.
Les échos ultra élogieux d’une précédente et récente prestation de Chewbacca m’ayant fait regretter d’avoir été absent ce jour là, c’est avec impatience et curiosité que j’avais prévu de voir ce groupe étonnant et plutôt unique dès que possible et ça tombait bien puisque Chewbacca jouait à nouveau jeudi soir au Sonic, dans le cadre du festival Radical Zero. Une programmation a priori éclectique et bancale puisque proposant un solo de Damien Grange (dispositif électro-acoustique), Jacques Di Donato trio (musique improvisée) et Chewbacca, donc (pipo bimbo braillard, grind-hop et poésie hard core) ; une programmation à l’arrache et à un prix moindre que celui des autres soirées Radical Zero.
On ne présente plus Jacques Di Donato, vieux barbu de l’improvisation en France, ancien soliste de tel orchestre réputé, prof à ses heures et ponte du mouvement des artistes subventionnés. Je voyais sa présence en milieu de programme comme une éventuelle pause clope sous la pluie, nouvelle législation dans les lieux publics oblige. Lorsque j’ai découvert le matériel installé pour et par son trio (une batterie, une guitare avec accessoires, une platine vinyle et autres bidouilles à sons) j’ai été un peu surpris. Par contre je n’ai pas été étonné de constater que dans la salle il n’y avait pas grand monde, j’ai tout de même remarqué une star du jazz français venue discuter et soutenir son ami, fin de la rubrique mondaine.
Damien Grange s’installe quasiment dans le noir derrière son petit bordel à machines, se gratte la tête, règle un potentiomètre, se frotte les yeux, tourne un bouton, et ainsi de suite, son petit manège lui permet d’installer puis de développer une masse de sons compacte et dense mais pleine de saillies, de creux et de recoins. Le volume monte, l’espace s’élargit et les sonorités se dilatent encore un peu plus. La pression redescend tout naturellement et sans accroc ce qui me fait dire que plutôt que de pression ou d’intensité il faudrait parler de formes pleines et vivantes. Une deuxième pièce prend le contre-pied de la première, l’accumulation et l’ascension font cette fois ci la place à l’infinitésimal et à la retenue, les sons générés se mélangent avec les grincements et les frottements anonymes de l’atmosphère de la salle, une belle façon de conclure.
C’est le tour du trio de Jacques Di Donato. La musique sera free ou ne sera pas. Di Donato frappe un peu mollement au début mais la pression augmente rapidement, le bidouilleur tripote sa platine et tapote un disque avec ses petits doigts pour obtenir un effet à la fois rythmique et électrique, le guitariste joue avec sa guitare sur les genoux et l’agrémente d’une aiguille à tricoter ou d’un tampon gex -rien de bien nouveau, il ne manque que les grains de riz pour assister à un pompage en bonne et due forme des pratiques de Fred Frith. Le set est composé d’une alternance de passages free qui dégagent les bronches et d’autres calmes et plus nuancés qui rafraîchissent le nez, pas d’originalité flagrante non plus à ce niveau là mais le trio est vivace, parfois teigneux, âpre à la cacophonie : en terme d’improvisation, c’est de la bonne, qui fait plaisir à entendre et ne donne pas l’impression de n’être qu’un dialogue de sourds qui n’écoutent qu’eux-mêmes, de la musique vivante quoi. Applaudissements mérités, même si quelques grognons de service (pour une fois ce n’est pas moi dont il s’agit) persistent à considérer que la musique improvisée n’est qu’un exercice de style rébarbatif.
Andrew Dymond qui est arrivé en retard (vive les punks) installe sa batterie minimal tandis que Damien Grange revient et remet en place sa petite table bleue et une partie du matériel dont il va se servir : c’est l’heure de Chewbacca et de son chaos rythmique. Sur le papier la recette parait simple, une batterie martelée et une voix manipulée aux effets et dans la réalité c’est exactement la même chose, quelle critique constructive. On pourrait croire que le duo ne fonctionne qu’à l’énergie (je me rappelle avoir vu leur premier concert il y a déjà un bon bout de temps, un même soir qu’Api Uiz et à cette époque c’était effectivement le cas) alors qu’il y a de la construction là dedans, du moins une alchimie de confiance réciproque qui donne une impression de cohérence. Musicalement c’est assez difficile à décrire, il y a du grind comme il y a de la chanson, on peut y trouver du hip hop comme de la noise… Certains passages peuvent montrer quelques signes de faiblesse, mais la dynamique reprend toujours le dessus, le duo joue un temps incroyablement long -du moins je ne pensais pas qu’ils puissent le faire aussi longtemps- et on sent bien que s’arrêter est difficile, qu’il y a encore de quoi. Certains moments fébriles frôlent carrément le catastrophisme sonore, un fabuleux fracas qui rend heureux et ce sont ces passages là qui remportent définitivement l’adhésion.
On ne présente plus Jacques Di Donato, vieux barbu de l’improvisation en France, ancien soliste de tel orchestre réputé, prof à ses heures et ponte du mouvement des artistes subventionnés. Je voyais sa présence en milieu de programme comme une éventuelle pause clope sous la pluie, nouvelle législation dans les lieux publics oblige. Lorsque j’ai découvert le matériel installé pour et par son trio (une batterie, une guitare avec accessoires, une platine vinyle et autres bidouilles à sons) j’ai été un peu surpris. Par contre je n’ai pas été étonné de constater que dans la salle il n’y avait pas grand monde, j’ai tout de même remarqué une star du jazz français venue discuter et soutenir son ami, fin de la rubrique mondaine.
Damien Grange s’installe quasiment dans le noir derrière son petit bordel à machines, se gratte la tête, règle un potentiomètre, se frotte les yeux, tourne un bouton, et ainsi de suite, son petit manège lui permet d’installer puis de développer une masse de sons compacte et dense mais pleine de saillies, de creux et de recoins. Le volume monte, l’espace s’élargit et les sonorités se dilatent encore un peu plus. La pression redescend tout naturellement et sans accroc ce qui me fait dire que plutôt que de pression ou d’intensité il faudrait parler de formes pleines et vivantes. Une deuxième pièce prend le contre-pied de la première, l’accumulation et l’ascension font cette fois ci la place à l’infinitésimal et à la retenue, les sons générés se mélangent avec les grincements et les frottements anonymes de l’atmosphère de la salle, une belle façon de conclure.
C’est le tour du trio de Jacques Di Donato. La musique sera free ou ne sera pas. Di Donato frappe un peu mollement au début mais la pression augmente rapidement, le bidouilleur tripote sa platine et tapote un disque avec ses petits doigts pour obtenir un effet à la fois rythmique et électrique, le guitariste joue avec sa guitare sur les genoux et l’agrémente d’une aiguille à tricoter ou d’un tampon gex -rien de bien nouveau, il ne manque que les grains de riz pour assister à un pompage en bonne et due forme des pratiques de Fred Frith. Le set est composé d’une alternance de passages free qui dégagent les bronches et d’autres calmes et plus nuancés qui rafraîchissent le nez, pas d’originalité flagrante non plus à ce niveau là mais le trio est vivace, parfois teigneux, âpre à la cacophonie : en terme d’improvisation, c’est de la bonne, qui fait plaisir à entendre et ne donne pas l’impression de n’être qu’un dialogue de sourds qui n’écoutent qu’eux-mêmes, de la musique vivante quoi. Applaudissements mérités, même si quelques grognons de service (pour une fois ce n’est pas moi dont il s’agit) persistent à considérer que la musique improvisée n’est qu’un exercice de style rébarbatif.
Andrew Dymond qui est arrivé en retard (vive les punks) installe sa batterie minimal tandis que Damien Grange revient et remet en place sa petite table bleue et une partie du matériel dont il va se servir : c’est l’heure de Chewbacca et de son chaos rythmique. Sur le papier la recette parait simple, une batterie martelée et une voix manipulée aux effets et dans la réalité c’est exactement la même chose, quelle critique constructive. On pourrait croire que le duo ne fonctionne qu’à l’énergie (je me rappelle avoir vu leur premier concert il y a déjà un bon bout de temps, un même soir qu’Api Uiz et à cette époque c’était effectivement le cas) alors qu’il y a de la construction là dedans, du moins une alchimie de confiance réciproque qui donne une impression de cohérence. Musicalement c’est assez difficile à décrire, il y a du grind comme il y a de la chanson, on peut y trouver du hip hop comme de la noise… Certains passages peuvent montrer quelques signes de faiblesse, mais la dynamique reprend toujours le dessus, le duo joue un temps incroyablement long -du moins je ne pensais pas qu’ils puissent le faire aussi longtemps- et on sent bien que s’arrêter est difficile, qu’il y a encore de quoi. Certains moments fébriles frôlent carrément le catastrophisme sonore, un fabuleux fracas qui rend heureux et ce sont ces passages là qui remportent définitivement l’adhésion.