jeudi 1 août 2013

Le Singe Blanc / Aoûtat




Aoûtat : encore un disque de saison. Même si celui-ci a été publié en plein hiver. Un hiver beaucoup plus long et beaucoup plus merdique que d’habitude, ce qui a eu pour principale conséquence de retarder d’autant l’envol d’Aoûtat au pays des rêves et en compagnie de mon petit cœur desséché. On ne peut pas écouter LE SINGE BLANC n’importe quand, à n’importe quelle occasion ni dans n’importe quelle position. C’est que la banane turgescente a ses exigences et ses impératifs. Et que si vous vous retrouvez la tête en bas et la queue entre les jambes et bien tant pis. Parce que Le Singe Blanc, lui, bande sévère et longtemps.
Le trio a fêté ses dix ans en 2010, Aoûtat est le septième album du Singe Blanc et rien n’a réellement changé ici. Toujours la même folie rythmique, toujours les mêmes deux basses – en général il y en a une qui assure le terrassement tandis que l’autre s’occupe des finitions mélodiques mais toutes les deux s’accordent à saccader comme des folles –, deux basses qui tricotent du poil de guenon avec une dextérité à en rendre jaloux NoMeansNo, les Ruins et Sabot réunis et toujours un chant à trois voix (et parfois plus parce qu’il y a des invités sur Aoûtat), des voix qui borborygment, crachouillent, éructent, ricanent, gargarisent… Sur Aoûtat on croit pourtant déceler quelques mots pour de vrai, des bouts de phrases qui pourraient signifier quelque chose, c’est peut être enfin le miracle de l’évolution. Mais le reste du temps les égosillements animaliers du Singe Blanc restent parfaitement inintelligibles bien que toujours aussi signifiants : cette fureur et cette folie, il faut qu’elles sortent et il faut surtout les faire partager.
Le Singe Blanc est aussi à l’aise dès qu’il s’agit de groover comme une cocotte-minute que lorsqu’il faut pétarader sèchement, à la punk. Mais dans tous les cas le trio ne perd pas de temps et donc n’en fait pas perdre à l’auditeur : pas de redites inutiles, pas de branlettes molles, pas de remplissages d’anus artificiels, autrement dit Le Singe Blanc sait ce qu’il veut. Et ce qu’il veut c’est faire danser les débiles-mentaux, les minets hypeux de vingt ans qui pensent découvrir la vie, les quarantenaires psychorigides, blasés et revenus de tout et les vieux dans les hospices – même les imbéciles-heureux devraient pouvoir y retrouver leur compte. Quand on aime… Et avec Aoûtat on aime plus que jamais Le Singe Blanc : ce septième album est le moins intentionnellement tordu du groupe, il est le plus évident parce que le plus mélodique (il y a même Mr Marcaille – également dans le rôle de l’ingénieur du son et du robot-mixeur – qui a posé quelques crottes de violoncelle) et, presque paradoxalement, il est le plus intensément débile et le plus instantanément jouissif. La banane je vous dis.

[Aoûtat est publié en CD et vinyle par Aredje,  Et Mon Cul C'est Du Tofu ?, La Face Cachée,  Musica Per Organi Caldi et Whosbrain records ; le LP est absolument superbe dans sa pochette qui se déplie en trois volets pour laisser apparaitre un très chouette artwork signé Lilas ; signalons enfin que ce n’est pas la peine de chercher sur internet  une version piratée et pleine de mp3 dégueux d’Aoûtat : le disque est également disponible en téléchargement libre et gratuit]