jeudi 4 septembre 2008

Baygon vert ou Baygon jaune ?






















Je ne suis pas un si mauvais cumulard : je m’étais concocté un programme de ministre des affaires sociales et du temps perdu pour la fin de journée du mardi 2 septembre et j’ai plutôt bien fait. Après une rentrée des classes rapidement torchée et une journée passée à ne rien faire, rendez-vous dans un bar de la branchitude croix-roussienne avec deux camarades houblonneurs -les deux ou trois sujets de conversation qui s’imposent concernent bien évidemment le cul et surtout la musique alors que la bière coule à flots (je me bouche les oreilles dès que le match O.L./A.S.S.E. du dimanche soir est évoqué mais je ris quand même sous cape de l’infortune des perdants). Le mardi c’est permis. Je préviens qu’il est hors de question pour moi de ne pas aller au concert de The Locust, c’est un peu la rentrée ce soir, et surtout pour rien au monde je ne voudrais non plus faire l’impasse sur Fat 32, un impressionnant duo local de bordel organisé.

















 


Comme à leur habitude, les deux Fat 32 jouent par terre, devant la scène. Le seul moyen de les voir et de les entendre correctement c’est donc de se placer tout devant ou bien de monter sur la scène. C’est là que je me retrouve pour admirer une performance du groupe encore meilleure que celles auxquelles j’ai déjà assistées. Le paysage est plutôt pas mal, vu sous cet angle, avec ses piliers et son plafond en béton la salle ressemble à une vieille friche industrielle, on s’y croirait.
Fat 32, si je ne m’abuse, est une énième émanation du collectif Undata et consiste en un duo clavier/batterie spécialisé dans la haute voltige free et les cabrioles cartoonesques. C’est évidemment très influencé par le Fantômas de Mike Patton (sans guitare et sans basse) mais oserais-je dire que c’est bien mieux ? Oui, allez hop, j’ose. Voilà ce que l’on pourrait appeler du game core de grind boy: c’est ludique à s’en faire péter la sous-ventrière, c’est incroyablement fluide, sûrement très technique mais on a du mal à s’en rendre compte devant tant d’entrain infernal et de joie de vivre. A la tienne. Il semblerait que les sons utilisés par le garçon aux claviers aient un peu durci, le côté -hum- festif est toujours là mais rien de vulgaire ici -malgré le recours à quelques ritournelles mondialement connues pour faire monter la sauce- et je suis donc définitivement conquis par la déferlante de rythmes et de sons tordus. Anecdote people n°1 : le batteur s’est fait couper les cheveux et cela lui va très bien. Anecdote people n°2 : lorsque le lendemain matin à l’heure du petit déjeuner j’ai raconté ce concert, la première réaction familiale autour de la table a été Fat 32 ? on dirait le nom d’un groupe de rap. Ouais, c’est bien le seul défaut que je trouve à ces mecs.
















 

C’est la pause clope et bière en extérieur, non pas parce qu’il est strictement interdit de fumer entre les murs mais il règne une chaleur tellement intense là dedans que même sans bouger n’importe qui se met à suer. Comme à mon habitude je me suis à nouveau transformé en gros monstre puant, cet air frais et cette bière un peu éventée me font le plus grand bien.
J’apprends que j’ai raté le premier groupe et que le premier groupe n’était autre que Radikal Satan (pour se faire une idée de la musique de ces argentins expatriés, autant aller du côté des Potagers Natures ici, et ) accompagné d’un chanteur néerlandais (?)
Austin Townsend -j’ai alors quelques regrets, éphémères et vite effacés par la sévère bandaison que vient de me procurer Fat 32, oui je me répète. Place au troisième groupe de la soirée, Warsaw Was Raw, un trio français qui a effectué toute la tournée avec The Locust et dont le très bon label Rejuvenation records s’apprête à sortir un CD 3 pouces (ou un EP pour les accros du vinyle). En plus d’être les rois du jeu de mot contrepétrique Warsaw Was Raw est doté d’un batteur énervé, d’un guitariste énervé et d’une chanteuse ultra minijupée et (très) énervée. Le groupe joue sur la scène comme pour de vrai, du coup l’ambiance change avec cette vue imprenable sur un faux plafond en polystyrène ou autre, on se croirait dans une vieille salle des fêtes perdue dans une ZUP délaissée par toute forme de progrès social. Musicalement Warsaw Was Raw serait plutôt du côté d’un hard core à la fois grind et crust, ça joue très très vite, les titres sont très très très courts mais il est difficile de se faire une bonne idée parce que le concert dure à peine plus de dix minutes (allez, un quart d’heure), tout juste le temps de prendre trois photos du groupe et de retourner s’aérer une nouvelle fois avant l’arrivée des stars de la soirée.





















Dire que j’avais longtemps à l’avance noté ce concert sur mon petit calendrier (à la date du 2 septembre : The Locust) en étant persuadé que j’allais assister à un concert de Lightning Bolt. C’est ce qui s’appelle prendre ses désirs pour des réalités, j’ai même balancé sur un site/forum la (fausse) venue du couple Chippendale/Gibson, haha, quel con. A ma décharge je pourrais préciser que je suis autant fan de Lightning Bolt (qui viendront tout de même en France au mois de novembre) que The Locust me laisse froid. C’est comme ça. Depuis la découverte des fêlés de San Diego sur un split single partagé avec les trop regrettés Arab On Radar je n’ai jamais été séduit plus que ça par leur grind noise bontempi, préférant même les premiers disques aux plus récents, trop laborieux.
Nos quatre sauterelles déjà en tenues de combat ne mettent pas longtemps à s’installer, ça sent le professionnalisme et la quadrature logistique. A peine le premier titre interprété -que dis je, les premières notés jouées- le public se soulève en une grosse vague mouvante et virulente, qui a dit que la jeunesse de ce pays n’aimait pas le sport ? La musique de The Locust se prête au défoulement, violence lourdement intense malgré le fait que le groupe assaisonne le tout de plans tordus et de breaks improbables et joue plutôt sur le format court (un titre, moins d’une minute). C’est très bien mis en place même si on sent que The Locust se repose parfois complètement sur des automatismes.
Je m’amuse plutôt malgré les coups que je reçois de la part de quelques agités du slam (difficile de parler de stage diving lorsque la scène mesure à peine quarante centimètres), le batteur -placé devant parce que The Locust joue en ligne- réclame un peu de compréhension, arrêtez de sauter sur ma grosse caisse les gars, ça dérègle mon jeu de double pédale, le célèbre bassiste/chanteur Justin Pearson exhibe un instrument tout de plastique transparent et très laid dont il se sert avec une dextérité certaine, le guitariste n’est pas en reste, il n’y a que le clavier/bidouilleur que l’on entend pas assez, sauf vers la fin du concert lorsqu’il se décide à envoyer une fréquence continue plutôt désagréable alors que ses collègues font eux silence. Mais n’est pas Merzbow ou Karkowski qui veut. Je décroche de ma place au premier rang à la moitié du concert (plutôt inhabituellement long pour The Locust : au moins quarante minutes) pour suivre la suite des évènements de plus loin parce que même si j’aime la violence musicale et l’hystérie électrique je déteste le sport et The Locust me fait penser à des athlètes performers dopés à la coke diluée dans du Red Bull. Amusant mais lassant. Ovation de fin de show, le public est content, il a eu ce qu’il voulait. Une conversation me confirme qu’il n’y aura pas de concert des Melvins à Lyon cette année encore et que la date prévue pour Flipper est quasiment annulée. Shit happens comme dirait l’autre.