jeudi 14 février 2008

Rotten Sound / Cycles






















 


Cycles, le nouvel album des finlandais de Rotten Sound est resté intégralement en ligne pendant plusieurs semaines sur le site officiel du groupe, peut être même y est il encore. C’est Spinefarm, déjà responsable de la sortie de l’excellent Exit (2005) et du mini album Consume To Contaminate (2006), qui assure également celle de Cycles -et apparemment le label en attend beaucoup. Depuis quelques années, la recette pratiquée par Rotten Sound est toujours aussi simple : du grind core ultra produit -ici on n’est pas dans la cave où Napalm Death a enregistré la première face de Scum- avec un son plein de gras comme tout ce qui se fait du côté de la Scandinavie en matière de death metal. Que du très lourd. Du compact. De la poésie au hachoir électrique.
Grind core et death metal sont donc les deux mamelles de ces quatre trublions, ce en quoi ils ne font preuve d’aucune originalité mais ce n’est pas un reproche à leur faire puisque ceux-là bastonnent depuis 1993 déjà, ce qui fait d’eux quasiment des vétérans. Rotten Sound chercherait à occuper la place laissée vacante par Nasum que cela ne m’étonnerait pas -d’ailleurs l’album Exit tout comme son prédécesseur l’insurpassable Murderworks avaient été produits par Mieszko Talarczyk- et s’il y a de nombreux groupes à postuler au titre suprême, peu s’en sortent avec réussite. Entre autres, les amis et voisins suédois de Sayyadina ont récemment prouvé leur capacité à charger leur musique en metal sans en saper l’esprit crust et hard core. Mais c’est Rotten Sound qui avait ouvert la voie, le vautrage dans la précision technique et la froideur digitale en plus. Cycles est l’aboutissement de ce blindage en bonne et due forme, opération qui malheureusement présente quelques défauts et ratages.
Car à trop vouloir tout écraser sur son passage ce disque perd son centre de gravité, en fait il le descend tellement bas -parfois au ras des pâquerettes- que l’effet obtenu va à l’encontre de celui escompté : pesant au lieu d’être lourd, violent à la place de puissant et au final marqué par quelques passages sans aucune passion ni excitation. Le nouveau batteur (il occupe ce poste depuis le précédent mini album) est peut être le roi du blast, les guitares sont peut être carnassières -et d’ailleurs : j’aurais préféré un petit peu plus de basse- tout ceci ne finit par relever que de la caricature. Les passages trop ouvertement death sont les plus pénibles, tout comme les mid tempos (Castre System, Trust) qui lorgnent trop vers le power metal pour ados en pleine rébellion testostéronée. D’une manière générale, il y a beaucoup trop de titres sur Cycles qui démarrent à fond les ballons et s’achèvent dans des plans lents et insipides ou qui se retrouvent entrecoupés par des breaks inutilement compliqués et poseurs.
En fait -et malgré justement un final lourdaud- mon titre préféré est Blind, une courte poussée hard core/crust avec un solo de guitare ridicule, un titre comme Disfear a été incapable d’en faire sur son dernier album. Egalement au palmarès, Deceit est la vraie réussite formelle de Cycles, un titre à la fois crust, grind et technique, preuve que Rotten Sound était bien capable d’y arriver. Corponation et sa fausse simplicité linéaire ne sont pas mal non plus, surtout le chant moins aboyé et plus tordu/acide qu’à l’accoutumée.
C’est sûrement la limite du genre que de s’enfermer dans l’impasse de la technicité, de la production rigoureuse et des riffs au rendement, l’année dernière les suédois de Coldworker se sont largement fourvoyés dans cette voie. Moi je préfère les groupes qui prennent la direction opposée, celle de la boue, même si celle-ci est également une impasse -des groupes comme Regurgitate par exemple, des groupes qui n’apportent rien d’autre qu’un bon motif de défoulement crasseux.