mardi 15 mai 2007

KTL (1et 2)

.

Qu’est ce que l’art subventionné ? Il va falloir sérieusement se poser la question avant qu’il ne soit trop tard, que le spectacle haut format et intelligent ne disparaisse des grands plateaux, que les installations sonores ne soient définitivement remplacées par les télé-crochets gazogènes, que les comédies musicales pour enfants ne supplantent les chorégraphies d’avant-garde, avant que comédiens, sculpteurs, plasticiens, musiciens, régisseurs ou sonorisateurs ne soient obligés de travailler au fast-food au bout de deux propositions d’emploi précaire par l’ANPE, avant que les marchands d’armes et autres constructeurs de maisons de maçons ne décident définitivement de ce qui est bon pour l’esprit et mauvais pour les idées.























Peter Rehberg (Pita, General magic, Rehberg et Bauer, FennO’Berg, DACM) s’est associé à Stephen O’Malley (Lotus Eaters, Khanate, Sunn O))), etc) au sein de KTL : à peine le premier album publié par Mego voici déjà le second qui débarque, il s’agit plus ou moins de la bande son d’un spectacle -disons que certains éléments du disque sont repris sur scène alors que pour KTL 1 il s’agissait d’enregistrements effectués à la même période et dans la même optique mais utilisés de manière totalement indépendante.
L’optique ? Rehberg est l’une des figures les plus intéressantes de l’electro expérimentale des 90’s et O’Malley est le bonhomme incontournable du métal immobile et du drone ésotérique donc cette réunion pouvait passer au pire pour un supergroupe à la recherche de subsides (les gens sont parfois mauvaises langues) ou au mieux pour une nouvelle aventure sonore, le truc un peu hype tout de même mais tellement bien.
Donc on ferme les yeux et on écoute ces deux disques jumeaux (mais un peu dissemblables) de tentatives atmosphériques d’industriel planant, de black métal dévertébré et d’électronique minimaliste. Cela fonctionne remarquablement bien. Je m’en fous un peu (beaucoup) de savoir que tel titre a été enregistré pendant une tempête dans le sud de la France et que tel autre illustre je ne sais quel propos extérieur (d’ailleurs ce Kindertotenlieder/Songs Of The Death Of The Children a-t-il un rapport direct avec Gustav Mahler et Friedrich Rückert ?). La guitare de O’Malley surgit en douceur au cours du premier album -et imprime sans hésiter son empreinte quasiment métallique au milieu des dispositifs de Rehberg- au point de définir un caractère ascensionnel mais dont le paroxysme nous est fort justement épargné alors que le second disque, très beau, se place plus sur le terrain de la divagation, là aussi inachevée. Une musique de spectacle -c’est vrai et cela se sent- mais après tout peu importe puisqu’elle se suffit à elle-même.