lundi 21 janvier 2008

Incarceration By Abstraction

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C’est le dernier album des Flying Luttenbachers, le dernier pour de vrai, et même s’il ne faut jamais dire jamais -tout comme il est présomptueux d’affirmer toujours- cet Incarceration By Abstraction sera à jamais le testament d’un groupe unique en son genre, la créature d’un malade de musique, Weasel Walter, l’homme qui sait toujours ce qu’il veut, hum. La première écoute de ce CD a été passablement déconcertante, les suivantes également. Un vague sentiment de gêne, d’inconfort, pas ce truc qui fait mal aux oreilles mais dont on redemande parce que ça fait du bien, non… presque une impression de laideur. Allons bon. L’ennemi est vite identifié : où Weasel Walter est il allé chercher ce son de guitare ? Ce mix pourri de la six cordes ? Ces plans catastrophiques en forme de frises et de dégoulinades (sur Medusa par exemple) ? Non seulement je n’ai pas attendu la fin du troisième titre pour arrêter de compter les pseudo soli à base de guitares prog même pas dissonants ni à côtés de la plaque (si seulement…) mais quel manque également de tension et de contours anguleux ! C’est peu dire que Incarceration By Abstraction a un côté crimsonien et comme je n’ai jamais supporté ce genre de transversalité vers des
territoires trop ouvertement complexifiés et dédalesques, j’en suis donc pour mes frais. Et je ne parle même pas des synthés qui ne feraient rire que Keith Emerson.












Le premier titre, le bien mal nommé Assault On Apathy mérite une attention polie mais circonspecte : mauvaise entrée en matière, peu glorieuse, honorable mais poussive et limitant à peine la casse. Heureusement Electrocution allonge la sauce Luttenbachers d’un peu de piment, ce sax qui rugit soudain, la rythmique qui ne s’embarrasse pas du superflu ; ce titre est symptomatique aussi des sentiments mitigés que procure le disque : les efforts déployés par l’instrument à vent mentionné précédemment se retrouvent à la troisième minute laminés par un solo de guitare -décidément- grotesque et inutile, quel dommage. Triplex (dédié aux anciens compères Ed Rodiguez et Mick Barr) est l’une des principales catastrophes de Incarceration By Abstraction, Weasel Walter qui sur cet enregistrement joue de tous les instruments aurait il justement subi les mauvaises influences de Mick Barr, guitariste trop bavard auquel le destin n’a pas eu le bon goût d’ôter quelques doigts dans un banal accident de travail à la chaîne ? Et toujours ce son, ces guitares qui me pètent les oreilles mais dans le mauvais sens du terme. Pourtant le pire reste à venir sur The First Time, ultime pièce avec deux invités aux voix : Weasel Walter prouve ainsi que lorsqu’il reprenait Bohemian Rhapsody de Queen sur l’inutile et fadasse compilation Dynamite With a Laserbeam : Queen as Heard Through the Meat Grinder of Three One G, il ne s’agissait pas que d’une bonne blague destiné à faire rire les freaks.Le meilleur titre est aussi le plus court, quel monde cruel : Violent Shade renoue avec l’urgence et le désordre des Flying Luttenbachers sans s’empêtrer dans l’ostentation progressive alors que la tentation est bien là, palpable, mais Weasel Walter a su y résister, juste l’effleurer, la canaliser presque et ça passe sans problème. Si seulement tout Incarceration By Abstraction avait pu être de ce niveau, ascétisme no-wave, perruque à paillettes peut être et lustrage de manche mais pas en trop grande quantité… Mais, encore une fois, la réponse est non. Même Medusa ou Triplex comportent d’excellents passages mais le paradoxe est que ceux-ci semblent d’une incongruité totale comparés à la mélasse qui les précède ou les suit directement, quel gâchis. Il aurait mieux valu que les Flying Luttenbachers cessent toute activité avec leur album précédent, l’énorme et le beaucoup plus direct Cataclysm -pourtant avec Mick Barr à la guitare, c'est à n'y rien conprendre, hein- parce que du coup, cette fin d’histoire a le goût amère de la déception. RIP.