dimanche 3 février 2008

Biosphere réédité par Beat Service

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A chaque fois que l’on évoque devant moi le nom de Biosphere je ne peux pas m’empêcher de rire en repensant à ce concert de Bel Canto -un groupe ersatz de Cocteau Twins en version new age- pendant lequel un type s’escrimait à jouer des percussions sur un genre de poteries tandis qu’une chanteuse vocalisait en chemise de nuit et qu’un deuxième type balançait des sons gentiment glaciaux -ce dernier n’était autre que Geir Jenssen, alias Biosphere.
Depuis ces débuts ridicules (mais ce n’était pas vraiment de sa faute, du moins s’en est il rendu compte très vite puisque il a quitté Bel Canto au bout du deuxième album) Geir Jenssen s’est lancé dans des projets nettement plus atmosphérique, a pratiqué le field recording et est devenu une référence de l’electro ambient, genre facilement ennuyeux mais dans lequel Biosphere a su tirer son épingle du jeu en insufflant toujours un soupçon de mouvement à des compositions qui réussissent à la fois à être imagées et froides -le garçon est norvégien je le sais mais je ne vais pas en profiter pour m’embarquer dans les habituelles métaphores pour décrire sa musique bien qu’il soit exact que des albums tels que Cirque (2000) possèdent fortement un goût de fjord (sans sucre ajouté), de permafrost et de banquise qui fond.




















Le label norvégien Beat Service vient de rééditer les premiers travaux de Jenssen sous le nom de Biosphere, à savoir Microgravity (1991), la bande originale du film Insomnia (1997) et surtout l’album Patashnik (1994), connu du grand public pour contenir le titre Novelty Waves ayant servi aux alentours de 1995 de support à un spot tv pour une marque de jeans tellement célèbre qu’elle fait coudre ses pantalons par des petites mains indiennes ou chinoises, le libéralisme est un exotisme ou quelque chose comme ça. Novelty Waves est un bel exemple de techno minimale du début des années 90, l’archétype du genre étant représenté par les trois premiers albums de Riou chez Kk records, avec toutefois un côté racoleur assez prononcé -la ligne de basse et sa pétomanie acide, les interventions mélodiques sans surprise, les cassures de rythmes qui relance la machine- et sans l’intransigeance ascétique qui transforme l’envie de danser en mécanique de hachoir.
Cet album, un peu trop marqué par son temps donc, n’échappe pas aux sonorités désuètes (Patashnik) ou à l’utilisation abusive des samples de voix et ce sur quasiment tous les titres, façon musique industrielle sans imagination. Par contre il préfigure un peu les ambitions futures de Geir Jenssen : rythmes ralentis voire cotonneux et dub (The Shield), tentatives d’épure des compositions, prismes sonores déformants (Botanical Dimensions et le très bon Caboose avec ce bourdonnement de basse). Mais il retombe bien vite dans le kitsch electro et la musique d’ambiance pour voyage en voiture de luxe (Seti Project). Au final, et malgré les gratouillis de guitare de En-Transe, c’est l’aspect sautillard et dancefloor intello dont on se souvient le plus, pas l’esthétique de la nature des travaux suivants de Biosphere, ni les mouvements pendulaires cryogènés pour amateurs de tisane en mal de sensations lysergiques.