A une certaine époque – celle de Turbo Mattress (2003) et d’A Rare Sensation (2004) – The Chinese Stars était le rejeton le plus prometteur de toute la descendance officielle et légitime d’Arab On Radar (lesquels viennent de se reformer eux aussi…), bien meilleur en tous les cas que Made In Mexico. Ça c’était avant. Parce que tant qu’à faire, et masochisme aidant, je préfère désormais le jusqu’au-boutisme d’un Athletic Automaton. Les paillettes ça m’emmerde, les chemises hawaïennes et les golden showers également, et patatra, il ne fallait pas plus d’un disque très moyen de la part des Chinese Stars, Listen To Your Left Brain (sorti en 2007 à la fois par Three One G pour le CD et par Skingraft pour la version vinyle), pour que le groupe passe de la catégorie amuseurs de première classe à celle de relous ventripotents et avachis. Pas de pitié pour la vieillesse ennemie.
Heaven On Speed Dial a été publié en 2009 par Anchor Brain records dont il est au passage la toute première référence (ABRN 001). Anchor Brain est un jeune label de Providence* qui a également sorti l’album de la reformation des Six Finger Satellites, reformation conduite d’une main de fer par le vétéran et membre d’origine Rick Pelletier, du coup démissionnaire des Chinese Stars – est ce que tout le monde suit ? Rick Pelletier, ses tatouages et son gilet en cuir sans manches n’était pas pour rien dans le son des Chinese Stars, cette basse groove, grasse et sexy comme la mère on ne peut plus enculable de ton meilleur pote de lycée c’était lui. Heaven On Speed Dial a longtemps été annoncé comme épuisé par le label, le disque était même à peine sorti qu’il était déjà réputé sold out, et heureusement que les mp3 et le peer to peer existent en ce bas monde parce qu’ainsi on avait pu se rendre compte que ce troisième LP était non seulement bien supérieur à son triste prédécesseur assoupi mais qu’il n’était pas loin d’être carrément le meilleur de tous les enregistrements des Chinese Stars.
Un miracle n’arrivant jamais seul, Heaven On Speed Dial est à nouveau disponible en support physique**, Anchor Brain s’étant même fendu d’une inutile édition CD. Rabbit Face, turgescence speedée qui ouvre l’album, est un véritable brûlot et le digne héritier du meilleur PiL, celui d’Annalisa auquel il fait immanquablement penser. Le reste de l’album, s’il est moins frénétique, reste du grand Chinese Stars. V. Von Ricci – qui assurait les parties de claviers sur scène avant le départ de Rick Pelletier et qui depuis le remplace également à la basse – s’en sort très bien question groove (No Car No Blow Job, tout simplement imparable, Slow Children, encore un hit) et les synthétiseurs, omniprésents et baveux sur Listen To Your Left Brain, sont bien moins en avant sur Heaven On Speed Dial, raccourcissant les franges des vielles putes chinoises à un niveau nettement plus supportable. A propos de ces lignes de basses bourgeonnantes et electro, je me demande même si certaines d’entre elles n’ont pas été directement exécutées au clavier. Enfin bref. La deuxième face de Heaven On Speed Dial contient également son lot de tubes, du plus vicieux (Thanksgiving Day Massacre ou House Is Burning, sur lequel le chant d’Eric Paul fait plus que jamais penser aux cris d’un cachalot victime d’un harponneur proctologue) au plus sexuel (Kill Me With Your Conversation et son riff aussi tordu qu’un sauceur de sanisettes et Lick It Clean qui donne la bave aux lèvres). Bicycle, plus anecdotique, est un court hommage funèbre aux amateurs de pédales qui se transforment en danseuses à la moindre occasion. Avec Heaven On Speed Dial The Chinese Stars remonte donc dans le haut du tableau, celui que le groupe n’aurait jamais du quitter. On espère aussi un retour forcément triomphal sur scène et, promis-juré-craché, je ne dirais plus jamais de mal des chemises à fleurs. Jusqu’à la prochaine fois.
* j’ai lu quelque part sans pouvoir le vérifier ailleurs qu’Anchor Brain a été monté par Justin Pearson de The Locust
** aujourd’hui on ne peut que se demander si ce premier tirage fantôme de Heaven On Speed Dial a vraiment été effectif ou s’il ne s’agissait pas tout simplement là d’une blague marketing destinée à affamer un peu plus les record geeks
EDIT : le Ministère de la Propagande vient de m'envoyer le message suivant, que je reposte ici tel quel : "Anchor Brain, c'est le label d'Eric Paul (jouisseur patenté dans Arab On Radar, Chinese Stars et un mec qui a aussi des vélléités d'écrivain dans une veine Bataille, mais plus Bret Easton Ellis), pas de Justin Pearson qui s'occupe déjà très bien avec 31G"