vendredi 2 août 2013

The Body / Master, We Perish




THE BODY n’avait pas donné beaucoup de nouvelles depuis l’album All The Waters Of The Earth Turn To Blood (2010). Un album réussi en collaboration avec Braveyoung et un split single en compagnie de Whitehorse ont été publiés l’année suivante mais après, plus rien. Deux années de silence. The Body est enfin de retour avec un mini album, Master, We Perish, toujours publié par At A Loss Recordings et, malgré un nom digne d'un boys-band de front-wave bretonne ou de garage-rock parisien, le groupe de Portland n’a définitivement rien perdu de sa superbe.
On se contentera donc des trois titres de Master, We Perish, trois titres qui concentrent et poussent encore plus loin la logique de construction/déconstruction mise en place sur les enregistrements précédents de The Body – on rappellera qu’un groupe capable de mettre des chants grégoriens (?) sur un album sans avoir l’air ridicule et capable également de faire des reprises aussi bien de MDC que de Judas Priest ou de Sinead O’Connor n’avait pourtant plus rien à craindre de personne –, trois titres sur lesquels le groupe joue toujours plus avec les possibilités d’un studio high-tech et d’un enregistrement moderne enfin maitrisé à bon escient.
Le metal plombé, infernal et grésillant de The Body a en effet tout de l’objet construit : manipulations sonores et samples sont la panacée du duo contre l’ennui et le manque flagrant d’originalité du metal moderne. Nos deux compères – Chip aux guitares et à la voix et Lee à la batterie et aux samples, non cela ne s’invente pas – font en quelque sorte preuve du même genre d’inventivité qu’un JG Thirlwell/Foetus en mélangeant les genres, en brouillant les pistes et en intercalant sans cesse des éléments inhabituels sauf que The Body se contente, si on peut dire, d’appliquer ses petites recettes alchimiques à un metal fortement teinté de doom et de sludge et donc ravalé au vitriol comme à la sauce expérimentale.
Avec Master, We Perish The Body réussit là où tant de groupes se cassent invariablement la gueule, par exemple l’insupportablement boursoufflé Gnaw Their Tongues ou les irlandais d’Altar Of Plagues avec leur ultime album, le complètement raté Teethed Glory And Injury. Et si The Body ne se trompe pas de chemin, c’est parce que bien que pensée, bidouillée et reconstruite, la musique du groupe reste absolument humaine c’est-à-dire – puisque on parle de metal – braillarde, sale et malsaine. Il y a des jours où je suis même carrément persuadé que Chip et Lee sont deux petits génies, des génies du mal, évidemment. Mais ils s’en foutent, ces rednecks préfèrent astiquer et graisser leurs armes à feu puis poser sur des photos avec leurs guns. Pourtant ils n’ont pas leur pareil pour faire peur aux gens avec leur musique – car il est difficile de ne pas chier dans son froc en écoutant Master, We Perish.