vendredi 7 septembre 2007

North Star Deserter

























Je dois avouer que je ne connais rien de Vic Chesnutt ou plutôt que comme tout le monde ou presque j’avais un jour jeté une oreille sur l’un de ses vieux disques -Drunk ? Is The Actor Happy ?- peut être charmé par la voix et l’attitude poétique du bonhomme. Mais en ce début des années 90 je n’allais quand même pas m’emmerder à traduire les textes de ce type pour vérifier s’il chantait vraiment ce dont il avait l’air et je l’ai donc rangé dans une petite case mentionnant quota obligatoire de chanteurs/musiciens handicapés pour la bonne conscience des élites intellectuelles, juste aux côtés de Robert Wyatt. D’autant plus qu’à cette époque il y avait toutes sortes de musiques qui me passionnaient tout autrement.
Vic Chessnutt a donc publié Norton Star Deserter chez Constellation et -en plus- il a enregistré cet album avec des musiciens issus de groupes maison du label de Montréal, vers la fin 2006/début 2007 dans leur studio habituel et tout le tremblement. On retrouve essentiellement des membres de Godspeed (un peu), Silver Mount Zion (beaucoup), Hanged Up (aussi) mais également Guy Picciotto (Fugazi). Le fait que ce disque porte la marque Constellation joue évidemment en sa faveur et étant moi même un gros snobinard -parce que j’ai découvert Godspeed You! Black Emperor avant tout le monde- je n’ai pas agi autrement et ai donc décidé d'écouter North Star Deserter que pour cette seule et unique raison.
Et j’ai ressenti un soulagement intense. Jamais, depuis qu’A Silver Mount Zion (etc.) a semble t-il définitivement délaissé les complaintes à bases de guitares atmosphériques mais bruyantes (en gros les deux premiers albums) au profit des chants de boy-scouts autour d’un feu de joie (toujours en gros, les deux derniers disques), jamais je n’avais pu regoûter avec autant de vérité à la musique de ce groupe. Je dirais même plus : A Silver Mount Zion s’est enfin trouvé un vrai chanteur, virez Efrim et ses bêlements messianiques ou alors qu’il se taise enfin et se contente de ne jouer que de la guitare. Les plans habituels du groupe sont une nouvelle fois rabâchés -montées de guitares qui s’entrecroisent, brutales accalmies, choeurs mystico-patchoulis, violonades discrètes ou impérieuses, gratouillis lointains- mais avec la voix lugubre, amère et nasillarde de Vic Chesnutt c’est tout simplement parfait, oui parfait. Tout cela ne transpire pas forcément la joie, lorsque on chante des trucs comme I Am A Stranger/Lurking Along In My Own Vicious Wilderness/While The Meat In My Chest/Squeezes And Teases A Hulking Hunger/Groping In Motion (et ainsi de suite) il ne faut pas s’attendre à des hymnes sucrés à la gloire du beach sex adolescent mais à un album qui oscille entre ballades funèbres (Warm, Marathon) et suicides noisy (Everything I Say, Debriefing).
Mon principal problème avec ce disque c’est que je n’aime plus A Silver Mount Zion depuis un paquet de temps mais -eurêka!- je sais maintenant exactement pourquoi. En prêtant allégeance au folk chevrotant de Vic Chesnutt, la bande d’Efrim a certes trouvé la formule définitive de son épanouissement (j’ai déjà dit que je trouvais ça parfait) mais c’est le genre de formule à laquelle je tourne consciencieusement le dos -lassé des complaintes, agacé par les comas éthyliques, énervé par le grelottement insignifiant des guitares (sèches), autant de cliquetis maladifs symptomatiques d’un mal-être auquel je n’adhère pas.