Il doit y avoir un truc de pas respirable dans l’air parce qu’en ce moment, dès qu’un concert a lieu, le public répond présent. Même si cela n’en a pas toujours été ainsi et même si on sait pertinemment que cela changera un jour ou l’autre, cela fait rudement plaisir. Ce n’est pas tous les jours que le Grrrnd Zero dans sa version Gerland dépasse les 250 entrées payantes (dont, me dit-on, au moins 200 lecteurs assidus de Pitchfork).
Pourtant, à 21 heures, il n’y avait encore que peu de monde, à tel point que le pronostic vital de la soirée pouvait être raisonnablement réservé. A mon arrivée j’apprends également non sans un certain soulagement que les Binaire vont jouer en premier – j’estime alors je pourrai être au lit aux alentours de 23 heures, gros pépère que je suis. Et en attendant que mon duo stéphanois-marseillais préféré commence à envoyer du bois, un petit rendez-vous mondain avec les gens des Disques De Plomb s’impose tout naturellement. Ces jeunes gens ont vaillamment parcouru les 140 bornes qui séparent leur bled (Valence) de la ville des lumières (Lyon) mais ils ont une excellente raison à cela : leur label vient tout juste de publier le volume 2 des Rosemary K’s Diaries, une suite prenant cette fois ci la forme d’un split partagé entre Binaire (justement) et Nicolas Dick de Kill The Thrill (en solo). On se rappelle évidemment du volume 1 qui avait fortement marqué les esprits et on reparle de ce deuxième épisode et même du reste sans faute et dès que possible, c'est-à-dire dans pas très longtemps parce que les Disques De Plomb ont aussi d’autres très chouettes prévisions en réserve…
Comme la vie est mal faite ou – plus honnêtement – comme j’ai encore du faire n’importe quoi, je n’ai pas revu Binaire en concert depuis la parution du troisième album du groupe, le formidable Idole. Le duo joue finalement assez rarement sur Lyon comme ailleurs mais rien explique non plus pourquoi en 2010 j’ai été absent lors des seuls passages de Binaire dans le coin, au Clacson à Oullins puis lors du festival Avatarium à Saint Etienne au printemps dernier. Ce soir constitue en quelque sorte une séance de rattrapage.
La musique de Binaire a évolué entre Bête Noire, le deuxième album, et Idole. Sur scène – enfin, par terre puisque Binaire joue toujours à même le sol, les deux guitaristes/chanteurs de front, dans un dispositif qui leur est vraiment propre – sur scène donc le groupe a également appris à faire passer autrement toute sa rage. Plus de Kasque A Pointe* par exemple en guise d’intro fracassante, et logiquement moins de frontalité.
Les concerts de Binaire pouvaient régulièrement tourner à l’émeute mais désormais c’est le côté massif voire dark qui est privilégié, tout ça ressemble donc moins à un match de boxe qu’auparavant. Je ne regrette pas ces changements, tout comme j’ai su apprécié la tournure sombre et plombée de Idole, d’autant plus que le son du concert est bon – contrairement à ce qui est écrit un peu plus haut et contrairement à ce que tout le monde pense en général ils ne sont pas deux dans Binaire mais trois : il ne faut pas oublier le fidèle et efficace soundman qui n’est pas pour rien dans la réussite du groupe.
Et puis tout ceci ne signifie pas que désormais un concert de Binaire soit sans énergie, bien au contraire. Cette énergie est juste utilisée différemment et le groupe fera doucement mais très sûrement monter la pression pour nous offrir une fin de concert emballante avec en prime quelques batifolages d’agités (avinés ?) dans le public.
Contre toute attente et contre toute logique je décide de rester au Grrrnd Zero. C’est vrai que je n’ai rien à faire de spécial le lendemain mis à part attendre qu’il se passe rien, justement. Pendant le concert de Binaire les gens sont arrivés en masse et l’air est presque devenu irrespirable. Il va donc y avoir foule et quelques jeunes gens s’agglutinent déjà devant la scène pour réserver les meilleures places et attendre de pied ferme le groupe d’après, j’ai nommé : Shellshag.
En fait je n’ai fait que lire le nom du groupe sur une bannière pourrie accrochée sur le mur du fond de la scène. Je tapote gentiment sur l’épaule de mon voisin de devant que je connais (vraiment très vaguement) de vue pour lui demander quelque chose du genre : c’est ça le nom du groupe ? tu connais ? c’est bien ? t’es fan ? ça ressemble à quoi ? Au moment même où ces mots sortent de ma bouche je comprends toute la stupidité de mes questions mais mon interlocuteur ne se démonte pas et me répond on ne peut plus courtoisement que – bien que détestant les appellations débiles de groupes – il rangerait Shellshag quelque part entre Pavement et les Ramones. Me voilà donc rassuré.
En attendant un garçon et une fille aux tignasses ébouriffées sont montés sur scène et ont installé leur matériel dont un kit batterie particulièrement rudimentaire. Deux micros se font face et donc Shellshag c’est un garçon hirsute qui joue de la guitare et qui chante et une fille non moins hirsute qui tambourine et chante elle aussi. Après s’être présentés en précisant qu’ils sont spécialement venus de New York – en fait Shellshag accompagne les Japanther sur toute leur tournée –, les deux se lancent effectivement dans une pop noisy et punky mais surtout très lo-fi dont je me fous complètement. Donc je dégage, laissant la place aux fanatiques de Shellshag qui s’agitent déjà comme des parasites assoiffés grouillant sur le dos d’un clébard du Bronx. J’aurais du comprendre à ce moment là qu’il était vraiment temps pour moi de rentrer me coucher mais non, mon côté hipster a résolument pris le dessus et je suis donc resté afin de papoter de sujets complètement secondaires avec quelques éminents représentants du monde du spectacle musical. La vie est si difficile, parfois.
Tellement difficile que lorsque Japanther commence je suis toujours là, en quelque sorte victime consentante de ma procrastination – ce mot tellement à la mode pour décrire un phénomène vieux comme le monde moderne et surtout un comportement essentiel pour arriver à le supporter. Mais passons…
Japanther… comment dire… le groupe, je parle des disques, est insupportable, non ? Deux jeunes mecs – au demeurant ils ont l’air charmant – qui jouent de la power pop bubblegum complètement rétrograde et mentalement limitée, à faire passer les Ramones et les Barracudas pour de dangereux groupes de rock progressif. Je n’ai pas tenu plus d’un titre et demi, juste le temps de prendre quelques photos avant de partir en courant pendant que les fans de Japanther (encore plus nombreux que ceux de Shellshag) entamaient leur danse du ventre rituelle. C’est à ce moment là que j’ai du admettre que Shellshag ce n’était pas si mal que cela, en tous les cas ces derniers au moins savent torcher de vraies compositions, à la différence des Japanther dont le talent de compositeurs frise le néant à force de trop de caricature. Mais c’est vrai que Japanther en concert c’est megateuf, le public était ravi et agité. C’est sûrement là l’essentiel… ?
Pourtant, à 21 heures, il n’y avait encore que peu de monde, à tel point que le pronostic vital de la soirée pouvait être raisonnablement réservé. A mon arrivée j’apprends également non sans un certain soulagement que les Binaire vont jouer en premier – j’estime alors je pourrai être au lit aux alentours de 23 heures, gros pépère que je suis. Et en attendant que mon duo stéphanois-marseillais préféré commence à envoyer du bois, un petit rendez-vous mondain avec les gens des Disques De Plomb s’impose tout naturellement. Ces jeunes gens ont vaillamment parcouru les 140 bornes qui séparent leur bled (Valence) de la ville des lumières (Lyon) mais ils ont une excellente raison à cela : leur label vient tout juste de publier le volume 2 des Rosemary K’s Diaries, une suite prenant cette fois ci la forme d’un split partagé entre Binaire (justement) et Nicolas Dick de Kill The Thrill (en solo). On se rappelle évidemment du volume 1 qui avait fortement marqué les esprits et on reparle de ce deuxième épisode et même du reste sans faute et dès que possible, c'est-à-dire dans pas très longtemps parce que les Disques De Plomb ont aussi d’autres très chouettes prévisions en réserve…
Comme la vie est mal faite ou – plus honnêtement – comme j’ai encore du faire n’importe quoi, je n’ai pas revu Binaire en concert depuis la parution du troisième album du groupe, le formidable Idole. Le duo joue finalement assez rarement sur Lyon comme ailleurs mais rien explique non plus pourquoi en 2010 j’ai été absent lors des seuls passages de Binaire dans le coin, au Clacson à Oullins puis lors du festival Avatarium à Saint Etienne au printemps dernier. Ce soir constitue en quelque sorte une séance de rattrapage.
La musique de Binaire a évolué entre Bête Noire, le deuxième album, et Idole. Sur scène – enfin, par terre puisque Binaire joue toujours à même le sol, les deux guitaristes/chanteurs de front, dans un dispositif qui leur est vraiment propre – sur scène donc le groupe a également appris à faire passer autrement toute sa rage. Plus de Kasque A Pointe* par exemple en guise d’intro fracassante, et logiquement moins de frontalité.
Les concerts de Binaire pouvaient régulièrement tourner à l’émeute mais désormais c’est le côté massif voire dark qui est privilégié, tout ça ressemble donc moins à un match de boxe qu’auparavant. Je ne regrette pas ces changements, tout comme j’ai su apprécié la tournure sombre et plombée de Idole, d’autant plus que le son du concert est bon – contrairement à ce qui est écrit un peu plus haut et contrairement à ce que tout le monde pense en général ils ne sont pas deux dans Binaire mais trois : il ne faut pas oublier le fidèle et efficace soundman qui n’est pas pour rien dans la réussite du groupe.
Et puis tout ceci ne signifie pas que désormais un concert de Binaire soit sans énergie, bien au contraire. Cette énergie est juste utilisée différemment et le groupe fera doucement mais très sûrement monter la pression pour nous offrir une fin de concert emballante avec en prime quelques batifolages d’agités (avinés ?) dans le public.
Contre toute attente et contre toute logique je décide de rester au Grrrnd Zero. C’est vrai que je n’ai rien à faire de spécial le lendemain mis à part attendre qu’il se passe rien, justement. Pendant le concert de Binaire les gens sont arrivés en masse et l’air est presque devenu irrespirable. Il va donc y avoir foule et quelques jeunes gens s’agglutinent déjà devant la scène pour réserver les meilleures places et attendre de pied ferme le groupe d’après, j’ai nommé : Shellshag.
En fait je n’ai fait que lire le nom du groupe sur une bannière pourrie accrochée sur le mur du fond de la scène. Je tapote gentiment sur l’épaule de mon voisin de devant que je connais (vraiment très vaguement) de vue pour lui demander quelque chose du genre : c’est ça le nom du groupe ? tu connais ? c’est bien ? t’es fan ? ça ressemble à quoi ? Au moment même où ces mots sortent de ma bouche je comprends toute la stupidité de mes questions mais mon interlocuteur ne se démonte pas et me répond on ne peut plus courtoisement que – bien que détestant les appellations débiles de groupes – il rangerait Shellshag quelque part entre Pavement et les Ramones. Me voilà donc rassuré.
En attendant un garçon et une fille aux tignasses ébouriffées sont montés sur scène et ont installé leur matériel dont un kit batterie particulièrement rudimentaire. Deux micros se font face et donc Shellshag c’est un garçon hirsute qui joue de la guitare et qui chante et une fille non moins hirsute qui tambourine et chante elle aussi. Après s’être présentés en précisant qu’ils sont spécialement venus de New York – en fait Shellshag accompagne les Japanther sur toute leur tournée –, les deux se lancent effectivement dans une pop noisy et punky mais surtout très lo-fi dont je me fous complètement. Donc je dégage, laissant la place aux fanatiques de Shellshag qui s’agitent déjà comme des parasites assoiffés grouillant sur le dos d’un clébard du Bronx. J’aurais du comprendre à ce moment là qu’il était vraiment temps pour moi de rentrer me coucher mais non, mon côté hipster a résolument pris le dessus et je suis donc resté afin de papoter de sujets complètement secondaires avec quelques éminents représentants du monde du spectacle musical. La vie est si difficile, parfois.
Tellement difficile que lorsque Japanther commence je suis toujours là, en quelque sorte victime consentante de ma procrastination – ce mot tellement à la mode pour décrire un phénomène vieux comme le monde moderne et surtout un comportement essentiel pour arriver à le supporter. Mais passons…
Japanther… comment dire… le groupe, je parle des disques, est insupportable, non ? Deux jeunes mecs – au demeurant ils ont l’air charmant – qui jouent de la power pop bubblegum complètement rétrograde et mentalement limitée, à faire passer les Ramones et les Barracudas pour de dangereux groupes de rock progressif. Je n’ai pas tenu plus d’un titre et demi, juste le temps de prendre quelques photos avant de partir en courant pendant que les fans de Japanther (encore plus nombreux que ceux de Shellshag) entamaient leur danse du ventre rituelle. C’est à ce moment là que j’ai du admettre que Shellshag ce n’était pas si mal que cela, en tous les cas ces derniers au moins savent torcher de vraies compositions, à la différence des Japanther dont le talent de compositeurs frise le néant à force de trop de caricature. Mais c’est vrai que Japanther en concert c’est megateuf, le public était ravi et agité. C’est sûrement là l’essentiel… ?
* non non, ton ordinateur n’est pas en train de s'éteindre