OLD MAN GLOOM
est un super groupe. Mais un super groupe dont on n’attendait pas vraiment qu’il remonte à la surface. Side-project de musiciens/vilains barbus dont on
est parfois très loin d’apprécier les (ex) projets principaux – Aaron Turner de
Isis à la guitare et au chant, Nate Newton de Converge et Doomriders également
à la guitare et au chant, Caleb Scofield de Cave-In et Zozobra à la basse ainsi
que Santos Montano de Zozobra à la batterie – One Man Gloom était surtout l’exception
qui confirme la règle : avec une poignée de disques publiés entre 1999 et
2003 (Meditations In B, Seminar II, Seminar III et Christmas)
nos quatre garçons avaient aligné un carré d’as défrichant une sorte de
hardcore/metal hybride, « expérimental », torturé à souhait mais
jamais pénible ni indigeste. Aujourd’hui on se demande encore comment ils y
sont parvenus d’autant plus que les recettes appliquées par Old Man Gloom sont
aussi simples que basiques : des titres d’une lourdeur insoutenable et blindés
d’une saturation omniprésente et étouffante, du chant constamment hurlé et au
milieu de tout ça de drôles de titres ambient pour bien sentir le côté obscur
de la force pénétrer dans ton petit corps de vermine humaine.
2012 marque donc le retour aux affaires d’Old Man
Gloom avec un nouvel album sobrement intitulé No. Un retour pas aussi catastrophique et inconsistant que certains
veulent bien le penser. Ouais, bon, on admet que le Old Man Gloom version année de la
fin du monde est nettement moins passionnant que celui du début du millénaire
(et de la précédente fin du monde, est ce que tout le monde suit ?) mais Aaron
Turner et ses petits copains ne se moquent pas totalement de nous non plus.
En fait, peut-être est-ce tout simplement nous qui
avons changé. Lorsqu’un groupe ne donne plus de ses nouvelles – huit ou neuf années
dans le cas d’Old Man Gloom – c’est exactement comme si une page s’était
tournée. Tout le monde est passé à autre chose. Donc lorsque une vieille gloire
tente de refaire
parler de lui on en attend beaucoup trop et surtout on s’y prend
mal, prenant nos désirs pour la réalité or ce qui compte pourtant c’est bien ce
que les musiciens concernés souhaitaient réellement en reformant leur groupe. Sauf
que dans le cas de No on peut se demander ce que les quatre musiciens voulaient donc faire et il est évident qu’Old
Man Gloom ne va plus de l’avant. On peut même dire que le groupe regarde
tellement en arrière qu’il a inclus dans sa musique des éléments symptomatiques
tirés de celles des autres groupes de chaque membre d’Old Man Gloom (écoutez un
peu Shadowed Hand ou Rats : ces deux titres sont bourrés
de plans typiques d’Isis mais No est
constellé de plein d’autres exemples). Or on ne veut tout simplement pas
écouter un groupe qui se contente désormais de n’être plus que la somme de ses
membres – on préférait lorsque Old Man Gloom était une symbiose malsaine et
exponentielle de tous les talents individuels contenus dans le groupe. C’est
aussi simple que cela.
Ceci posé, No est presque excellent sur sa première moitié, disons jusqu’à The Forking Path inclus, puis l’album s’essouffle
inexorablement (en dernière position Shuddering
Earth est même particulièrement pénible et il dure un quart d’heure !).
C’est un peu triste. Et on passera sur Crescent,
une ballade/folk song pour post hardcoreux romantiques incroyablement nulle et terriblement
affligeante (il n’y a pas d’autres mots). Pour le reste No est un disque inutile bien que traversé d’éclairs maléfiques, un
album qui donne surtout envie d’écouter tous ses illustres prédécesseurs, sans
exception.
[No est publié en double LP et en CD par Hydra Head – la version vinyle est épuisée depuis longtemps]