lundi 21 mai 2007

Epilogue : contre l’éloignement de la passion mais pour la masturbation


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En relisant le programme des Nuits Sonores 2007 je m’aperçois que la débandade a lieu juste à côté de la maison : les habituelles siestes en after c’est au parc voisin, celui qui les dimanche accueille tous les gamins du quartier, leurs parents un peu froissés par la fin du week-end et quelques fumeurs de shit. L’air commence à résonner dès 11 heures, je devine la clameur des teufeurs encore tout excités, le processus d’élimination du speed et de l’éthanol par l’urine et la sueur n’a pas atteint son rendement maximum. Toute la journée j’écoute cette rumeur qui vole au dessus des arbres du parc et arrive jusqu’à nos fenêtres, quelques passages me plaisent parfois, déformés par le vent, la chaleur et nos propres bruits, ceux de l’immeuble, nos paroles, la radio, le disque que je viens juste de décider d’écouter, l’eau qui coule dans la salle de bains, tout ce que d’habitude je ne remarque pas vraiment parce qu’il n’y a rien d’autre et que je suis dedans. Ainsi, j’ai regretté d’être allé au parc un peu plus tard, regretté de voir et d’écouter en direct et pour de vrai : c’était bien mieux de loin.




















Aujourd’hui on peut écouter proprement de la musique sans la voler, tout le monde est content mais je ne crois pas que cela soit suffisant -je ne veux pas parler des radios en ligne US (type Pandora) qui depuis la nouvelle réglementation nord-américaine ne peuvent presque plus rien diffuser, ça ne rigole pas avec les droits d’auteurs ET les ressources publicitaires, mais de tous les groupes, musiciens, labels qui mettent leurs nouvelles productions partiellement ou en intégralité sur internet : je n’ai pas vraiment l’impression d’écouter plus de musique et surtout je ne pense pas l’écouter mieux. En clair là aussi je l’écoute de loin, même s’il ne s’agit pas du même éloignement, devenu volontaire.
Je n’ai pu réellement découvrir le dernier album de Nadja que lorsque je l’ai manipulé, senti, lu, arrêté, lorsque j’ai recommencé à l’écouter plus tard et que je ne faisais rien d’autre, ou plus exactement lorsque cela me permettait de faire tout autre chose sans m’en rendre compte -la musique a cette faculté du fonctionnel (outre le fait qu’elle peut dériver de situations précises qui font qu’elle remplit une fonction à proprement parler, les meilleurs exemples étant la musique religieuse et les chants d’esclaves) qui consiste a rendre intéressant, ou alors moins pesant, tout ce qu’elle touche, un fonctionnel étroitement lié avec l’intime et/ou le quotidien. La musique dématérialisée m'ennuie car elle n'a aucune place à prendre, elle ne remplace rien, si en plus elle a le malheur de ne pas parler à mon ego alors il m’est impossible de m’y abandonner, ce qui est, je crois, une bonne définition de la masturbation.