La cassette a le vent en poupe. Ne me demandez pas pourquoi, je constate, c’est tout. Même les labels sérieux et arty s’y mettent eux aussi. Dernier exemple en date : le très anglais et très expérimental Touch records qui se lance via Tapeworm dans l’édition de cassettes au tirage limité à 150 exemplaires ! Avec un début de catalogue annonçant Simon Fischer Turner, Stephen O’Malley ou Philip Jeck, ces petits supports rescapés d’une autre époque devraient rapidement devenir des objets de collection prisés et recherchés sur les sites d’enchères en ligne. Mais cela sert il à quelque chose ? Non pas vraiment. Je préfère nettement la position de tel label DIY qui en gros explique que s’il sort un groupe sur cassette c’est parce qu’il aime bien sa musique mais toutefois pas suffisamment non plus pour prendre le risque d’une édition plus onéreuse en format CD ou en vinyle (de plus en plus cher…). Au moins c’est franc et cela veut bien dire ce que cela veut dire.
En résumé on peut affirmer qu’un tape label ça sert à rendre dispo la musique des potes et éventuellement aussi la sienne, le tout à moindre frais. C’est exactement ce que fait Down Boy records -qui, attention, produit également des vrais disques en plastoc et pas des moindres : Death To Pigs, Shub ou Electric Electric…- en publiant cette cassette partagée entre Clot et Pitsky. Un combat des chefs pour savoir lequel des deux groupes a le nom le plus ridicule. Mais passons. On commence par la face Clot qui comprend une dizaine de morceaux instrumentaux ultra courts (jamais plus d’une minute et vingt secondes) joués par un couple guitare/batterie en roue libre et toujours à court d’idées une fois le temps imparti écoulé. Comme on n’en demandait pas plus -un riff, un rythme, un morceau- le garage noise de Clot tient parfaitement son rôle éjaculatoire et boutonneux même si on finit par regretter l’absence d’un peu de chant qui aurait relevé la sauce.
Du chant, bien que rare et lointain, il y en a chez Pitsky, power trio au moins aussi raw et aussi punk que Clot mais qui a au moins pris la peine de faire un vague effort de composition. Le son est également meilleur que sur l’autre face de la cassette bien que l’on imagine que ces six titres ont été enregistrés entre deux portes de placard. L’inspiration semble tenir du vécu avec des titres tels que La Salope, Parachute Bloqué En Position Merde (personnellement j’aime beaucoup) ou Presque Plus De Tabac. Ça promet pour la suite, que l’on espère encore plus grasse et encore plus sale.
Toujours chez Down Boy records, encore une cassette, toujours avec Clot sur une face. Je ne vous refais pas le descriptif mais je trouve ces titres du groupe meilleurs que ceux précédemment évoqués, un côté psychédélique en plus. De l’autre côté Headwar, groupe d’Amiens avec dix minutes maximum enregistrées pendant un concert improbable sous un pont autoroutier du côté de Metz en mai 2008 -on se croirait dans L’Ile De Béton de JG Ballard. Je n’avais jamais écouté ce groupe auparavant et c’est la révélation : juste si les gars d’AH Kraken et leurs copines respectives disséminés dans le public et visiblement déjà complètement bourrés avaient pu fermer leurs gueules parce qu’il y a des passages où on les entend plus fort que le groupe -il est cool ce morceau. Un groupe psychotique (façon Butthole Surfers), lourd et ralenti (comme les Swans), industriel et dissonant… il parait que depuis Headwar a publié un LP regroupant ses deux dernières démos en date, check check check.