mercredi 12 novembre 2008

Agathe Max / This Silver String






















D’abord annoncé pour le mois de juillet 2008, Table Of The Elements a publié This Silver String en octobre. Un CD tout sobre avec un joufflu décoratif en guise d’illustration et le nom de l’artiste : Agathe Max. En y repensant, c’est assez incroyable qu’un label aussi prestigieux et abritant des musiciens aussi essentiels que Tony Conrad, John Fahey, Rhys Chatham, Oren Ambarchi, San Agustin, Eliane Radigues, Neptune, Zeena Parkins, Arnold Dreyblatt, Faust, Keiji Haino, Pauline Oliveros, ou Gate (j’arrête là l’énumération sinon cela va devenir fatigant) accueille à son tour la jeune musicienne. C’est à l’une des nombreuses signatures prestigieuses du label, Jonathan Kane -premier batteur des Swans, il a joué avec le gang new-yorkais jusqu’à l’album Filth mais a également été batteur pour Chatham ou La Monte Young avant de se lancer dans une carrière de bluesman grassy et minimaliste- que l’on doit les quelques mots imprimés sur l’autocollant apposé sur le disque par Table Of The Elements, pratique à l’usage de celles et ceux qui aiment acheter leurs disques sur la seule foi d’un nom de label et/ou d’une recommandation de la part de quelqu’un de déjà connu. Il est écrit : Agathe Max delivers a drone to keep the earth turning on its axis, with a keen and romantic sense of swing. Everything you need to have a good time. C’est bien gentil tout ça mais aussi terriblement impersonnel. Cela veut dire quoi passer un bon moment en écoutant un disque ? Jonathan je crois que tu ne t’es pas trop foulé sur ce coup là.
On jette l’autocollant à la poubelle en même temps que le blister. Et on écoute ce disque qui devient très rapidement addictif. Le descriptif technique de la musique d’Agathe Max est étonnamment simple : un violon, des boucles, du delay et de la distorsion. Le résultat est autrement plus sophistiqué et surtout il est captivant de bout en bout. J’ai d’abord été surpris par la richesse mélodique (sur le morceau titre, This Silver String, mais également sur le dernier, Black Needle, et finalement à force d’écoutes sur l’ensemble du disque, qui n’en finit pas de dévoiler ses secrets) parce qu’en concert j’ai toujours eu l’impression qu’Agathe Max jouait davantage sur les chocs, les stridences, les confrontations de boucles pas réellement mélodiques, que son travail était davantage axé sur la dualité répétitions/cassures, souvent proche du tremblement de terre avec toujours un côté poignant -sûrement l’effet violon, l’un des rares instruments avec le violoncelle ou le saxophone ténor qui bien joués peuvent instantanément me donner envie de chialer de bonheur. Le côté poignant. C’est celui là qui ressort en premier de cet enregistrement studio qui met en avant toutes les qualités harmoniques de la musique d’Agathe Max, son inclinaison à accompagner l’auditeur vers quelques rêveries secrètes.
On l’aura compris, ce disque est d’une beauté indescriptible, mystérieuse en ce sens qu’elle touche sans crier gare, au fur et à mesure, sans être systématique bien qu’attendue. Les titres s’étirent, pourraient donner l’impression qu’ils vont s’éteindre telle une bougie en fin de vie, mais se relancent d’eux même, fragile équilibre mélodique et répétitif où les stridences du violon s’habillent d’une grâce infinie. En écoutant This Silver Sting, on passe beaucoup plus qu’un bon moment.