Aoûtat :
encore un disque de saison. Même si celui-ci a été publié en plein hiver. Un
hiver beaucoup plus long et beaucoup plus merdique que d’habitude, ce qui a eu
pour principale conséquence de retarder d’autant l’envol d’Aoûtat au pays des rêves et en compagnie de mon petit cœur
desséché. On ne peut pas écouter LE SINGE BLANC n’importe quand, à n’importe quelle occasion ni dans n’importe
quelle position. C’est que la banane turgescente a ses exigences et ses
impératifs. Et que si vous vous retrouvez la tête en bas et la queue entre les
jambes et bien tant pis. Parce que Le Singe Blanc, lui, bande sévère et
longtemps.
Le trio a fêté ses dix ans en 2010, Aoûtat est le septième album du Singe
Blanc et rien n’a réellement changé ici. Toujours la même folie rythmique,
toujours les mêmes deux basses – en général il y en a une qui assure le
terrassement tandis que l’autre s’occupe des finitions mélodiques mais toutes
les deux s’accordent à saccader comme des folles –, deux basses qui tricotent
du poil de guenon avec une dextérité à en rendre jaloux NoMeansNo, les Ruins et
Sabot réunis et toujours un chant à trois voix (et parfois plus parce qu’il y a
des invités sur Aoûtat), des voix qui
borborygment, crachouillent, éructent, ricanent, gargarisent… Sur Aoûtat on croit pourtant déceler
quelques mots pour de vrai, des bouts de phrases qui pourraient signifier
quelque chose, c’est peut être enfin le miracle de l’évolution. Mais le reste
du temps les égosillements animaliers du Singe Blanc restent parfaitement
inintelligibles bien que toujours aussi signifiants : cette fureur et cette
folie, il faut qu’elles sortent et il faut surtout les faire partager.
Le Singe Blanc est aussi à l’aise dès qu’il s’agit
de groover comme une cocotte-minute que lorsqu’il faut pétarader sèchement, à
la punk. Mais dans tous les cas le trio ne perd pas de temps et donc n’en fait
pas perdre à l’auditeur : pas de redites inutiles, pas de branlettes
molles, pas de remplissages d’anus artificiels, autrement dit Le Singe Blanc
sait ce qu’il veut. Et ce qu’il veut c’est faire danser les débiles-mentaux,
les minets hypeux de vingt ans qui pensent découvrir la vie, les quarantenaires
psychorigides, blasés et revenus de tout et les vieux dans les hospices – même
les imbéciles-heureux devraient pouvoir y retrouver leur compte. Quand on aime…
Et avec Aoûtat on aime plus que
jamais Le Singe Blanc : ce septième album est le moins intentionnellement
tordu du groupe, il est le plus évident parce que le plus mélodique (il y a
même Mr Marcaille – également dans le rôle de l’ingénieur du son et du
robot-mixeur – qui a posé quelques crottes de violoncelle) et, presque paradoxalement,
il est le plus intensément débile et le plus instantanément jouissif. La banane
je vous dis.
[Aoûtat est publié en
CD et vinyle par Aredje, Et Mon Cul C'est Du Tofu ?, La Face Cachée, Musica Per Organi Caldi et Whosbrain records ; le LP est
absolument superbe dans sa pochette qui se déplie en trois volets pour laisser
apparaitre un très chouette artwork signé Lilas ; signalons enfin que ce
n’est pas la peine de chercher sur internet une version piratée et pleine
de mp3 dégueux d’Aoûtat : le disque
est également disponible en téléchargement libre et gratuit]