vendredi 27 juillet 2007

Noxagt vs Ultralyd


La première fois que j’ai écouté ce disque d’Ultralyd j’ai vraiment été décontenancé (déçu ?) par ce que j’ai entendu, je m’attendais à du charpenté et du granitique et je me suis retrouvé avec du lent aéré, du lourd troué, du bruit espacé, du silence même parfois. L’erreur que je faisais s’explique facilement : dans Ultralyd on retrouve le bassiste Kjetil D. Brandsdal et le guitariste Anders Hana, tous deux membres de Noxagt. Ces deux groupes ont même un split album en commun et leurs autres enregistrements sont sur Load records, label spécialisé dans la charcuterie cloutée et la vulcanologie binaire. J’avais donc fini par identifier les deux groupes jusqu’à les confondre, sans avoir la moindre idée d’ailleurs des premiers enregistrements d’Ultralyd, et comme aujourd’hui ceux-ci ont publié Conditions For A Peace Of Music chez Rune Grammofon je comprends mieux mon erreur -le coup du fantasme musical cela ne marche pas toujours, il faudrait que je m’en souvienne un peu plus souvent.

L’histoire est finalement très simple : à l’origine il y avait dans Nogaxt un violoniste (alto) qui a été remplacé par le guitariste d’Ultralyd. Sur le troisième album de Noxagt (sans titre mais avec une magnifique culotte) la musique du groupe a donc légèrement changé : moins de particularisme, lié au violon, mais plus d’efficacité et de rentre-dedans. En concert Noxagt c’est de la rythmique avant tout, le bassiste Kjetil D. Brandsdal -qui par ailleurs publie des enregistrements solo sur Ecstatic Peace !, le label qui édite des disques souvent inécoutables mais que tout le monde achète quand même parce qu’il s’agit du label de Thuston Moore- dirige tout le monde avec un son de basse pachydermique et est courageusement épaulé par un batteur galérien. A côté il y a donc désormais Anders Hana, petit prince blondissime à tête d’ange qui énumère ses arpèges comme autant de comptines acides : Noxagt c’est la brutalité d’un écrin rythmique offert à une mélodie dévoyée, à la fois éprouvant (ils jouent vraiment très fort) et captivant.
Ultralyd c’est tout le contraire. L’album débute avec Saprochord qui séduit par les résonances profondes émises par des toms basses frappés vigoureusement mais le titre, passé cet élément de lourdeur, est incroyablement aérien, quelques notes lointaines de saxophone, du xylophone, peut être de la scie musicale, de la bidouille dans le fond à gauche et c’est tout. Lorsque guitare et basse apparaissent pour de bon sur les morceaux suivants ce n’est jamais de manière frontale (pas à la Noxagt, donc) mais sous forme de distillation, de suintement, d’un lent écoulement. Ultralyd voudrait faire du post rock de vikings -du Tortoise mais avec le crâne fendu rempli de calva et la langueur pâteuse qui va avec- que cela ne m’étonnerait pas sauf que de temps à autre une ligne de basse (Low Waist) ou une pantomime free (Musica Imerativa) donnent des remontée acides à l’auditeur et le plonge tête la première dans le bouillonnement de ces débordements gastriques : l’effet est bénéfique, ainsi le calva narcotique ne se transforme pas en calvaire soporifique et le morceau suivant peut tranquillement renouer avec les rossignolades du saxophone, les larsens électroniqués de la guitare, le xylophone étoilé et pleins d’autres sonorités inidentifiables à moins d’être le Bernard Pivot de la syntaxe auditive, un sale boulot quand même.
[pour réviser son vocabulaire : Noxagt vs Ultralyd]