mercredi 23 mai 2007

Les grosses limaces

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Non les Psychic Paramount n’étaient pas là ce soir -le batteur ayant déjà repris l’avion pour New York City- et c’est bien dommage, leur présence surprise aurait donné un petit peu plus d’épaisseur à ce concert du lundi, un concert en forme de pause après le programme chargé de la semaine précédente et avant quelques autres bonnes dates à venir -de l’avis général il faut bien remonter à la grande époque du Pezner et de sa programmation d’exception pour retrouver cette frénésie assez inhabituelle, l’avis général déclare aussi qu’après il va falloir jouer à l’escargot jusqu’au mois de septembre.
La soirée commence comme ça : je règle avec toute la mauvaise volonté dont je suis capable un conflit entre les filles, je reproche à la plus grande de bistrouiller un peu trop intensivement sa petite sœur, je ne suis pas un maître de patience et de compréhension ce soir et je râle un peu fort… Papa tu n’avais pas un concert aujourd’hui ? Qu’est ce que tu fais encore là ? A défaut de me faire rire, la malice de cette réponse me fait comprendre que ma mauvaise humeur est de trop et me voilà donc parti, rapidement même parce que je me sens fatigué.























Le concert débute avec Blue Shift c'est-à-dire huit minutes chrono de violon solo, tout en crissements et en défonçage d'archet, après le concert de Tony Conrad de la semaine dernière c’est plutôt sans commentaires. Ensuite vient le tour de Naomi : elle a fabriqué elle-même sa robe ultra courte avec de l’aluminium de paquets d’emballage, elle se trémousse et chante de la pop acidulé au vingt-cinquième degré sur une musique vaguement électro -quatre chansons, un quart d’heure, c’est une vraie performance.
Puis les Yellow Swans installent une table au milieu de la salle avec pleins de bidules dessus, sampler, table de mixage, pédales d’effet et quelques autres petits secrets dont ils vont se servir pour vriller les oreilles de la trentaine de personnes présentes. Gabriel M Saloman (guitariste et bidouilleur barbu) entame un petit discours ironique ponctué par les interjections de Pete Swanson (bricolage analogique, barbu lui aussi mais portant son éternelle casquette militaire) et nous présente toutes ses condoléances, nous aussi nous avons appris ce qu’est la démocratie mais la différence c’est qu’à chaque fois nous n’en prenons que pour quatre ans et ainsi de suite. Un buzz dans la sono surgit ce qui semble réjouir tout le monde (what’s that ? Ok, so we’ll be louder) et c’est dans la bonne humeur que les Yellow Swans entame leur court concert de noise bruitiste, quelque chose d’assez proche de Merzbow et consorts mais de moins massif, de plus aéré -la guitare, pourtant bien trafiquée, donnant un caractère assez hybride à l’ensemble. Ce concert a le mérite de me débarrasser de ma mauvaise humeur et malgré la fatigue je m’éternise un peu. En passant au retour sur la place de la gare je commence à compter le nombre de sacs de couchage étendus sur l’herbe, on dirait des grosses limaces géantes à moitié éventrées. Un, deux, trois, quatre, cinq… et j’arrête là parce qu’ils sont décidemment beaucoup trop nombreux -lorsqu’on en arrive à cette situation désespérante toute l’ironie du monde ne peut rien y changer et quatre ou cinq années cela ne doit faire vraiment aucune différence.