Je n’aurais jamais cru que le label anglais Touch allait un jour se remettre à presser du vinyle et bien si, et des petits formats qui plus est, du 17 centimètres qui tourne en 33 tours, c'est-à-dire des jolis objets avec une bonne qualité de pressage et une dynamique correcte. Vu le caractère expérimental/électro cérébral de la musique habituellement proposée par le label, un tel format n’était peut être pas ce qui convenait le mieux pour un rendu maximum (dès fois le support digital, cela a du bon…) mais les deux exemples que j’ai pu avoir sous les oreilles -un single de Chris Watson et un autre de Christian Fennesz- sont plus que convaincants.
Ash International, label petit frère de Touch, propose lui aussi des singles vinyles comme le dispensable hymne du royaume virtuel d’Elgaland Vargaland -fondé le 14 mars 1992 par les musiciens Carl Michael von Hausswolff et Leif Elggren- interprété selon la version par d’obscures formations mariachi ou klezmer, c’est quand même très drôle parce que parfaitement inutile. Pour les amateurs de davantage de consistance, le dixième anniversaire de la fondation de ce royaume a entre autres été l’occasion de la publication d’une compilation sous la forme d’un double CD et regroupant la plupart des artistes/musiciens de la nébuleuse Touch/Ash Intetnational, de Jim O’Rourke à Ryoji Ikeda, de Mika Vaino (Pan Sonic) à Oren Ambarchi…
Mais revenons à cette série de singles produits par Touch et intitulée Touch Seven. La première référence à avoir été publiée (TS02) est donc Chris Watson. Fennesz (TS04) a suivi de près. Au mois de mars paraîtra un split single Fennesz/Philip Jeck (TS01) alors que la référence TS03 (deux titres inédits de AER) est prévue pour le mois de mai. Oren Ambarchi et Mika Vainio sont les suivants sur la liste.
Ecouter un field recording de Chris Watson -pour mémoire : un ancien Cabaret Voltaire et un ex Hafler trio- est toujours un moment émouvant. Non seulement le choix de ce qu’il a décidé d’enregistrer est régulièrement étonnant voire déroutant mais Watson s’est attelé aux techniques de captation du son en milieu naturel avec une force et une volonté singulières non dénuées d’un sens de l’abstraction qui transforme régulièrement le résultat obtenu en un équivalent de la musique concrète (dans le sens de Pierre Schaeffer) violemment poétique et crue. Les deux titres présents sur ce bout de vinyle et enregistrés du côté des îles Galapagos n’échappent pas à cette impression fugace. A noter que sur chacune des deux faces le sillon est fermé.
Le single de Christian Fennesz est lui annonciateur d’un nouvel album à paraître au printemps 2008 -ça c’est de la bonne nouvelle. Ces deux titres (auxquels il faut ajouter un single digital, hum, intitulé On A Desolate Shore A Shadow Passes By) devraient rester inédits et développent l’univers habituel de Fennezs, amoureux de guitares bidouillées, filtrées, tamisées, manipulées, transformées et tout ce qu’on voudra, ce single est fait pour vous. La face B, avec son attaque à la guitare clairement identifiable, est la plus convaincante. Le brouillard électronique cher à Fennesz accompagne de manière fantomatique les quelques notes maladroites qui s’échappent des cordes de l’instrument, c’est un peu comme être dans la tête d’un guitariste assoupi et qui commence à rêver. A l’inverse du disque de Watson, celui de Fennesz est frustrant : un petit côté inachevé peut être, pas assez de développement, de temps ou d’espace pour avoir l’opportunité de rêver aussi. Vivement l’album.