Si j’en crois la carte postale* (?) qui accompagnait l’envoi de ce disque d’Aerôflôt, un groupe originaire de Bordeaux, Disco Negro a été publié en mars 2009. Je me demande bien** ce qui a pu pousser le groupe, son manager, son attaché de presse, son politburo ou plus simplement son label Datcha Discos à m’expédier plus d’une année après la bataille ce disque promo. La musique n’attend pas ? En ces temps de profusion à outrances et d’immédiateté quasi obligatoire il ne faut pas non plus perdre de vue – outre qu’un disque ne s’écoute pas forcément n’importe quand ni dans n’importe quelle condition et que l’attente peut rendre les choses bien meilleures encore – que la musique n’est pas ce produit jetable et consommable dans la minute (maintenant que tu peux télécharger n’importe quelle bouse à partir d’un téléphone portable tu sais aussi pertinemment que l’Apocalypse est aussi proche qu’irréversible). L’actualité, donc, on s’en fout aussi un peu beaucoup, et à ce titre la personne qui m’a envoyé ce disque a très bien fait. Elle a d’autant bien fait qu’en plus Disco Negro c’est presque le flash intégral.
Il ne m’a en effet pas fallu beaucoup d’écoutes pour me persuader que les dix titres composant Disco Negro sont autant de hits electro rock sautillards avec option putasse dance, drivés par des rythmiques discoïdes pour punks déconcentrés et soulignés par un Moog omniprésent et virevoltant. Une telle déferlante et une telle profusion d’instinct de vie c’est peut être même un peu trop : de quoi transformer le tapis du salon, le carrelage de la cuisine ou le pieu dans la chambre en piste improvisée de danse – aillaïketoumouvitemouvitemouvite, attends un peu que je reprenne mon souffle entre deux titres, que j’aille boire un godet rafraîchissant mais non pas le temps, on enchaîne. Aucun temps mort de Volcano à Für Zimmer, mais du brassage post punk irrésistible et robotique à l’occasion, ce son dantesque***, ces synthés accroche-cœur, ces lignes de basse groove as fuck, cette charley qui déhanche, ces guitares incisives (oui, quand même) et ce chant presque martial et judicieusement rare. Quelques plages (Sorry) ralentissent légèrement le rythme mais le contre effet n’en est que plus pernicieux : Aerôflôt c’est aussi le ver dans la pomme, le vice dans ta vertu, un doigt dans ton cul (oui mais tu aimes ça). Disco Negro est donc l’une des exceptions qui confirment la règle : contrairement à ce qui est dit un peu plus haut, ce disque fait partie de ceux qui peuvent s’écouter n’importe où et n’importe quand. Le nier c’est être sourd et/ou psychorigide.
* c’est amusant cette carte postale : dessus il y a le logo de la Ferarock et ça m’a rappelé l’époque où, membre d’une radio associative, j’avais insisté avec quelques autres animateurs bénévoles pour que notre radio quitte cette structure le plus rapidement possible parce que nous ne comprenions pas son optique fonctionnariat du rock franchouillard
** j’ai quand même une petite idée à propos de cette Bordeaux Connection, merci
*** Disco Negro a été enregistré par le grand manitou Stefan Krieger dans ses studios Amanita