mardi 23 octobre 2012

Guimo / Lotophage





Le Guimo est un petit animal à poils doux et soyeux qui se shoote allègrement à la fleur de lotus. Un peu comme le koala austral qui se gave lui de feuilles d’eucalyptus et en profite pour dormir des heures durant et laisse filer des journées entières dans l’indolence la plus complète et surtout la plus confortable. GUIMO c’est aussi et surtout un groupe de Bordeaux démarré il y a des années, ayant connu des incarnations assez diverses pour finalement se retrouver réduit à sa plus simple expression : Guillaume Hermon à la voix, aux textes et à l’harmonica et Philippe Rey – ancien guitariste des défunts Sincabeza – à la guitare et à plein d’autres choses encore.
L’évocation de Sincabeza ne doit cependant pas vous mettre sur la mauvaise voie : autant le regretté trio de math rock bordelais était expert en double croches, en syncopes, en mesures bancales ou en contretemps, autant Guimo fait l’éloge d’une lenteur lumineuse, crépusculaire et poétique, à mille lieues de toute frénésie, de tout vandalisme auditif et de tout passage en force. La seule constante entre les deux projets c’est l’élégance. Et la beauté. Si on insiste quelque peu sur les parallèles (humains) entre les deux groupes c’est tout simplement parce que Guimo et Sincabeza ont une longue histoire commune, au moins depuis 2003 et que cette histoire a abouti à cet album, Lotophage, publié au début de l’été 2012 en complète autoproduction.
Lotophage tourne donc autour des textes, textes à côté desquels il serait extrêmement difficile de passer puisqu’ils sont en français. Il n’en a pas toujours été ainsi car fut un temps Guimo s’exprimait dans la langue maternelle du rock’n’roll mais voilà, on l’a déjà expliqué un peu plus haut, Guimo n’est pas intéressé par le côté tranchant et/ou abrupt dans la musique mais privilégie une forme de tension toute autre, contemplative certes, extrêmement prenante, envoutante parfois (le sublime La Chose Petite) mais qui ne laisse jamais le sens des mots prendre totalement le dessus.
Souvent les textes s’avèrent peu intelligibles ou même sujet à interprétation car cette voix/chant parlé louvoie entre murmures distillés entre chien et loup, marmonnements intimistes et berceuses enfumées, sorte de confidences que l’on comprend justement à demi-mot : l’important ce n’est pas uniquement ce qui doit être dit mais la façon dont tout est dit ; comme lorsqu’on vous vous retrouvez serré entre des bras et que l’émotion passe également au travers de ce contact physique aussi simple qu’universel. Cela ne signifie pas que les textes de Lotophage ne sont qu’une suite de mots ou de phrases en forme de formules magiques servant à ouvrir des boites à secrets ; les textes sont bel et bien là mais on apprécie plus que tout cette façon sublimement délicate et raffinée de les lâcher dans la nature sans en faire des panneaux publicitaires à émotions.
La musique est à l’unisson de cette voix – fine, évanescente, minimaliste – et s’encombre de peu d’effets voire de peu de notes. Tout juste note-t-on sur Arbore la présence d’une contrebasse et d’une batterie jouées elles aussi par d’autres anciens membres de Sincabeza. Lotophage est ainsi d’une beauté simple et intime qui vous prend doucement mais fermement par surprise. Merci…