles sont – du genre du violon sur un passage très post rock
à la fin de Hopileptic ! – et
elles dénotent d’un sens du baroque et de la grandiloquence parfois un peu
indigeste. Les envolées sont légions sur Lov
Lov Lov et, finalement, il faut intrinsèquement être d’une humeur aussi
bonne que réceptive pour accepter un disque aussi délibérément joyeux : ce
qui donc manque à cette musique c’est son incapacité à faire vraiment mal.
[Lov Lov Lov
a été publié sous la forme d’un fort beau digipak par Robot Radio records et Macina Dischi]
* Ate Ate
Ate puis Lov Lov Lov, avec un peu
de chance le prochain album de Putiferio s’intitulera Fuk Fuk Fuk
** l’inverse est également vrai : un disque
que l’on devrait détester mais que l’on aime quand-même – dans ce cas-là parler
de bonne surprise est la seule solution pour s’en sortir avec les honneurs
*** Putiferio est visiblement un groupe doublement
bègue
**** question bazar électro Loss Loss Loss passe même assez mal avec ses plans qui typiquement ne
peuvent plaire qu’à des gens qui n’écoutent presque jamais de musique
électronique
***** le premier truc à faire avec celui de Lov Lov Lov serait de mieux canaliser ce
chant très bavard et qui parfois donne la malheureuse impression de n’être
qu’une usine à yaourt