vendredi 8 juin 2012

Horseback / Half Blood





HORSEBACK est une une sorte d’ovni métallisé et arty lancé à la face du petit monde des hipsters et des branleurs pour lesquels les termes de black metal, de doom et de drone sont synonymes de nec plus ultra en matière d’ésotérisme musical à vocation expérimentale. The Invisible Mountain était plus qu’une bonne surprise, presque un choc ; The Gordon Tongue, jouant la carte de la différence avec son prédécesseur, confirmait malgré tout tout le bien que l’on pensait du groupe de Jenks Miller ; seul A Throne Without A King en collaboration avec les affreux Pyramids est apparu comme une impardonnable zone d’ombre entachant un parcours encore limité mais que l’on osait jusque là espérer sans faute de goût.
Alors la seule chose dont on peut être certain au sujet de Horseback/Jenks Miller c’est que le bonhomme a cette volonté de ne pas se répéter à tout prix. Les trois premiers disques de Horseback ne sont réellement liés entre eux que par le nom du groupe imprimé sur la pochette et l’engouement arty-prout qu’ils suscitent toujours. Il en va de même avec Half Blood, nouvel enregistrement d’Horseback publié par Relapse records au début du mois de mai 2012. Un album qui plus que jamais plaira aux métalleux à mèche et à lunettes.
Half Blood se divise distinctement en deux parties. La première, composée de quatre titres, dévoile une inspiration bluesy/americana/roots un rien apprêtée ; la seconde, clairement définie comme telle sous l’appellation d’Hallucigenia, est plus difficile à cerner et plus ambient/expé. Si on aime Half Blood c’est d’abord pour cette première partie et les titres Mithras, Ahriman et Arjuna tous calqués sur à peu près le même modèle c'est-à-dire un riff tournoyant, une rythmique mid-tempo et inamovible, quelques soli de guitare façon tronçonneuse au clair de lune et un chant de troll shooté au sirop expectorant et au suppositoire à la codéine – une démarche minimaliste et répétitive qui n’est pas sans rappeler celle qu’Hallowed Butchery avait tenté avec le titre Hexagram : The God Of Self sur le split Songs Of Self Reliance And Solitude As Performed By The Austrasian Goat And Hallowed Butchery. La musique de Horseback se révèle toutefois beaucoup plus mélancolique que malsaine et le semi instrumental Inheritance (The Changeling) fait souffler un très agréable vent post tempête dans les forêts du grand nord. Que la lumière soit.
La lumière, ce pourrait être les trois parties d’Hallucigenia, longue suite très cinématographique et spectrale qui ne fera vraiment peur qu’aux aficionados du Seigneur Des Anneaux et autres diableries préadolescentes. Sur cette seconde partie Half Blood déçoit un peu, d’autant plus que l’on pressent que Jenks Miller aurait voulu que celle-ci soit la pièce centrale de son nouveau disque. On apprécie le tour de main, on se rappelle nos plus belles années gothiques et/ou nos premiers émois kraut mais on n’est pas plus emballés que ça, comme si on regardait un film de vampires marketé pour jeunes gens beaucoup trop romantiques et dans lequel les créatures de la nuit seraient tout sauf sanguinaires, violentes, sexuelles, sadiques, torturées, ambivalentes et destructrices quoiqu’il arrive. Keine Schönheit Ohne Gefahr murmurait Blixa Bargeld sur l’un des plus beaux titres d’Einsturzende Neubauten : « pas de beauté sans danger », c’est très exactement le gros problème du triptyque  Hallucigenia. Tant pis.